Énergie: gaz naturel, sécurité de l'approvisionnement

2002/0220(CNS)

La Commission a présenté une communication sur la directive 2004/67/CE du Conseil concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l’approvisionnement en gaz naturel.

La sécurité d’approvisionnement, qui est l’un des trois piliers de la politique énergétique pour l’Europe définie par le Conseil européen en mars 2007, est de plus en plus considérée comme un bien public méritant une attention plus soutenue de la part de l’Union européenne. Le gaz naturel occupe la deuxième place parmi les combustibles composant la palette énergétique de l’Union européenne, avec environ un quart de la consommation intérieure brute d’énergie. Il est largement utilisé dans divers secteurs comme la production d’électricité, le chauffage urbain, les ménages et l’industrie.

La Commission est d’avis que l’UE doit faire un pas en avant pour améliorer la sécurité de l’approvisionnement en gaz et la solidarité à cet égard. Même si les crises sont rares, elles peuvent être lourdes de conséquences économiques et sociales. Il faut donc que l’UE soit préparée à assurer efficacement sa sécurité d’approvisionnement. Le dispositifcommunautaire actuel – bien qu’il n’ait heureusement jamais dû être activé – n’est pas suffisant pour réagir en temps utile à une crise d’approvisionnement en gaz qui dépasserait le niveau susceptible d’être géré par des mesures nationales. De plus, le manque de transparence actuel empêche d’évaluer la situation en temps réel de l’approvisionnement en gaz et d’étudier les possibilités de réaction au sein de l’UE.

La présente communication a pour objet d’étudier des propositions sur la manière dont l’UE pourrait traiter plus efficacement la question de la sécurité de l’approvisionnement en gaz dans la situation actuelle et à l’avenir, et d’examiner quels éléments de la politique actuelle de l’UE sur la sécurité de l’approvisionnement en gaz pourraient être développés davantage. Elle suggère de réviser la directive 2004/67/CE selon les axes suivants.

1°) Étendue et amélioration de l’application des normes de sécurité d’approvisionnement à l’échelon national : il convient d’examiner si le champ d’application obligatoire des normes de sécurité d’approvisionnement doit être étendu à d’autres clients que les ménages. Surtout dans les cas où la production d’électricité à partir du gaz est importante, en l’absence de mesures alternatives adéquates (changement de combustible, stockage de combustible de substitution ou capacités de réserve suffisantes), l’approvisionnement des centrales électriques devrait être assuré même dans des circonstances extrêmes.

La Commission devrait examiner avec les États membres et l’industrie si les différences en ce qui concerne la définition des rôles et responsabilités des acteurs du marché entraînent une distorsion du marché ou un obstacle à la coopération transfrontalière en cas de crise. Une analyse approfondie devrait être menée pour chaque pays afin de déterminer: a) si les normes de sécurité d’approvisionnement définies au niveau national sont proportionnées aux risques encourus; b) si les différences ont une incidence sur la concurrence ou constituent un obstacle aux accords de solidarité.

Il convient en outre de répondre aux questions suivantes: mis à part la rupture partielle d’approvisionnement et les conditions hivernales extrêmes, existe-t-il d’autres circonstances à prendre en considération? Quel devrait être le niveau minimal de sécurité d’approvisionnement à court terme auquel chaque État membre doit être prêt à faire face individuellement? Comment le définir? La Commission formule quelques suggestions à ce propos.

2°) Dispositif et solidarité communautaires : les marchés du gaz, dominés par le gaz acheminé par gazoduc (à 90%), ont un caractère principalement régional: plusieurs pays sont connectés le long du même réseau principal. Par conséquent, les États membres dépendent mutuellement de leur comportement et de leur consommation respectifs. C’est pourquoi un niveau d’intervention supplémentaire pourrait être prévu: (1) l’industrie, (2) les États membres, (3) le niveau régional, (4) le niveau communautaire. Si la rupture d’approvisionnement ne peut être gérée de manière adéquate à l’échelon régional, la région devrait avoir le droit de solliciter une assistance communautaire.

De plus, l’existence d’actions communautaires prédéfinies assurerait une réaction claire, prévisible et en temps utile. Ces actions pourraient comprendre: a) une déclaration commune officialisant la situation d’urgence ; b) la répartition des fournitures de gaz disponibles et des capacités d’infrastructure entre les pays touchés ; c) un acheminement coordonné ; d) le déclenchement de mesures d’urgence dans les pays non touchés ou moins touchés afin d’augmenter le volume de gaz disponible pour les marchés touchés.

Cette approche devrait conduire à définir un plan d’urgence communautaire efficace, incluant une échelle d’urgence européenne, qui spécifiera le niveau nominal de fonctionnement du marché du gaz, les mécanismes de prévention ainsi que différents niveaux de pré-urgence et d’urgence en fonction du volume touché par une rupture et de l’impact économique de cette rupture. La réaction communautaire serait une action de solidarité de fait. Chaque État membre devrait se conformer aux normes de sécurité d’approvisionnement définies.

3°) Transparence : il convient de proposer des obligations adéquates en matière de communication de données afin d’accroître la transparence pour évaluer la situation de l’UE en matière de sécurité d’approvisionnement (ex : évaluation de l’offre et de la demande futures par le réseau européen des GRT, obligation de publier les niveaux agrégés de l’offre et de la demande, le volume de gaz stocké et le niveau d’utilisation des installations de stockage de gaz et des installations de GNL).

4°) Marge de sécurité d’approvisionnement: en cas de déficit d’approvisionnement, un approvisionnement en gaz doit être garanti aux ménages et aux autres clients protégés par la directive. Deux éléments sont indispensables: a) augmenter les quantités de gaz disponible pour les consommateurs protégés par la directive et b) disposer d’infrastructures suffisantes pour acheminer le gaz jusqu’à ces clients.

Ce gaz et ces capacités excédentaires constituent ce qu’on peut appeler la «marge de sécurité d’approvisionnement». L’étendue de cette marge pourrait être calculée directement à partir des normes nationales de sécurité d’approvisionnement redéfinies. Ces valeurs pourraient ensuite être exprimées en pourcentage de la consommation moyenne. Les capacités inutilisées et le «gaz excédentaire» devraient correspondre à cet indicateur.

5°) Stockage stratégique : les stocks stratégiques de gaz sont constitués par l’accumulation de gaz naturel destiné exclusivement à être utilisé dans les situations d’urgence, et qui est donc inaccessible dans des conditions de fonctionnement normal du marché. Le stockage de gaz naturel est coûteux. Les États membres ont des niveaux d’exposition aux risques différents et, partant, des exigences différentes en matière de sécurité de l’approvisionnement en gaz. Il se peut que les stocks stratégiques soient la solution à moyen terme préférable, voire la seule, pour les pays tributaires d’une seule source d’approvisionnement et présentant une part élevée de demande non interruptible.

La Commission ne propose pas d’obligations à l’échelon de l’UE en ce qui concerne les stocks stratégiques: si un État membre choisit cette solution comme mesure nationale, il faut que l’utilisation des stocks stratégiques soit soigneusement réglementée pour éviter des distorsions du marché. Les stocks stratégiques ne doivent pas être libérés en dehors d’une situation de crise dans le but d’influer sur la valeur du stockage et d’autres instruments de flexibilité élaborés dans des conditions de marché concurrentiel. Il convient d’encourager le développement des installations de stockage commercial.

Stratégie à long terme : la Commission souligne que la stratégie à long terme de l’UE sur le gaz et la sécurité d’approvisionnement énergétique, telle qu’elle a été discutée dans l’analyse stratégique de la politique énergétique, reste cruciale même si elle sort du champ d’application de la directive.

Afin de réduire, à l’avenir, le risque et les effets de chocs qui influent sur l’offre de gaz à court terme, l’UE doit continuer à lutter pour l’efficacité énergétique, la mise en place d’un marché intérieur de l’énergie bien interconnecté et fonctionnant harmonieusement, l’innovation et le progrès technologique, la diversification de la palette énergétique, des sources et des routes d’approvisionnement, et pour des cadres et des relations efficaces au niveau international. La transparence et la coordination des actions des États membres à l’égard des pays tiers devraient permettre à l’Union européenne de parler davantage d’une seule voix sur les questions d’énergie à l’échelon international.