Taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures: tarification différenciée

2008/0147(COD)

La Commission a présenté une communication sur une Stratégie pour une mise en œuvre de l’internalisation des coûts externes. L’internalisation des coûts externes s’inscrit dans un «paquet» d’initiatives visant à rendre le transport davantage durable. Depuis un certain nombre d’années, la Commission européenne met en avant la nécessité d’avoir une tarification du transport plus efficace et reflétant mieux le véritable coût du transport. Le transport génère des nuisances qui ont un coût pour la société et aussi pour l'économie. L’internalisation des coûts externes vise à donner un signal de prix correct afin que les utilisateurs supportent les coûts qu’ils génèrent et qu’ils aient ainsi une incitation à modifier leur comportement pour les réduire. Si rien n'est fait dans les années qui viennent, les coûts environnementaux (pollution de l'air, CO2) pourraient représenter 210 milliards d'euros en 2020.

Des prix plus intelligents : les utilisateurs de transport ont des coûts directement liés à l’utilisation de leur moyen de transport (carburant, assurance, etc.). Ces coûts sont considérés comme privés au sens où ils sont directement payés par l’utilisateur. Pourtant, l’utilisateur de transport génère aussi des nuisances qui ont un coût pour la société et qu’il ne prend pas directement en charge (coûts externes) que ce soient les pertes de temps des autres conducteurs liées aux encombrements, les problèmes de santé liés au bruit et à la pollution de l’air et, à plus long terme les effets des émissions de gaz à effet de serre sur le changement climatique. La somme de ces coûts privés et externes représente le coût social du transport. Seul un prix basé sur l’ensemble des coûts sociaux générés par l’utilisateur de transport contribuera à donner un signal correct et représenterait la contrepartie des services utilisés et de la consommation des ressources rares. En outre, chaque coût externe possède des caractéristiques spécifiques qui requièrent l’utilisation d’instruments économiques adaptés. L’application de charges différenciées est le meilleur moyen de tenir compte de ces variations. Enfin, l'établissement de principes communs aux États membres devrait empêcher toute discrimination et garantir la transparence du marché.

Principes généraux d’internalisation : donner les signaux corrects aux utilisateurs de transport doit se traduire par des prix qui ne conduisent pas à une surexploitation des ressources, et qui ne soient pas pénalisants pour les transports et, finalement, pour l’économie. Dans la littérature économique, le point d’équilibre est représenté par la «tarification au coût marginal social», qui est ainsi proposée comme principe général pour l’internalisation. Selon cette approche, les prix dans le transport devraient être égaux au coût supplémentaire à court terme créé par un utilisateur additionnel de l’infrastructure. En théorie, ce coût supplémentaire devrait comprendre le coût de l’utilisateur et les coûts externes. La tarification au coût social marginal mènerait alors à une utilisation efficace de l’infrastructure existante.

Stratégie pour l’internalisation dans tous les modes de transports : il est difficile d’imaginer un mécanisme universel d’internalisation dans tous les modes de transport, qui se caractérisent par différentes technologies, différents nombres d’acteurs, cadres réglementaires et législatifs existants, etc. Le même principe doit s’appliquer avec des instruments différenciés. Les résultats de l’analyse d’impact permettent de moduler la stratégie globale selon les caractéristiques de chaque mode. Les principaux points abordés sont les suivants :

- le transport routier de marchandises représente les trois quarts du transport de marchandises et la possibilité d'internaliser les coûts externes pourrait contribuer à réduire les coûts environnementaux d'environ 1 milliard d'euros par rapport à une situation où on ne ferait rien. La Commission propose ainsi de donner la possibilité d'internaliser certains coûts externes dans le transport routier de marchandises ;

- la révision de la directive 1999/62/CE est proposée afin de permettre une tarification des coûts externes. Les principaux axes de révision porteront sur: 1) la prise en compte des coûts externes de pollution de l’air, du bruit et de la congestion ; 2) l’établissement de mécanismes de coordination communautaire avec une méthode commune et des valeurs maximales pour le calcul des charges ; 3) l’affectation des revenus au transport. Pour des raisons d’efficacité, les péages devront être modulés selon les véhicules, le type de route et la période et perçus à travers des télépéages qui évitent les embouteillages aux barrières de péages ;

- il importe de faciliter l’internalisation par la technologie au travers du plan d’action concernant un système de transport intelligent qui sera proposé à l’automne 2008 ;

- en vue d’inciter les citoyens à utiliser la voiture de façon plus durable, les principes de tarification proposés pourraient être utilement étendus aux voitures privées. Pour des raisons de subsidiarité, les Etats membres garderaient le choix de les appliquer ou non. Le plan d’action sur la mobilité urbaine qui sera proposé à l'automne 2008 examinera les moyens d'améliorer la mobilité des citoyens dans les villes et réfléchira à la valeur ajoutée d'une action communautaire. La dissémination des diverses expériences de tarification mises en place dans les villes européennes, le développement de critères harmonisés en matière de restrictions pour le trafic urbain ainsi que la promotion de l'interopérabilité des technologies pourraient contribuer à harmoniser la mise en place d'une politique d'internalisation des coûts externes dans les zones urbaines en Europe. Enfin, une proposition concernant les taxes sur les voitures particulières est actuellement discutée au Conseil.

- les autres modes de transport ont leur part à jouer dans l'amélioration de la qualité de vie des citoyens. Chaque mode est confronté à un défi qui lui est davantage lié: le bruit dans le transport ferroviaire, la pollution de l'air et le changement climatique dans le transport maritime, le bruit, la pollution de l'air et le changement climatique dans le transport aérien. L'internalisation des coûts externes permet aussi d'utiliser les instruments les mieux adaptés pour inciter les utilisateurs à des comportements plus durables. La Commission suggère une série d’actions en ce sens.

Utiliser les revenus de l'internalisation : la part du transport routier international représente près d'un quart du transport routier en Europe. Dans 7 États membres, elle représente même plus de la moitié (voire 74% en Belgique, 76% au Luxembourg, 85% en Estonie). Aussi, les recettes générées par l'internalisation devraient être affectées au secteur du transport et à la réduction de ces coûts externes, toujours sur la base d'études coûts/avantages ou similaires qui garantissent que les utilisations choisies maximisent les bénéfices nets pour la société. La proposition de réviser la directive 1999/62/CE envisage une telle approche.

La Commission fera un bilan de ces actions en 2013 et rendra compte des progrès effectués en matière d'internalisation. Le transport routier fait l'objet d'une proposition législative présente dans le paquet d'initiative ici proposé. L'évaluation des coûts externes sera actualisée en prenant en compte les recherches et travaux scientifiques en la matière. Si besoin est et en fonction des progrès effectués, d'autres coûts externes tels que la biodiversité, les coûts liés à la nature et aux paysages, ou l'occupation de l'espace pourront être inclus dans l'analyse.