Création d'un Bureau européen d'appui en matière d'asile

2009/0027(COD)

OBJECTIF : créer un Bureau européen d'appui en matière d'asile.

ACTE LÉGISLATIF : Règlement (UE) n° 439/2010 du Parlement européen et du Conseil portant création d'un Bureau européen d'appui en matière d'asile.

CONTENU : le présent règlement vise à instituer un Bureau européen d'appui en matière d'asile (ou Bureau d'appui), afin de contribuer à améliorer la mise en œuvre du régime d'asile européen commun (RAEC), de renforcer la coopération pratique en matière d'asile entre les États membres et d'apporter un appui opérationnel aux États membres dont les régimes d'asile et d'accueil sont soumis à des pressions particulières.

Afin de remplir son mandat, le Bureau d'appui sera indépendant et jouira d'une autonomie juridique, administrative et financière aussi large que possible. Le Bureau sera ainsi un organisme de l'Union doté de la personnalité juridique. Il exercera ses compétences avec rigueur et qualité sur le plan scientifique et technique et assurera la mise en œuvre de ses tâches de manière transparente et diligente.

Il devra agir en étroite coopération avec les autorités des États membres compétentes en matière d'asile, avec la Commission mais aussi avec plusieurs organisations compétentes en matière d’asile dont principalement le HCR (Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés).

Á noter que le Bureau d'appui ne disposera d'aucune compétence en ce qui concerne la prise de décisions par les autorités des États membres compétentes en matière d'asile concernant les demandes individuelles de protection internationale.

Tâches et missions du Bureau d'appui : le Bureau d’asile constituera un centre européen d'expertise en matière d'asile qui aura 3 missions principales :

1) Appui à la coopération pratique en matière d’asile : le Bureau  sera chargé de faciliter les échanges d’information ainsi que l’identification et la convergence des bonnes pratiques en matière d’asile en général. Plus spécifiquement, le Bureau d’appui sera responsable des activités en rapport avec la collecte d’informations relatives aux pays d’origine des demandeurs d’asile, notamment l’élaboration d’un portail, ainsi que l’analyse et l’élaboration de rapports sur les pays d’origine. L’analyse sur les pays d’origine ne visera pas à donner des instructions aux États membres concernant l'octroi ou le refus de demandes de protection internationale. Il s’agira simplement d’un avis présenté sous un format commun et utilisant une méthodologie commune d’analyse.

Il est également prévu que le Bureau assure des tâches d’appui :

  • à la répartition au sein de l'Union des bénéficiaires d'une protection internationale : pour les États membres dont les régimes d'asile et d'accueil sont soumis à des pressions particulières, le Bureau facilitera et coordonnera les échanges d'informations liés à la répartition des personnes à accueillir au sein de l'Union. Cette répartition s’effectuera sur la base d'un accord entre les États membres et avec le consentement du bénéficiaire de la protection internationale concerné et, le cas échéant, en concertation avec le HCR ;
  • à la formation pour les membres de l'ensemble des administrations et juridictions nationales, ainsi que pour les services nationaux compétents en matière d'asile des États membres. Ces formations pourront être générales, spécifiques ou thématiques ;
  • aux aspects extérieurs du RAEC : le Bureau d'appui coordonnera les échanges d'informations sur la mise en œuvre des instruments et mécanismes relatifs à la dimension extérieure du RAEC, notamment les questions liées à la réinstallation ou d’autres aspects techniques visant à aider les pays tiers à mettre en œuvre des programmes de protection régionale.

2) Appui aux États membres soumis à des pressions particulières : le Bureau d'appui sera chargé de coordonner et de soutenir les actions communes visant à aider les régimes d'asile et d'accueil des États membres soumis à des pressions particulières qui sollicitent de manière exceptionnellement forte et urgente leurs installations dans un État membre d’accueil. Ces pressions peuvent se caractériser par l'arrivée soudaine d'un grand nombre de ressortissants de pays tiers en raison de la situation géographique ou démographique de l'État membre concerné. Le Bureau sera notamment chargé de favoriser le développement d'une solidarité au sein de l'Union pour promouvoir une meilleure répartition, entre États membres, des bénéficiaires d'une protection internationale, tout en veillant à ce que les régimes d'asile et d'accueil ne fassent pas l'objet d'abus.

Dans ce contexte, le Bureau assurera la collecte et l’analyse des informations nécessaires pour identifier, préparer et concevoir les mesures d'urgence à prendre pour faire face à ces pressions. Il pourra recourir aux systèmes et mécanismes d'alerte précoce qui existent déjà et, si nécessaire, mettre lui-même en place un système d'alerte précoce pour ses propres besoins.

À la demande des États membres concernés par un afflux massif de personnes, le Bureau pourra ensuite coordonner les actions d'appui aux États membres concernés afin notamment:

  • de faciliter une première analyse des demandes d'asile examinées par les États membres;
  • assurer la mise à disposition d'installations d'accueil pour les personnes concernées (logements d'urgence, moyens de transport et assistance médicale) ;
  • mettre en place les équipes d'appui «asile», dont les modalités sont décrites ci-après.

3) Contribution à la mise en œuvre du RAEC : pour contribuer à la mise en œuvre du RAEC, le Bureau d'appui pourra créer des bases de données factuelles, juridiques et jurisprudentielles concernant les instruments nationaux, de l'Union et internationaux en matière d'asile en recourant aux dispositifs existants. Aucune donnée à caractère personnel ne pourra être stockée dans ces bases de données, à moins qu'elle n'ait été obtenue par le Bureau d'appui à partir de documents accessibles au public.

Le Bureau devra également rédiger chaque année un rapport sur la situation de l'asile dans l'Union, évaluant les résultats des activités du Bureau et analysant la qualité, la cohérence et l'efficacité du RAEC. Il pourra également adopter des documents techniques sur la mise en œuvre des instruments de l'Union en matière d'asile (sans jamais donner d’instructions aux États membres sur l'octroi ou le rejet de demandes de protection internationale).

Équipe d’appui « asile » : à la demande d’un ou plusieurs États membres soumis à des pressions particulières, le Bureau d'appui pourra déployer une équipe d'appui «asile». Le ou les État(s) membre(s) demandeurs devront fournir une description de la situation, les objectifs de la demande de déploiement et les besoins estimés nécessaires. En réponse à une demande, le Bureau pourra à la fois coordonner l'assistance opérationnelle et technique nécessaire et se charger du déploiement sur le territoire du ou des États membres concernés d'une équipe d'appui «asile» selon les modalités de déploiement décrites ci-après.

Pour assurer le déploiement potentiel d’une équipe d’appui, le Bureau d’appui devra constituer une réserve d'intervention «asile» composée d’experts nationaux mis à disposition par les États membres, et dont le profil sera strictement défini.

En ce qui concerne le déploiement, il reviendra aux États membres de mettre les experts à disposition à la demande du Bureau d’appui, sauf si ces États membres sont justement confrontés à une situation exceptionnelle. Une procédure spécifique est prévue pour la mobilisation des équipes d’appui en tant que de besoin. En cas de décision favorable au déploiement d’une ou plusieurs équipes d'appui «asile», un plan opérationnel est immédiatement établi par le Bureau d'appui et l'État membre demandeur. Le règlement détaille les éléments du plan opérationnel qui contient entre autre le modus operandi et les objectifs du déploiement.

Le règlement fixe en outre les dispositions relatives à :

  • la responsabilité civile et pénale des membres de l’équipe : globalement, il reviendra à l’État membre d’accueil d’assumer la responsabilité de tout dommage causé par les membres de l’équipe au cours d’une opération, sauf si le dommage résulte d'une négligence grave ou d'une faute intentionnelle. Pour ce qui est de la responsabilité pénale, les membres de l'équipe seront traités de la même manière que les agents de l'État membre d'accueil en ce qui concerne les infractions pénales dont ils pourraient être victimes ou responsables ;
  • la détermination des points de contact : chaque État membre devra désigner un point de contact national chargé de la communication avec le Bureau d'appui concernant toutes les questions relatives aux équipes d'appui «asile». Parallèlement, le directeur exécutif devra désigner un ou plusieurs experts du Bureau pour servir de point de contact de l'Union pour la coordination des déploiements ;
  • la prise en charge des coûts de déploiement d’une équipe : le Bureau d'appui prendra en charge une bonne part des frais relatifs au déploiement des équipes d’appui « asile » : frais de déplacement, de vaccinations, d’assurance, de soins de santé, honoraires des experts, etc.

Organisation du Bureau d'appui : le règlement prévoit des dispositions d’ordre organisationnel du Bureau d’appui. Celui-ci prendra la forme d’une agence communautaire de régulation comprenant une structure administrative et de gestion constituée :

  • d’un conseil d'administration,
  • d’un directeur exécutif,
  • du personnel du Bureau d'appui soumis au statut des fonctionnaires des Communautés et du régime applicable aux autres agents des Communautés,
  • d’un comité exécutif, si celui-ci est constitué conformément au règlement (il s’agit d’une instance de conseil du directeur exécutif, dont la Commission est membre de droit).

Á noter que le conseil d’administration inclura un représentant du HCR (sans droit de vote).

Le mandat des membres du conseil d'administration sera de 3 ans, renouvelable alors que le directeur exécutif sera nommé pour 5 ans. Ce dernier sera nommé sur la base de ses mérites personnels, de son expérience dans le domaine de l'asile et de ses aptitudes en matière administrative et de gestion. Avant d'être nommé, le candidat retenu par le conseil d'administration sera invité à faire une déclaration devant le Parlement européen qui pourra donner son avis. Le directeur exécutif est le représentant légal du Bureau d'appui. Il est chargé de la gestion administrative du Bureau d'appui et de l'exécution de ses tâches. Il sera notamment chargé de présenter un rapport annuel au Parlement européen.

Forum consultatif : le Bureau d'appui devra entretenir un dialogue étroit avec des organisations concernées représentant la société civile et des organismes compétents actifs dans le domaine de la politique en matière d'asile au niveau local, régional, national, européen ou international et créera à cet effet un forum consultatif. Ce dernier constituera un lieu d'échange d'informations et de mise en commun des connaissances et de dialogue entre le Bureau d'appui et les parties intéressées. Le HCR sera un membre de droit du forum.

Budget : les recettes du Bureau d'appui comprennent:

  • une contribution de l'Union inscrite au budget général de l'Union européenne;
  • toute contribution volontaire des États membres;
  • les droits perçus pour les publications et toute prestation assurée par le Bureau d'appui;
  • une contribution des pays associés.

Conformément au fonctionnement de toute agence communautaire, celui-ci sera tenu de rendre des comptes et sera soumis à la procédure annuelle de décharge. Les dépenses du Bureau d'appui comprendront la rémunération du personnel, les dépenses administratives et d'infrastructure et les frais de fonctionnement. Le Bureau sera soumis à la législation applicable en matière de lutte contre la corruption et de lutte antifraude.

Évaluation et révision : au plus tard le 19 juin 2014, le Bureau d'appui commandera une évaluation externe et indépendante des résultats obtenus. Cette évaluation portera sur l'incidence de l'action du Bureau d'appui sur la coopération pratique en matière d'asile et sur le RAEC. Elle examinera, notamment, la nécessité de modifier le mandat, la structure de gestion et le budget du Bureau d'appui.

Coopérations : outre la coopération étroite avec le HRC, le Bureau d’appui devra coopérer avec l’Agence Frontex, l'Agence des droits fondamentaux et d'autres organismes de l'Union ainsi qu'avec les organisations internationales dans le cadre d'arrangements de travail conclus avec ces organismes. Il devra également coopérer avec le Danemark et avec des pays tiers et des pays associés comme l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse.

Accord de siège : un accord devra déterminer le siège du Bureau incluant des dispositions sur les règles applicables dans cet État au directeur exécutif, aux membres du conseil d'administration et au personnel. L'État du siège devra assurer les meilleures conditions possibles pour le bon fonctionnement du Bureau.

Entrée en vigueur et début des activités du Bureau d'appui : le règlement entre en vigueur le 18 juin 2010. Le Bureau d'appui devra être pleinement opérationnel au plus tard le 19 juin 2011. La Commission sera chargée de la mise en place et du démarrage du Bureau d'appui jusqu'à que celui-ci dispose de la capacité opérationnelle pour exécuter son propre budget.