Application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions relatives à des mesures de contrôle en tant qu'alternative à la détention provisoire. Décision-cadre
OBJECTIF : développer un espace de liberté, de sécurité et de justice, en permettant la reconnaissance mutuelle des décisions relatives aux mesures de contrôle au cours d’une procédure pénale.
ACTE LÉGISLATIF : Décision-cadre 2009/829/JAI du Conseil concernant l’application, entre les États membres de l’Union européenne, du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions relatives à des mesures de contrôle en tant qu’alternative à la détention provisoire.
CONTENU : en ce qui concerne la détention des personnes faisant l’objet d’une procédure pénale, le risque existe que des traitements différents leur soient réservés selon qu’elles résident ou non dans l’État où le procès doit se tenir: une personne ne résidant pas dans cet État court le risque d’être placée en détention provisoire dans l’attente du procès même si, dans des conditions analogues, un résident ne le serait pas.
Dans un espace européen commun de justice sans frontières intérieures, il est nécessaire de prendre des mesures afin de garantir qu’une personne faisant l’objet d’une procédure pénale qui ne réside pas dans l’État où le procès doit se tenir ne fasse pas l’objet d’un traitement différent de celui réservé à une personne faisant l’objet d’une procédure pénale qui y réside.
La présente décision-cadre définit les règles selon lesquelles un État membre reconnaît une décision relative à des mesures de contrôle rendue dans un autre État membre à titre d’alternative à la détention provisoire, assure le suivi des mesures de contrôle prononcées à l’encontre d’une personne physique et remet la personne concernée à l’État d’émission en cas de non-respect de ces mesures. La décision-cadre respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus, notamment, par l’article 6 du traité sur l’Union européenne et réaffirmés par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Ses objectifs sont les suivants:
- garantir le cours régulier de la justice et, notamment, la comparution en justice de la personne concernée;
- promouvoir, le cas échéant, le recours, au cours d'une procédure pénale, aux mesures non privatives de liberté pour les personnes qui ne résident pas dans l'État membre où a lieu la procédure;
- renforcer la protection des citoyens, en permettant à une personne résidant dans un État membre, mais faisant l’objet d’une procédure pénale dans un deuxième État membre, d’être suivie par les autorités de l’État dans lequel elle réside dans l’attente du procès ;
- renforcer le droit à la liberté et la présomption d’innocence dans l’Union européenne et assurer la coopération entre les États membres dans le cas où une personne est soumise à des obligations ou à des mesures de contrôle en attendant la décision d’un tribunal.
Les principaux éléments de la décision-cadre sont les suivants :
Désignation des autorités compétentes : chaque État membre doit indiquer au secrétariat général du Conseil les autorités judiciaires qui, en vertu de son droit interne, sont compétentes pour agir conformément à la présente décision-cadre, lorsque cet État membre est l’État d’émission ou l’État d’exécution Chaque État membre peut désigner une autorité centrale ou, lorsque son ordre juridique le prévoit, plusieurs autorités centrales pour assister ses autorités judiciaires compétentes.
Types de mesures de contrôle : la décision-cadre s’applique aux mesures de contrôle ci-après:
- obligation pour la personne d’informer l’autorité compétente de l’État d’exécution de tout changement de résidence, en particulier aux fins de recevoir une convocation à une audition ou à une audience au cours d’une procédure pénale;
- obligation de ne pas se rendre dans certaines localités, certains endroits ou certaines zones définies de l’État d’émission ou de l’État d’exécution;
- obligation de rester en un lieu déterminé, le cas échéant durant des périodes déterminées;
- obligation comportant des restrictions quant à la possibilité de quitter le territoire de l’État d’exécution;
- obligation de se présenter à des heures précises devant une autorité spécifique;
- obligation d’éviter tout contact avec certaines personnes ayant un lien avec l’infraction ou les infractions qui auraient été commises.
D’autres mesures peuvent notamment inclure: a) une obligation de ne pas exercer une profession déterminée ou ne pas exercer ses activités professionnelles dans certains secteurs; b) une obligation de ne pas conduire de véhicule; c) une obligation de déposer une certaine somme d’argent ; d) une obligation de se soumettre à des soins médicaux ou à une cure de désintoxication.
Critères concernant l’État membre auquel la décision relative à des mesures de contrôle peut être transmise : une décision relative à des mesures de contrôle peut être transmise à l’autorité compétente de l’État membre dans lequel la personne a sa résidence légale habituelle, dans les cas où la personne, ayant été informée des mesures concernées, consent à retourner dans cet État. L’autorité compétente de l’État d’émission peut, à la demande de la personne, transmettre la décision relative à des mesures de contrôle à l’autorité compétente d’un État membre autre que celui dans lequel la personne a sa résidence légale habituelle, à condition que cette dernière autorité ait consenti à cette transmission.
Procédure : lorsque l’autorité compétente de l’État d’émission transmet une décision relative à des mesures de contrôle à un autre État membre, elle doit veiller à ce qu’elle soit accompagnée d’un certificat dont le modèle-type figure à l’annexe I de la décision-cadre. L’autorité compétente de l’État d’émission doit préciser: a) le cas échéant, la durée pendant laquelle la décision relative à des mesures de contrôle est applicable et si une prorogation de cette décision est possible; et b) à titre indicatif, la durée provisoire pendant laquelle le suivi des mesures de contrôle devrait être nécessaire, compte tenu de toutes les circonstances de l’affaire connues au moment de la transmission de la décision relative à des mesures de contrôle.
Les certificats doivent être traduits dans la langue officielle ou dans une des langues officielles de l’État d’exécution.
Décision prise dans l’État d’exécution : l’autorité compétente de l’État d’exécution doit reconnaître, dès que possible et en tout état de cause dans un délai de 20 jours ouvrables à compter de la réception de la décision relative à des mesures de contrôle et du certificat, la décision relative à des mesures de contrôle et prendre sans délai toute mesure nécessaire au suivi des mesures de contrôle, sauf si elle décide de faire valoir l’un des motifs de non-reconnaissance prévus à la décision-cadre.
Adaptation des mesures de contrôle : si, de par leur nature, les mesures de contrôle sont incompatibles avec la législation de l’État d’exécution, l’autorité compétente de cet État membre peut les adapter selon les types de mesures de contrôle qui s’appliquent dans son droit interne à des infractions équivalentes. La mesure de contrôle adaptée doit correspondre autant que possible à celle prononcée dans l’État d’émission. La mesure de contrôle adaptée ne peut être plus sévère que la mesure de contrôle initialement prononcée.
Double incrimination : conformément à la décision-cadre, une série de 32 infractions, telles que définies par la législation de l’État d’émission, si elles sont punies dans cet État d’une peine ou d’une mesure privative de liberté d’une durée maximale d’au moins trois ans, donnent lieu à la reconnaissance de la décision relative à des mesures de contrôle, sans contrôle de la double incrimination des faits.
Droit applicable au suivi : le suivi des mesures de contrôle est régi par le droit de l’État d’exécution.
Poursuite des mesures de contrôle : si, à l’expiration de la période pendant laquelle les mesures de contrôle peuvent être suivies dans l’État d’exécution, les mesures de contrôle restent nécessaires, l’autorité compétente de l’État d’émission peut demander à l’autorité compétente de l’État d’exécution de prolonger le suivi des mesures de contrôle. L’autorité compétente de l’État d’émission doit préciser la durée pendant laquelle cette prolongation sera probablement nécessaire. L’autorité compétente de l’État d’exécution statuera sur cette demande conformément à son droit national, en mentionnant le cas échéant la durée maximale de la prolongation.
Compétence pour toute décision ultérieure et droit applicable : l’autorité compétente de l’État d’émission est compétente pour prendre toute décision ultérieure en liaison avec une décision relative à des mesures de contrôle. Ces décisions ultérieures sont notamment: a) la prorogation, le réexamen et le retrait de la décision relative à des mesures de contrôle; b) la modification des mesures de contrôle; c) l’émission d’un mandat d’arrêt ou de toute autre décision judiciaire exécutoire ayant le même effet. Le droit applicable aux décisions rendues est celui de l’État d’émission.
La compétence de l’autorité compétente de l’État d’émission est sans préjudice des procédures qui peuvent être engagées dans l’État d’exécution à l’encontre de la personne concernée au titre d’infractions pénales commises par elle, autres que celles sur lesquelles la décision relative aux mesures de contrôle est fondée.
Informations transmises par l’État d’exécution : l’autorité compétente de l’État d’exécution doit informer sans délai l’autorité compétente de l’État d’émission, par tout moyen laissant une trace écrite:
- de tout changement de résidence de la personne concernée;
- de la durée maximale pendant laquelle les mesures de contrôle peuvent être suivies dans l’État d’exécution, lorsque la législation de l’État d’exécution prévoit une telle durée maximale;
- du fait qu’il est impossible dans la pratique de suivre les mesures de contrôle;
- du fait qu’un recours juridictionnel a été formé contre une décision de reconnaître une décision relative à des mesures de contrôle;
- de la décision définitive de reconnaître la décision relative à des mesures de contrôle et de prendre toutes les mesures nécessaires au suivi des mesures de contrôle;
- de la décision éventuelle d’adapter les mesures de contrôle;
- de la décision éventuelle de ne pas reconnaître la décision relative à des mesures de contrôle et de ne pas assumer la responsabilité du suivi des mesures de contrôle, en en indiquant les motifs.
Remise de la personne : si l’autorité compétente de l’État d’émission a émis un mandat d’arrêt ou toute autre décision judiciaire exécutoire ayant le même effet, la personne doit être remise conformément à la décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen.
Frais : les frais résultant de l’application de la décision-cadre sont pris en charge par l’État d’exécution, à l’exclusion des frais occasionnés exclusivement sur le territoire de l’État d’émission
Rapport : au plus tard le 1er décembre 2013, la Commission rédigera un rapport en se fondant sur les informations reçues des États membres. Sur la base de ce rapport, le Conseil évaluera: a) dans quelle mesure les États membres ont pris les mesures nécessaires pour se conformer aux dispositions de la présente décision-cadre; et b) l’application de la présente décision-cadre.
ENTRÉE EN VIGUEUR : 01/12/2009.
MISE EN ŒUVRE : au plus tard le 01/12/2012.