Établissements financiers: exigences de fonds propres pour le portefeuille de négociation et pour les retitrisations; surveillance prudentielle des rémunérations

2009/0099(COD)

OBJECTIF: proposer une nouvelle révision de la réglementation bancaire afin de renforcer les règles concernant les fonds propres des banques et les rémunérations dans ce secteur.

ACTE PROPOSÉ : Directive du Parlement européen et du Conseil.

CONTEXTE : un nouveau cadre concernant les exigences en matière de fonds propres, fondé sur le dispositif international révisé d’adéquation des fonds propres «Bâle II», a été adopté en juin 2006. Il est connu sous la dénomination de «directives fonds propres», et comprend la directive 2006/48/CE concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et son exercice (refonte) et la directive 2006/49/CE sur l’adéquation des fonds propres des entreprises d’investissement et des établissements de crédit (refonte).

Il est largement reconnu qu’une nouvelle réforme de la réglementation est nécessaire pour corriger les faiblesses du cadre applicable aux fonds propres réglementaires et à la gestion du risque des établissements financiers, qui ont contribué à la crise que connaissent les marchés financiers mondiaux.

Dans le cadre de sa réaction à la crise financière, en novembre 2008, la Commission a chargé un groupe de haut niveau présidé par M. Jacques de Larosière de proposer des recommandations en vue de réformer la surveillance et la réglementation financières européennes. S’appuyant sur les recommandations du groupe, la Commission a défini, dans sa communication au Conseil européen de printemps du 4 mars 2009, intitulée «L’Europe, moteur de la relance» (COM(2009)0114), un programme ambitieux de réforme des services financiers. La présente proposition est l’une des mesures que la Commission a prises pour mettre en œuvre ce programme.

ANALYSE D’IMPACT : au total, 14 options stratégiques différentes ont été évaluées. L’option préférée est la suivante :

1)     Portefeuille de négociation : en ce qui concerne les exigences de fonds propres pour le portefeuille de négociation des banques, une série de modifications ciblées, alignées sur les dispositions envisagées par le comité de Bâle, seront introduites.

2)     Retitrisation : conformément à l’approche élaborée par le comité de Bâle, les positions de retitrisation seraient soumises à une exigence de fonds propres plus élevée que d’autres positions de titrisation, afin de refléter le risque plus élevé de pertes de valeur inattendues. Pour les retitrisations particulièrement complexes, il s’agit de renforcer à la fois les exigences en matière de diligence requise et la surveillance visant à les faire appliquer.

3)     Exigences de publicité : les modifications amélioreront la compréhension que l’investisseur pourra avoir du profil de risque des banques et, en rehaussant la transparence, renforceront la gestion du risque des banques. La charge administrative supplémentaire pour le secteur bancaire de l’UE est estimée à 1,3 million d’EUR par an et devrait peser principalement sur les grands établissements qui ont des approches plus avancées de la gestion des risques.

4)     Surveillance prudentielle des politiques de rémunération : les modifications proposées imposeront aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement d’adopter des politiques de rémunération compatibles avec une gestion des risques efficace. Les principes applicables seront fixés dans les «directives fonds propres», mais seront étroitement harmonisés avec ceux définis dans la recommandation de la Commission sur la politique de rémunération dans le secteur des services financiers. Le fait de rendre contraignants les principes de la recommandation en la matière augmentera le taux de conformité des établissements de crédit et des entreprises d’investissement.

CONTENU : la Commission propose une nouvelle révision des règles de l’Union européenne sur les exigences de fonds propres des banques, dont le but est d’obliger les banques à évaluer d’une manière plus stricte les risques liés à leur portefeuille de négociation, d’imposer des exigences de fonds propres plus élevées pour les retitrisations, de rehausser la confiance des marchés grâce à des exigences de publicité accrues en ce qui concerne les expositions de titrisation et enfin, d’imposer aux banques de bonnes pratiques de rémunération qui n’encouragent pas ou ne récompensent pas les prises de risque excessives.

En vertu des nouvelles règles, les banques se verront restreintes dans leurs possibilités d’investir dans des retitrisations de haute complexité si elles ne peuvent démontrer qu’elles ont parfaitement saisi les risques sous-jacents, tandis que les autorités de surveillance nationales examineront les politiques de rémunération des banques et auront le pouvoir de leur imposer des sanctions si elles ne satisfont pas aux nouvelles exigences.

Les modifications proposées des directives «exigences de fonds propres» sont les suivantes

Exigences de fonds propres pour la retitrisation : les retitrisations sont des produits financiers complexes qui ont joué un rôle dans le déroulement de la crise financière. Généralement, les agences de notation et les acteurs de marché ont attribué un faible risque de crédit à ce type de produit. Toutefois, compte tenu de leur complexité et de leur sensibilité aux pertes corrélées, ces retitrisations comportent un risque supérieur à celui de titrisations simples. Par conséquent, la proposition prévoit un ensemble d’exigences de fonds propres supérieures à celles qui s’appliquent aux positions de titrisation simple de même notation.

La proposition inclut par ailleurs une procédure de surveillance renforcée pour les titrisations particulièrement complexes. Elle exige que la conformité aux normes de diligence requise applicables aux banques qui investissent dans ces produits soit vérifiée pour tout investissement effectué. Le CECB fera converger la pratique de surveillance en s’accordant sur ce qui constitue une retitrisation «de grande complexité», afin que l’aptitude des établissements à faire preuve de la diligence requise par rapport à ces instruments puisse être vérifiée au cas par cas par les autorités de surveillance.

Dans les cas exceptionnels où une banque ne peut démontrer à son régulateur qu’elle a fait preuve de la diligence requise par rapport à une retitrisation de grande complexité, une pondération de risque de 1250% sera appliquée à la position de retitrisation en question. Ce traitement des fonds propres s’appliquera aux nouvelles retitrisations émises après le 31 décembre 2010 et, après le 31 décembre 2014, aux positions de retitrisation existantes dont des expositions sous-jacentes sont remplacées ou complétées par de nouvelles expositions après cette date. Par conséquent, la pondération de risque de 1250% ne s’appliquera pas aux positions des banques en retitrisations prises dans le passé (sauf si les expositions sous-jacentes de ces positions sont modifiées après la fin de 2014).

Publicité sur les expositions de titrisation : une information adéquate sur le niveau de risque auquel les banques sont exposées est indispensable pour assurer la confiance des marchés. Les nouvelles règles prévoient des exigences plus strictes en matière de publicité, afin d’assurer la confiance des marchés dont les banques ont besoin pour recommencer à se prêter mutuellement de l’argent. En particulier, les exigences de publicité couvriront à l’avenir non seulement les risques des positions de titrisation dans le portefeuille hors négociation, mais aussi celles incluses dans le portefeuille de négociation.

Exigences de fonds propres pour le portefeuille de négociation : le portefeuille de négociation comprend l’ensemble des instruments financiers qu’une banque détient dans l’intention de les revendre à court terme, ou pour couvrir d’autres instruments de ce portefeuille. Les exigences de fonds propres pour les titrisations dans le portefeuille de négociation sont calculées actuellement comme si ces instruments étaient des titres de créance normaux. Au contraire, dans le portefeuille bancaire, il est prévu un ensemble distinct d’exigences de fonds propres, plus différencié et sensible au risque. La proposition envisage que les exigences de fonds propres pour le portefeuille de négociation soient fondées sur celles qui s’appliquent aux titres équivalents dans le portefeuille bancaire.

Exigences de fonds propres pour risque de marché fondées sur des modèles internes : les établissements peuvent actuellement calculer leurs exigences de fonds propres pour risque de marché dans le portefeuille de négociation en utilisant leurs propres modèles pour estimer les pertes potentielles résultant d’évolutions futures défavorables du marché. Au cours de la période 2007-2008, il est devenu clair que les modèles internes sous-estimaient les pertes potentielles en situation de crise. Par conséquent, la directive proposée renforcera à plusieurs égards les exigences de fonds propres fondées sur des modèles internes.

Politiques et pratiques des banques en matière de rémunération : l’actuel cadre de surveillance prudentielle européen n’exige pas explicitement que les politiques de rémunération des établissements financiers soient soumises à une surveillance prudentielle. Les autorités de surveillance ne se sont donc généralement pas intéressées de près aux implications des politiques de rémunération sur les risques et la gestion efficace de ceux-ci.

Les modifications proposées des «directives fonds propres» visent à:

·        imposer aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement l’obligation d’adopter des politiques et pratiques de rémunération compatibles avec une gestion saine et efficace des risques, et des principes de haut niveau en matière de bonne politique de rémunération;

·        faire entrer les politiques de rémunération dans le champ de la surveillance prudentielle au titre des «directives fonds propres», afin que les autorités de surveillance puissent exiger de l’entreprise concernée qu’elle prenne des mesures pour remédier à tout problème qu’elles détecteraient;

·        faire en sorte que les autorités de surveillance puissent aussi imposer des sanctions financières (y compris des amendes) ou non financières aux entreprises qui ne se conforment pas à leurs obligations.

La portée de l’obligation proposée est limitée à la rémunération du personnel dont les décisions peuvent influer sur le niveau de risque pris par l’établissement

Á noter que les principes de haut niveau proposés en matière de bonne politique de rémunération ne visent pas à fixer ni la forme, ni le montant des rémunérations, et les établissements restent responsables de la conception et de l’application de leur propre politique de rémunération.

De plus, le contrôle bancaire dans le cadre du processus de surveillance prudentielle s’attacherait à déterminer si les politiques et pratiques de rémunération sont compatibles avec une bonne gestion des risques, compte tenu de la nature de l’activité de l’entreprise. Afin d’harmoniser les évaluations prudentielles et d’aider les entreprises à se conformer aux principes en vigueur, la proposition prévoit que le CECB assure la mise en place de lignes directrices en matière de bonnes politiques de rémunération.

Si une autorité de surveillance décèle des problèmes, elle peut exiger de l’établissement de crédit ou de l’entreprise d’investissement de prendre des mesures qualitatives ou quantitatives pour y remédier. En outre, les autorités de surveillance pourront recourir à des sanctions tant financières que non financières, ces sanctions étant efficaces, proportionnées et dissuasives.

INCIDENCE FINANCIÈRE : la proposition n’a pas d’incidence sur le budget de la Communauté.