Politique agricole commune PAC: régimes de soutien en faveur des agriculteurs

2008/0103(CNS)

Le Parlement européen a adopté par 441 voix pour, 219 voix contre et 29 abstentions, une résolution législative modifiant la proposition de règlement du Conseil établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs.

Le rapport avait été déposé en vue de son examen en séance plénière par M. Luis Manuel CAPOULAS SANTOS (PSE, PT), au nom de la commission de l'agriculture et du développement rural.

Les principaux amendements, adoptés suivant la procédure de consultation, sont les suivants :

Conditionnalité : tout agriculteur percevant des paiements directs doit être tenu de respecter les règles de sécurité sur le lieu de travail ainsi que les règles contractuelles prévues par l'État membre concerné. Chaque État membre doit être libre de mettre en place une conditionnalité « bonus » qui attribue aux exploitants agricoles des points « bonus » pour des actions en faveur de la biodiversité mises en place en sus des obligations issues des bonnes conditionnalités agro-environnementales.

Sécurité alimentaire : les États membres devront accorder la priorité à la sécurité alimentaire nationale et régionale, dans le cadre d'une gestion équilibrée et durable du territoire. À cette fin, dans le contexte de l'accroissement prévu de l'utilisation des matières premières agricoles pour la production énergétique, ils devront effectuer une analyse de la sécurité alimentaire, afin d'exclure toute menace sur l'approvisionnement.

Modulation : la proposition de la Commission de réduire davantage et très fortement les aides directes aux agriculteurs pour pouvoir renforcer les programmes nationaux de développement rural (la « modulation ») est l'une des plus controversées. Le Parlement propose que tous les montants des paiements directs à octroyer à un agriculteur pour une année civile donnée supérieurs à 10.000 EUR soient réduits chaque année jusqu' à 7% en 2012 (au lieu de 13% dans la proposition de la Commission). En outre, les députés sont favorables à un taux de modulation supérieur pour les exploitations de grande taille mais dans des proportions beaucoup moins élevées que ce que propose la Commission. Le texte amendé prévoit une baisse des aides: de 1% supplémentaire pour les entreprises qui touchent entre 100.000 et 199.999 euros, de 2% entre 200.000 et 299.999 euros et de 3% au delà de 300.000 euros (la Commission préconise une baisse des aides de 3% entre 100.000 et 199.999 euros, 6% entre 200.000 et 299.999 euros et 9% au delà de 300.000 euros).

Par ailleurs, la modulation ne devrait pas être mise en œuvre dans les nouveaux États membres avant 2013, c'est à dire avant le versement des paiements directs complets.

Contrôles : les députés demandent que les contrôles administratifs de demande d’aide ne soient pas trop lourds, en particulier en termes de coût et de formalités administratives, et que les contrôles sur place se déroulent durant une période maximale d’un jour par exploitation. Les États membres devraient s’efforcer  de planifier les contrôles de telle sorte que les exploitations agricoles qui peuvent le mieux être contrôlées durant une certaine période de l’année, en raison de facteurs saisonniers, soient effectivement contrôlées à ce moment-là. Pour le 31 décembre 2007 au plus tard, puis tous les deux ans, la Commission devra soumettre un rapport sur l’application du système de la conditionnalité, accompagné si nécessaire de propositions notamment en vue de: simplifier, déréglementer et améliorer la législation en vertu de la liste des exigences en matière de gestion (une attention particulière étant accordée à la législation concernant les nitrates) ; simplifier, améliorer et harmoniser les systèmes de contrôle sur place.

Seuils minimaux : les députés s’opposent à la proposition de la Commission d’établir un seuil minimal de 250 euros par an ou de 1 ha, à partir duquel les petits agriculteurs ne pourront recevoir d'aides directes. Ils proposent que les États membres puissent décider de ne pas accorder de paiements directs à partir d'un seuil minimal à fixer. Les montants éventuellement  économisés devront demeurer dans la réserve nationale de l'État membre d'où ils proviennent.

Réserve nationale : s’agissant de l’utilisation de la réserve nationale, les États membres pourront accorder la priorité en particulier aux nouveaux arrivants, aux agriculteurs âgés de moins de 35 ans, aux exploitations familiales ou à d'autres agriculteurs prioritaires. Les députés estiment en outre nécessaire de permettre aux États membres de mobiliser la réserve nationale dès l'entrée en vigueur du règlement en 2009, pour financer des mesures de soutien spécifique aux filières en difficulté concentrées dans les zones les plus défavorisées comme les filières ovine et caprine. Tout droit au paiement qui n'a pas été activé au cours d'une période de trois ans serait attribué à la réserve nationale. Ces fonds seront utilisés en priorité pour faciliter l'accès des jeunes à l'activité agricole, afin d'assurer la relève des générations.

Soutien aux secteurs en difficulté (article 68) : les États membres pourront décider, pour le 1er janvier 2010 au plus tard, puis du 1er octobre 2011 au 1er janvier 2012 au plus tard, d'utiliser, à compter de 2010 et/ou de 2012, jusqu'à 15% de leurs plafonds nationaux en vue d'octroyer un soutien aux agriculteurs. Concrètement, les États membres pourront :

  • utiliser jusqu’à 10% de leurs plafonds nationaux pour : i) soutenir certains types d'agriculture revêtant une importance en matière de protection ou d'amélioration de l'environnement, du climat, de la biodiversité et de la qualité de l'eau, en particulier l'agriculture biologique et l'élevage en pâture ; ii) améliorer la commercialisation, en particulier au niveau régional, et la compétitivité des produits agricole ; iii) soutenir les agriculteurs des secteurs du lait et du riz dans des zones vulnérables et les producteurs de viandes bovine, ovine et caprine dans toutes les régions ; iv) compenser des désavantages spécifiques dont souffrent les agriculteurs dans les zones de développement en accordant la priorité aux jeunes agriculteurs, aux exploitations familiales et aux autres agriculteurs prioritaires, notamment les membres d'une organisation de producteurs ou d'une coopérative agricole;
  • utiliser jusqu'à 5% des montants en sus de leurs plafonds nationaux pour contribuer aux primes d’assurance et aux fonds de mutualisation.

Assurance récolte et fonds de mutualisation : le Parlement propose :

  • un élargissement de la couverture des assurances aux dommages causés par des phénomènes climatiques défavorables pouvant être assimilés à des catastrophes naturelles, aux autres dommages causés par des phénomènes climatiques et aux pertes économiques engendrées par des maladies animales ou végétales ou des infestations parasitaires, sous réserve que des mesures préventives contre des risques connus aient été prises. La contribution communautaire au financement des primes s’élèvera à 50% (au lieu de 40% selon la proposition initiale) sur les fonds visés à l’article 68, et à 70% dans les nouveaux États membres ;
  • la possibilité d’utiliser les fonds de mutualisation en cas de maladies animales et végétales et en cas d’aléas climatiques et de catastrophes naturelles, lorsque des mesures préventives ont été prises (le cofinancement communautaire de ces fonds s’élèvera à 50% (au lieu de 40%) et à 70% dans les nouveaux États membres.

Secteur du lait: la proposition d'augmentation des quotas laitiers des États membres de 1% par an jusqu'à la campagne 2013/14, pour préparer leur disparition prévue en 2015, est aussi sujette à d'importantes controverses. Le Parlement est favorable à une augmentation de 1% des quotas en 2009 et 2010, mais il demande à la Commission européenne de réévaluer la situation du marché en 2010 avant de faire de nouvelles propositions pour les années suivantes. Par ailleurs, les députés donnent la possibilité aux États membres qui le souhaitent d’augmenter temporairement leurs quotas si ceux d'autres pays producteurs sont sous-utilisés. Ils demandent aussi la création d'un fonds laitier pour aider la restructuration du secteur.

Dérogations au découplage des aides : compte tenu de la situation actuelle des marchés, les amendements du Parlement ont pour effet de maintenir jusqu’à la fin de 2012 une partie de l’aide couplée (liée à la production) pour les petites OCM (riz, fourrages, protéagineux, lin), dans le secteur de l’élevage et dans celui du tabac.