Marché intérieur du gaz naturel. Troisième paquet énergie
Le Parlement européen a approuvé en deuxième lecture de la procédure de codécision, sous réserve d’amendements, la position commune du Conseil en vue de l'adoption de la directive du Parlement européen et du Conseil concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE.
Les amendements adoptés sont le résultat d’un compromis négocié entre le Parlement européen et le Conseil sur le paquet législatif relatif au marché de l'énergie.
Le compromis donne aux États membres la possibilité de choisir entre trois options pour dissocier les activités d'approvisionnement et de production de la gestion des réseaux sur les marchés du gaz et de l'électricité :
a) une dissociation intégrale des structures de propriété ;
b) un gestionnaire de réseau indépendant ;
c) un gestionnaire de transport indépendant.
Les députés ont obtenu, dans le compromis, un renforcement des droits du consommateur. Les principaux amendements sont les suivants :
Obligations de service public et renforcement des droits des consommateurs : les États membres devront veiller à ce que tous les clients raccordés au réseau du gaz aient le droit de se procurer leur gaz auprès du fournisseur de leur choix, sous réserve de son accord, indépendamment de l'État membre dans lequel il est enregistré, aussi longtemps qu'il suit les règles applicables de négociation et d'équilibrage et à condition de répondre aux exigences de sécurité d'approvisionnement. A cet égard, les États membres doivent prendre toutes mesures en vue de garantir que les procédures administratives ne constituent pas une entrave pour les entreprises déjà enregistrées en tant que fournisseurs dans un autre État membre.
Les États membres doivent également veiller à ce que:
a) si un client souhaite changer de fournisseur, dans le respect des conditions contractuelles, ce changement soit effectué par l'opérateur ou les opérateurs concernés dans un délai de trois semaines;
b) et les clients aient le droit de recevoir toutes les données pertinentes concernant leur consommation. Ces droits doivent être accordés à tous les clients, sans discrimination en matière de coût, d'investissement et de temps.
Les contrats conclus avec leur fournisseur de gaz doivent prévoir la communication claire sur les factures ou sur les sites web des entreprises de gaz naturel d'informations concernant les droits des consommateurs, notamment les modalités de traitement de leurs plaintes.
Aide mémoire : la Commission devra établir, après avoir consulté les parties intéressées, notamment les États membres, les autorités de régulation nationales, les organisations de consommateurs et les entreprises de gaz naturel, un aide-mémoire du consommateur d'énergie, facile d'accès pour l'utilisateur, qui donne aux consommateurs des informations pratiques sur leurs droits. Cet aide-mémoire du consommateur d'énergie devra être fourni à tous les consommateurs et mis à la disposition du public.
Guichets uniques : les États membres devront veiller à :
a) mettre en place des guichets uniques afin fournir aux consommateurs l'ensemble des informations nécessaires concernant leurs droits, la législation en vigueur et les voies de règlement des litiges à leur disposition en cas de litige ;
b) mettre en place un mécanisme indépendant, comme un médiateur de l'énergie ou un organisme de consommateurs, en vue d'un traitement efficace des plaintes et d'un règlement extrajudiciaire des litiges.
Consommateurs vulnérables : chaque État membre devra définir ce qu'il entend par consommateurs vulnérables en faisant éventuellement référence à la pauvreté énergétique et, entre autres, pour les périodes critiques, à l'interdiction d'interrompre la connexion de ces clients. Les États membres veilleront à ce que les droits et les obligations relatifs aux consommateurs vulnérables soient respectés. En particulier, ils devront prendre des mesures pour protéger les clients finals dans les régions reculées. Ils pourront désigner un fournisseur du dernier recours pour les clients raccordés au réseau de gaz.
Lutte contre la pauvreté énergétique : les États membres doivent prendre des mesures, telles que des plans nationaux d'action dans le domaine de l'énergie ou des prestations au titre des régimes de sécurité sociale, pour assurer aux consommateurs vulnérables l'approvisionnement nécessaire en électricité ou des aides à l'amélioration de l'efficacité énergétique, afin de lutter contre la pauvreté énergétique là où elle se présente, y compris dans le contexte plus large de la pauvreté en général. Ces mesures ne doivent pas faire obstacle à l'ouverture effective du marché, ni au bon fonctionnement du marché.
Promouvoir l'efficacité énergétique : les États membres ou bien l'autorité de régulation doivent recommander aux entreprises de gaz naturel d'optimiser l'utilisation de l'électricité, par exemple en proposant des services de gestion de l'énergie, en élaborant des formules tarifaires novatrices ou, le cas échéant, en introduisant des systèmes intelligents de mesure ou de maillage.
Systèmes intelligents de mesure : les États membres doivent veiller à la mise en place de systèmes intelligents de mesure qui favorisent la participation active des consommateurs au marché de la fourniture de gaz. La mise en place de tels systèmes pourra être soumise à une évaluation économique à long terme de l'ensemble des coûts et des bénéfices pour le marché et pour le consommateur, pris individuellement, ou à une étude déterminant quel modèle de compteurs intelligents est le plus rationnel économiquement et le moins coûteux et quel calendrier peut être envisagé pour leur distribution. Cette évaluation aura lieu dans un délai de 3 ans après l'entrée en vigueur de la directive.
Sous réserve de cette évaluation, les États membres, ou toute autorité compétente qu'ils désignent, fixeront un calendrier pour la mise en place de systèmes intelligents de mesure.
Promotion de la coopération régionale : les États membres, ainsi que les autorités de régulation nationales, doivent coopérer pour assurer l'intégration de leurs marchés nationaux à un ou plusieurs niveaux régionaux, à titre de première étape vers l'instauration d'un marché intérieur totalement libéralisé. Ils devront également faciliter l'intégration des systèmes isolés qui forment les « îlots gaziers » subsistant dans l'Union européenne.
Tâches des gestionnaires de réseau de transport, de stockage et/ou de GNL : chaque gestionnaire de réseau de transport, de stockage et/ou de GNL devra exploiter, entretenir et développer, dans des conditions économiquement acceptables, des installations de transport, de stockage et/ou de GNL sûres, fiables et efficaces, afin d'assurer un marché ouvert, en accordant toute l'attention requise au respect de l'environnement, et assurer les moyens appropriés pour répondes aux obligations de service.
Chaque gestionnaire de réseau de transport devra construire des capacités transfrontalières suffisantes en vue d'intégrer l'infrastructure européenne de transport en accédant à toutes les demandes de capacité économiquement raisonnables et techniquement réalisables, et en prenant en compte la sécurité de l'approvisionnement en gaz naturel.
Tâches des gestionnaires de réseau de distribution : chaque gestionnaire de réseau de distribution devra veiller à ce que le réseau soit en mesure de répondre à long terme à des exigences raisonnables pour la distribution du gaz, ainsi que pour l'exploitation, l'entretien et le développement, dans des conditions économiquement acceptables, d'un réseau sûr, fiable et efficace dans la zone qu'il couvre, en accordant toute l'attention requise au respect de l'environnement et à l'efficacité énergétique.
Réseaux fermés de distribution : le texte prévoit que lorsqu'il est fait usage d'un réseau fermé de distribution ou bien que le propriétaire du réseau maintient un réseau fermé de distribution d'abord pour son propre usage, il sera possible d'exempter, sous certaines conditions, le gestionnaire du réseau de distribution d'obligations qui pourraient constituer une charge administrative injustifiée en raison de la nature particulière des relations entre gestionnaire et utilisateurs du réseau. Les sites industriels, commerciaux ou de partage de services, tels que gares ferroviaires, aéroports, hôpitaux, grands terrains de camping avec équipements intégrés, ou installations de l'industrie chimique, peuvent avoir des réseaux fermés de distribution en raison de la nature particulière de leurs opérations.
Objectifs généraux de l'autorité de régulation : l’autorité devra prendre les mesures raisonnables pour atteindre les objectifs et garantir des conditions appropriées pour que les réseaux de gaz opèrent de manière effective et fiable, en tenant compte d'objectifs à long terme.
Missions et compétences de l'autorité de régulation : l'autorité de régulation sera également investie des missions suivantes: i) fixer ou approuver, selon des critères transparents, les tarifs réglementés de transport et de distribution ou leurs méthodologies; ii) contrôler l’apparition de pratiques contractuelles restrictives, y compris des clauses d’exclusivité ; iii) respecter la liberté contractuelle en matière de contrats de fourniture interruptible et de contrats à long terme dès lors qu'ils sont compatibles avec le droit communautaire et conformes aux politiques de l'Union européenne; iv) contribuer à garantir, en collaboration avec d'autres autorités compétentes, l'effectivité et la mise en œuvre des mesures de protection des consommateurs ; v) contribuer à la compatibilité des mécanismes d'échange de données relatives aux principales opérations de marché sur le plan régional.
Gestion de la congestion : les autorités de régulation surveilleront la gestion de la congestion des réseaux nationaux de gaz, y compris des interconnexions, et la mise en œuvre des règles de gestion de la congestion. À cet effet, les gestionnaires des réseaux de transport ou les opérateurs du marché soumettront leurs règles de gestion de la congestion, y compris l'attribution de capacités, aux autorités de régulation nationales. Celles-ci pourront demander la modification de ces règles.
Les autorités de régulation coopèreront au moins à l'échelon régional pour coordonner le développement de tous les codes de réseau pour les gestionnaires de réseau de transport et les autres acteurs du marché concernés, et coordonner le développement des règles de gestion de la congestion. Les autorités de régulation nationales auront en outre le droit de conclure entre elles des accords de coopération, afin de favoriser la coopération en matière de régulation.
Rapport : au plus tard le 1er janvier 2006, la Commission devra transmettre au Parlement européen et au Conseil un rapport détaillé décrivant les progrès accomplis concernant la création du marché intérieur du gaz naturel. Dans ce rapport, la Commission pourra également examiner la possibilité d'instaurer, par les gestionnaires de réseau de transport, un unique gestionnaire du réseau européen de transport.
Dans les considérants, les points suivants sont soulignés :
- tout système de dissociation devrait éliminer efficacement tout conflit d'intérêt entre les producteurs, les fournisseurs et les gestionnaires de réseaux de transport, afin de créer des incitations à la réalisation des investissements nécessaires et de garantir l'accès des nouveaux arrivants dans le cadre d'un régime réglementaire transparent et efficace. Il ne devrait pas créer un régime réglementaire trop lourd pour les autorités de régulation nationales ;
- afin d'accroître la concurrence sur le marché intérieur du gaz, les gros clients non résidentiels devraient pouvoir choisir leur fournisseur et avoir la possibilité de conclure des contrats avec plusieurs fournisseurs pour couvrir leurs besoins en gaz ;
- les États membres devraient adopter des mesures concrètes pour accompagner une utilisation accrue du biogaz et du gaz provenant de la biomasse, dont les producteurs doivent se voir garantir un accès non discriminatoire au réseau gazier, à condition que cet accès soit en permanence compatible avec les règles techniques et les normes de sécurité applicables ;
- toute harmonisation des pouvoirs des autorités de régulation nationales devrait inclure les pouvoirs de prévoir des incitations pouvant être offertes et les pouvoirs d'infliger des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives à l'encontre des entreprises de gaz naturel, ou de proposer qu'un tribunal leur inflige de telles sanctions. De plus, les autorités de régulation devraient avoir le pouvoir d'exiger des entreprises de gaz naturel les informations pertinentes, de mener des enquêtes appropriées et suffisantes et de régler des litiges.
- les obligations de service public devraient être définies au niveau national, en tenant compte du contexte national. Cependant, le droit communautaire devrait être respecté par les États membres. Les citoyens de l'Union européenne et, lorsque les États membres l'estiment opportun, les petites entreprises devraient bénéficier d'obligations de service public, en particulier en ce qui concerne la sécurité d'approvisionnement et des tarifs raisonnables.
- assurer des règles communes pour un marché intérieur véritablement européen, ainsi qu'un réseau commun et une large offre de gaz naturel est un objectif majeur de la directive. À cette fin, des prix du marché non faussés seraient une incitation aux interconnexions transfrontalières tout en aboutissant, à long terme, à la convergence des prix.