Mesures visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement en gaz

2009/0108(COD)

La commission de l'industrie, de la recherche et de l'énergie a adopté le rapport d’Alejo VIDAL-QUADRAS (PPE, ES) concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement en gaz et abrogeant la directive 2004/67/CE.

La commission parlementaire recommande que la position du Parlement européen adoptée en première lecture suivant la procédure législative ordinaire (l’ex-procédure de codécision), modifie la proposition de la Commission comme suit :

Une approche à trois niveaux : la commission parlementaire estime que les rôles et les responsabilités devraient être définis de façon à assurer une approche à trois niveaux: 1) d'abord les entreprises concernées et l'industrie, puis 2) les États membres, au plan soit national soit régional, 3) enfin l'Union européenne. En cas de rupture d'approvisionnement, les opérateurs sur le marché doivent pouvoir réagir à la situation par des mesures fondées sur le marché telles que celles énumérées à l'annexe II. Si cette réaction est inadaptée, les États membres et leurs autorités compétentes devraient prendre des mesures telles que celles énumérées à l'annexe II afin d'éliminer ou d'atténuer l'impact de la rupture des approvisionnements. Ce n'est que si ces mesures restent sans effet que des mesures doivent être prises au niveau régional ou de l'Union pour éliminer ou atténuer l'impact de la rupture des approvisionnements. Dans la mesure du possible, les solutions régionales sont préférables à une intervention de l'Union.

Objet du règlement: les députés précisent que le règlement proposé énonce notamment des mesures exceptionnelles qui doivent être mises en application lorsque le marché n'est plus en mesure de fournir le gaz nécessaire, en assurant une définition et une attribution précises des responsabilités et une coordination des réactions aux niveaux des entreprises de gaz naturel, des États membres, des régions concernées et de l'Union.

Définitions: les députés n’acceptent pas la définition de «clients protégés» contenue dans la proposition. Selon eux, il devrait s’agir de « tous les ménages qui sont connectés à un réseau de distribution de gaz ». Ils ont par ailleurs précisé que l’ «autorité compétente» devrait également être responsable de l'application et de la mise en œuvre des plans et mesures prévus au règlement.

Responsabilité de la sécurité de l'approvisionnement en gaz : les députés insistent pour que l’autorité compétente responsable de la mise en œuvre des mesures de sécurité de l'approvisionnement en gaz soit désignée selon une procédure transparente. Conjointement avec l'autorité compétente, la Commission devrait veiller à ce que les contrats de gaz naturel conclus entre les États membres ou leurs entreprises de gaz naturel et les pays tiers ne comportent de clause ayant le même effet qu'une clause de destination, et ce sans préjudice des compétences des autorités de la concurrence.

Sécurité à long terme des mesures d'approvisionnement : les députés ont introduit un nouvel article stipulant qu’au plus tard un an après l'entrée en vigueur du règlement, la Commission devra présenter, dans le cadre de la définition d'une stratégie d'approvisionnement à long terme, un rapport sur les instruments et les mesures permettant de diversifier davantage les sources d'approvisionnement de l'Union européenne en gaz ainsi que les itinéraires d'acheminement du gaz vers l'Union. Ce rapport comportera des propositions adressées aux différents États membres concernant les actions et mesures visant à assurer la sécurité de l'approvisionnement en gaz. Il englobera, entre autres, une évaluation du rôle des installations GNL ainsi qu'un relevé des capacités de stockage de gaz prévues dans les différents États membres.

Le rapport devra contenir en outre une évaluation de la coopération régionale existante et des recommandations relatives à l'amélioration des plans d'action préventive et des plans d'urgence régionaux. Toute démarche de coopération régionale devra être conduite avec la participation des entreprises de gaz naturel, des autorités de régulation et des entreprises consommatrices, et en coopération étroite avec la Commission. Cette coopération régionale doit promouvoir les principes généraux de la solidarité européenne. Elle ne doit pas contrevenir à ces principes.

En outre, l'Union devrait coopérer avec les pays tiers producteurs et les pays tiers de transit afin d'échanger les meilleures pratiques en matière d'efficacité énergétique, par exemple dans le cadre des accords de coopération en vigueur tels que le traité sur la Charte de l'énergie.

Mise en place d'un plan d'action préventive et d'un plan d'urgence : une nouvelle disposition stipule que lorsque l'autorité de régulation n'est pas l'autorité compétente, elle doit être formellement associée au processus d'établissement du plan d'action préventive et du plan d'urgence. L'autorité compétente devrait tenir compte des évaluations effectuées par l'autorité de régulation lorsque celles-ci concernent des problèmes de régulation afférents au réseau. Le Groupe de coordination pour le gaz devrait  pouvoir être consulté par la Commission et être tenu informé du résultat des consultations qui se déroulent entre les autorités compétentes et la Commission avant l’adoption des plans.

Si les États membres sont soumis à d'autres obligations de service public touchant à la sécurité de l'approvisionnement en gaz, les autorités compétentes devraient rendre celles-ci publiques dans un délai de deux mois à compter de l'entrée en vigueur du règlement et procéder aux mises à jour nécessaires à la suite de l'adoption de leur plan d'action préventive et de leur plan d'urgence.

En outre, l'autorité compétente devrait procéder, tous les deux ans, à la révision du plan d'action préventive et du plan d'urgence, sur la base des changements observés dans l'évaluation des risques qui influent sur la sécurité de l'approvisionnement en gaz.

Contenu du plan d'action préventive : si l'État membre en décide ainsi sur la base de l'évaluation des risques, le plan devrait contenir une description des obligations d'approvisionner les clients autres que les clients protégés connectés au réseau de distribution du gaz et fournissant des services publics importants, comme les écoles ou les hôpitaux. Ces obligations ne doivent pas affecter  leur capacité à approvisionner les clients protégés en cas de crise et ne doivent pas contrevenir aux principes de la solidarité européenne ou régionale envers les pays connaissant des problèmes d'approvisionnement. Le plan devrait aussi contenir les mécanismes de coopération avec d'autres États membres pour la mise en place des plans régionaux d'action préventive.

Le plan, en se fondant d'abord sur des mesures de marché, devrait prendre en compte l'impact des mesures adoptées sur les consommateurs et l'impact sur l'environnement, ainsi que la situation internationale et son évolution, principalement dans les principaux pays d'approvisionnement et de transit.

Les députés demandent également que la Commission élabore un plan d'action préventive de l'Union européenne basé sur l'ensemble des plans nationaux et régionaux, identifiant les scénarios de crise possibles et définissant les mesures les plus efficaces pour atténuer la crise, de façon à garantir une coordination optimale des actions en cas d'urgence de l'Union.

Normes relatives aux infrastructures : le texte amendé prévoit qu’au plus tard 3 ans après l'entrée en vigueur, l'autorité compétente devra veiller à ce que, dans le cas d'une défaillance de l'infrastructure principale, les infrastructures restantes (N-1) soient en mesure de livrer le volume nécessaire de gaz pour satisfaire la demande journalière totale de gaz de la zone couverte pendant une période d'un jour de demande exceptionnellement élevée, statistiquement observée tous les 20 ans. La proposition de la Commission prévoit une période de 60 jours de demande en gaz exceptionnellement élevée durant la période la plus froide statistiquement observée tous les 20 ans.

Les députés on en outre introduit les amendements suivants :

  • l'absence d'accès au réseau de gaz intégré de l'Union européenne et la dépendance exclusive à l'égard d'un seul fournisseur de gaz devront être considérées comme non conformes à la norme N-1.Chaque autorité compétente devra informer la Commission sans délai de toute situation de non-conformité avec la norme N-1 après consultation des entreprises de gaz naturel concernées ;
  • les gestionnaires et propriétaires de réseau de transport devront veiller, dans les deux ans suivant l'entrée en vigueur du règlement, à ce qu'une capacité physique permanente permette de transporter du gaz dans les deux sens sur toutes les interconnexions, à l'exception des gazoducs reliant entre eux les points de production, des facilités LNG ou des points d'interconnexion avec les réseaux de distribution. Le niveau de la capacité de flux bidirectionnel devra être atteint au meilleur coût en tenant compte d'aspects qui ne sont pas purement financiers, comme la sécurité d'approvisionnement ou la contribution au marché intérieur. Les autorités compétentes et la Commission devront veiller à ce que l'évaluation des interconnexions soit revue à intervalles réguliers si les circonstances changent ;
  • la Commission pourra être invitée par une autorité compétente à décider d'exempter une interconnexion donnée de l'obligation d'établir des flux bidirectionnels tels que prévus au règlement. La Commission pourra accorder l'exemption si la capacité de flux bidirectionnels ne renforce pas dans une mesure significative la sécurité des approvisionnements des États membres concernés, ou si les coûts d'investissement l'emportent dans une large mesure sur les avantages potentiels pour la sécurité des approvisionnements de ces États membres ;
  • les États membres devront veiller à ce que les capacités nationales d'entrée et les réseaux de transport nationaux soient capables d'adapter les flux nationaux de gaz à tout scénario de rupture des infrastructures d'approvisionnement identifiés dans l'évaluation des risques, en éliminant notamment les goulots d'étranglement internes ;
  • les autorités de régulation nationales devront introduire des incitations appropriées et prendre en compte les coûts réellement exposés liés au respect de la norme N-1 et les coûts de la mise en œuvre de la capacité physique permanente permettant de transporter du gaz dans les deux sens lors de l'adoption, selon une procédure transparente et précise. Dans le cas où les coûts sont encourus dans plusieurs États membres ou dans un seul État membre pour le compte d'autres États membres, la Commission pourra proposer des instruments financiers adéquats pour le financement des interconnexions.

Normes d'approvisionnement : les entreprises de fourniture doivent être invitées à prendre les mesures visant à garantir l'approvisionnement en gaz des clients protégés de l'État membre en cas de: a)  températures extrêmes pendant une période de pointe de 7 jours telles qu'il s'en produit statistiquement tous les vingt ans; et b)  toute période de 45 jours (plutôt que 60 jours) de demande en gaz exceptionnellement élevée durant les périodes météorologiques les plus froides statistiquement observées tous les 20 ans.

Les députés estiment en outre que les installations de production nécessaires pour maintenir les approvisionnements (centrales électriques, raffineries, installations de stockage du gaz, etc.) doivent pouvoir fonctionner avec le moins d'entraves possible afin de garantir les livraisons de gaz naturel, d'électricité et de chaleur. Les valeurs limites prescrites peuvent être dépassées dans une mesure qui reste à définir. Une modification des conditions imposées par la législation relative à l'eau doit être autorisée dans une mesure à déterminer. Dans ce contexte, les dangers pour l'environnement sont à éviter.

Évaluation des risques : un amendement dispose que la Commission devra procéder à une évaluation exhaustive des risques pour la sécurité de l'approvisionnement en gaz au niveau de l'Union. Elle adoptera et rendra public un rapport qu'elle adressera aux autorités compétentes, au Groupe de coordination pour le gaz, à l'ACER, à ENTSO-G et au Parlement européen.

Dans l'évaluation des risques, les États membres pourront prescrire, sur la base d'une analyse technique et économique, des obligations d'approvisionner les clients autres que les clients protégés, déjà connectés au réseau de distribution du gaz et fournissant des services publics importants comme les écoles ou les hôpitaux. Ces obligations ne doivent pas affecter  leur capacité à approvisionner les clients protégés en cas de crise, et ne doivent pas contrevenir aux principes de la solidarité européenne ou régionale envers les pays connaissant des problèmes d'approvisionnement.

À la suite de la recommandation de la Commission, l'évaluation des risques devrait être effectuée également au niveau régional.

Plan d'urgence et seuils d’alerte : le plan doit définir le rôle et les responsabilités de tous les principaux intervenants du marché, en tenant compte des différentes mesures dans lesquelles ils sont affectés en cas de rupture d'approvisionnement en gaz, et définir leur interaction avec l'autorité compétente et, le cas échéant, avec l'autorité de régulation. Les mesures non fondées sur le marché ne devraient être mises en œuvre que s'il est établi que les mécanismes du marché ne peuvent plus à eux seuls assurer l'approvisionnement des clients protégés.

Les députés souhaitent que la Commission élabore un plan d'urgence de l'Union qui identifie les incohérences éventuelles entre les plans nationaux et régionaux et qui définisse les actions éventuelles de coordination que la Commission doit mettre en œuvre en cas d'urgence de l'Union. Le plan d'urgence devrait décrire les mécanismes employés pour mettre en œuvre la médiation avec les pays tiers. Il devrait en outre déterminer les mesures et actions à engager en cas d'urgence afin d'atténuer les effets d'une rupture des approvisionnements de gaz sur l'approvisionnement en électricité produite à partir du gaz et en chauffage urbain des consommateurs protégés. Le plan d'urgence devrait être mis à jour tous les deux ans sur la base des résultats de l'évaluation des risques.

Le rapport précise qu’au niveau du seuil d'alerte rapide et du seuil d'alerte, le marché est censé rétablir la situation sans l'intervention de l'autorité compétente. Le seuil d'urgence est défini comme une rupture de l'approvisionnement ou demande exceptionnellement élevée, les mécanismes du marché ne pouvant plus à eux seuls assurer l'approvisionnement des clients protégés. L'autorité compétente est alors tenue d'intervenir dans le cadre du plan d'urgence. Les mécanismes du marché et des mécanismes étrangers à celui-ci pourraient intervenir en parallèle au cours de cette phase.

Lorsque la Commission est informée par l'autorité compétente qu'un seuil d'alerte rapide a été déclaré dans un État membre, ou lorsqu'une menace de rupture d'approvisionnement en gaz pour des raisons géopolitiques est signalée, l'Union, représentée au plus haut niveau, devrait engager les actions diplomatiques appropriées, compte tenu du rôle spécial que confère le traité de Lisbonne au vice-président de la Commission et haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.

Mesures d'urgence de la Communauté : selon les députés, l’urgence de l’Union devrait être déclarée lorsque l'Union perd plus de 20% (10% dans la proposition) de ses importations de gaz quotidiennes en provenance de pays tiers selon les chiffres d'ENTSO-G. La Commission pourra également déclarer une urgence de l'Union pour des régions géographiques spécifiquement touchées et englobant plusieurs États membres où l'autorité compétente de la région concernée a décrété l'urgence, ou lorsque la région géographique touchée perd plus de 10% de ses importations de gaz quotidiennes en provenance de pays tiers selon les chiffres d'ENTSO-G.

Le Groupe de coordination pour le gaz devrait être régulièrement informé des travaux du groupe de gestion de la crise.

Échange d'informations : la Commission devrait analyser les évaluations rendues par les autorités compétentes et communiquer ses conclusions aux États membres, au Parlement européen et au Groupe de coordination pour le gaz sous une forme agrégée.

Suivi de la sécurité de l'approvisionnement en gaz et présentation de rapports : les députés ont supprimé l’obligation de faire rapport sur les progrès réalisés en matière d'investissements nécessaires pour respecter la norme N-1, les difficultés spécifiques rencontrées par chaque pays lors de la mise en œuvre de nouvelles solutions de remplacement. Ils demandent que les autorités compétentes et la Commission garantissent à tout moment la confidentialité des informations commercialement sensibles qui leur sont soumises en application du règlement.

La Commission devrait établir un système permanent de suivi et de présentation de rapports en matière de sécurité et de l'approvisionnement en gaz, qui comprenne les mesures suivantes: a) rapports annuels sur le respect des règles régissant le marché intérieur de l'énergie ; b) évaluation de l'impact sur le marché intérieur des entreprises verticalement intégrées du secteur de l'énergie qui sont originaires de pays tiers et mise en œuvre du principe de réciprocité; c) application des mesures qui s'imposent pour prévenir les investissements non contrôlés effectués par des compagnies publiques étrangères dans le secteur énergétique de l'Union, ; d) surveillance des contrats de gaz naturel conclus entre les États membres et des pays tiers du point de vue de leur conformité avec les règles du marché intérieur de l'Union européenne.

Suivi par la Commission européenne : la Commission devrait réaliser en permanence un suivi et une présentation de rapports en ce qui concerne les mesures liées à la sécurité de l'approvisionnement en gaz, notamment un suivi des contrats d'approvisionnement en gaz conclus entre les États membres et des pays tiers, de manière à garantir leur conformité avec les règles du marché intérieur de l'Union, la sécurité de l'approvisionnement et le droit de la concurrence.

Afin de permettre aux États membres qui ne disposent de l'infrastructure nécessaire d'atteindre la norme N-1, la Commission devrait surveiller les réalisations en matière d'interconnexion du marché et, après avoir consulté le Groupe de coordination pour le gaz, proposer les instruments possibles permettant d'améliorer le marché.

Les institutions de l'Union européenne devraient accord et une priorité particulière au projet de gazoduc Nabucco, tant en ce qui concerne son profil politique que son financement.