Sécurité de l'aviation civile: enquêtes et prévention des accidents et des incidents
Le Parlement européen a adopté par 604 voix pour, 11 voix contre et 26 abstentions, une résolution législative sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur les enquêtes et la prévention des accidents et des incidents dans l'aviation civile.
Le Parlement a arrêté sa position en première lecture suivant la procédure législative ordinaire (l’ex-procédure de codécision). Les amendements adoptés en plénière sont le résultat d’un compromis négocié entre le Parlement européen et le Conseil. Ils modifient la proposition de la Commission comme suit :
Objet du règlement: les objectifs du règlement, y compris celui de diligence des enquêtes, doivent être atteints notamment par la mise en place d'un réseau des autorités responsables des enquêtes de sécurité dans l'aviation civile.
Le règlement prévoit également des règles concernant la disponibilité en temps utile des informations relatives à toutes les personnes et aux marchandises dangereuses à bord d'un aéronef impliqué dans un accident. Il vise aussi à améliorer l'aide aux victimes d'accidents aériens et à leurs proches (c’est-à-dire les plus proches membres de la famille, les proches parents ou toute personne ayant une relation étroite avec la personne victime d'un accident, selon les définitions du droit national).
Champ d'application : le règlement s'applique aux enquêtes de sécurité sur les accidents et les incidents graves qui se sont produits sur les territoires des États membres auxquels les traités s'appliquent. Il ne s'applique pas aux enquêtes de sécurité relatives à des accidents et des incidents graves impliquant des aéronefs affectés à des opérations militaires, douanières ou policières ou à des opérations analogues, sauf si l'État membre concerné en décide ainsi, conformément au règlement ou à la législation nationale.
Autorité responsable des enquêtes de sécurité : le texte amendé précise que l’autorité doit être en mesure de conduire l'intégralité d'une enquête de sécurité en toute indépendance, soit de manière autonome, soit par le biais de conventions avec d'autres instances chargées d'enquêtes de sécurité. Afin d'informer le public du niveau général de sécurité aérienne, un rapport sur la sécurité sera publié chaque année au niveau national. Cette analyse ne doit pas divulguer les sources d'informations confidentielles.
Obligation d’ouvrir une enquête: tout accident ou incident grave d'aviation civile impliquant un aéronef autre que ceux visés à l'annexe II du règlement (CE) nº 216/2008 doit faire l'objet d'une enquête de sécurité dans l'État membre sur le territoire duquel l'accident ou l'incident grave s'est produit.
Lorsqu'un aéronef, autre que ceux visés à l'annexe II du règlement (CE) nº 216/2008, immatriculé dans un État membre, est impliqué dans un accident ou un incident grave dont le lieu ne peut être situé avec certitude sur le territoire d'aucun État, une enquête de sécurité doit être conduite par l'autorité responsable des enquêtes de sécurité de l'État membre d'immatriculation.
Les enquêtes doivent être indépendantes.
Coopération entre les autorités responsables des enquêtes de sécurité: lorsque, à la suite d'une demande, une autorité responsable des enquêtes de sécurité accepte de fournir une assistance, celle-ci doit être, dans la mesure du possible, fournie gratuitement.
Réseau européen: les autorités des États membres responsables des enquêtes de sécurité devront établir entre elles un «réseau européen des autorités responsables des enquêtes de sécurité dans l'aviation civile». Le président du réseau, en étroite consultation avec les membres du réseau, élaborera le programme de travail annuel du réseau.
Le réseau vise à améliorer la qualité des enquêtes menées par les autorités responsables des enquêtes de sécurité et à en renforcer l'indépendance. Il doit permettre une meilleure sécurité du transport aérien en établissant des standards élevés de méthodes d'enquêtes et de formation des enquêteurs.
Pour apporter une véritable valeur ajoutée par rapport à la situation actuelle, une série d’amendements définit les tâches et missions que devra remplir le réseau. Ainsi le réseau devra notamment : i) formuler des avis à l'attention des institutions de l'Union et les conseiller sur tous les aspects liés à l'élaboration et à la mise en œuvre des politiques relatives aux enquêtes et à la prévention des accidents; ii) encourager le partage des informations et promouvoir une coopération structurée entre les autorités responsables des enquêtes de sécurité, la Commission, l'AESA et les autorités nationales de l'aviation civile ; iii) coordonner les actions de formation et de qualification des enquêteurs ; iv) promouvoir les meilleures pratiques et développer une méthodologie européenne des enquêtes de sécurité; v) renforcer les capacités d'enquête des autorités responsables des enquêtes de sécurité.
La Commission informera régulièrement le Parlement européen et le Conseil des travaux du réseau. Le Parlement européen devra également être informé chaque fois que le Conseil ou la Commission soumet des demandes au réseau.
Les membres du réseau ne devront solliciter ni accepter d'instructions d'aucune entité qui pourraient compromettre l'indépendance des enquêtes de sécurité.
Participation de l'Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) et des autorités nationales de l'aviation civile : sous réserve de l'absence de tout conflit d'intérêts et dans les limites de leurs compétences respectives, l'AESA et les autorités nationales de l'aviation civile seront invitées par les autorités responsables des enquêtes de sécurité des États membres à être représentées et à participer aux enquêtes.
L'AESA et les autorités nationale sont définies dans le règlement comme «conseillers» au regard de leur participation aux enquêtes de sécurité.
Obligation de notifier les accidents et les incidents graves : le règlement prévoit que toute personne impliquée qui est informée qu'un accident ou un incident grave s'est produit doit le notifier sans délai à l'autorité responsable des enquêtes de sécurité de l'État sur le territoire duquel l'incident ou l'accident s'est produit. L'autorité responsable des enquêtes de sécurité doit informer sans délai la Commission, l'AESA, l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), les États membres et les pays tiers concernés, conformément aux normes et pratiques recommandées internationales, de tout accident ou incident grave dont elle a reçu notification.
Participation des États membres aux enquêtes de sécurité : lorsqu'un autre État membre ou pays tiers leur notifie qu'un accident ou un incident grave s'est produit, les États membres qui sont l'État d'immatriculation, l'État de l'exploitant, l'État de conception et l'État de construction doivent informer, dès que possible, l'État membre ou le pays tiers sur le territoire duquel l'accident ou l'incident grave s'est produit s'ils comptent désigner un représentant accrédité conformément aux normes et pratiques recommandées internationales.
Enquêteurs de sécurité: nonobstant les obligations de confidentialité, l'enquêteur désigné sera autorisé entre autres à : a) accéder immédiatement et librement au site de l'accident ainsi qu'à l'aéronef, à son contenu ou à son épave; b) demander une autopsie complète du corps des personnes mortellement blessées et à y contribuer; c) demander que des examens médicaux ou des prélèvements soient effectués sur les personnes impliquées dans l'exploitation de l'aéronef et à accéder immédiatement aux résultats de ces examens et prélèvements.
Toute personne participant à des enquêtes de sécurité doit remplir ses fonctions de manière indépendante et ne solliciter ni accepter d'instructions de quiconque en dehors de l'enquêteur désigné ou du représentant accrédité.
Coordination des enquêtes: lorsqu'une enquête judiciaire est également ouverte, l'enquêteur désigné doit en être informé. Dans ce cas, l'enquêteur désigné doit assurer la traçabilité et la conservation des enregistreurs de bord et de tout élément de preuve.
Les États membres devront veiller à ce que les autorités responsables des enquêtes de sécurité, d'une part, et les autres autorités susceptibles de participer aux activités liées à l'enquête de sécurité, telles que les autorités judiciaires, de l'aviation civile, de recherche et de sauvetage, d'autre part, coopèrent entre elles sur la base d'accords préalables. Les accords préalables doivent couvrir, entre autres, les points suivants: a) l'accès au site de l'accident; b) la conservation des preuves et l'accès à celles-ci; c) les comptes rendus initiaux et en cours sur l'état d'avancement de chaque opération; d) les échanges d'informations; e) le bon usage des informations en matière de sécurité; f) le règlement des conflits.
Les États membres doivent communiquer ces accords à la Commission qui les transmettra au président du réseau, au Parlement européen et au Conseil pour information.
Conservation des preuves : l'État membre sur le territoire duquel l'accident ou l'incident grave s'est produit est tenu de garantir le traitement sûr de tous les éléments de preuve et de prendre toutes les mesures raisonnables pour protéger ces éléments de preuve et conserver en lieu sûr l'aéronef, son contenu et son épave pendant la période nécessaire aux fins de l'enquête de sécurité.
Utilisation des enregistrements: le texte amendé stipule que les enregistrements audio et vidéo du poste de pilotage et leurs transcriptions ne doivent pas être mis à disposition ou utilisés à des fins autres que celles de l'enquête de sécurité, et que les informations n'ayant pas de rapport direct avec l'enquête de sécurité, et notamment celles relatives à la vie privée, doivent bénéficier d'une protection appropriée.
Les enregistrements provenant de l'enregistreur de paramètres de vol ne doivent pas être mis à disposition ou utilisés à d'autres fins que l'enquête de sécurité, la navigabilité ou l'entretien, sauf si ces enregistrements sont rendus anonymes et divulgués dans des conditions assorties de garanties.
La communication des enregistrements à un autre État membre à des fins autres que celles d'une enquête de sécurité peut être accordée dans la mesure où le droit national de l'État membre qui communique les enregistrements le permet.
Information des victimes et de leurs familles ou associations : l'autorité responsable des enquêtes de sécurité en charge sera autorisée à informer les victimes et leurs proches, ou leurs associations ou à rendre publique toute information sur les observations factuelles, la procédure de l'enquête de sécurité, éventuellement, les rapports ou conclusions et/ou recommandations préliminaires en matière de sécurité, pour autant que cela ne porte pas atteinte aux objectifs de l'enquête de sécurité et que la législation applicable relative à la protection des données à caractère personnel soit dûment respectée.
Comptes rendus d'événements: le texte amendé stipule que l'AESA, en collaboration avec les États membres, participe de façon régulière à l'échange et à l'analyse des renseignements visés par la directive 2003/42/CE et dispose d'un accès en ligne à toutes les informations stockées dans le répertoire central créé par le règlement (CE) nº 1321/2007.
Informations sur les personnes et les marchandises dangereuses à bord : les compagnies aériennes de l'Union européenne et celles exploitant des vols au départ ou à destination d'un aéroport situé sur le territoire d'un État membre auquel le traité s'applique doivent mettre en place des procédures permettant de produire : a) le plus rapidement possible, et au plus tard dans les deux heures qui suivent l'annonce d'un accident d'aéronef, une liste validée, basée sur les meilleures informations disponibles, de toutes les personnes à bord; et b) immédiatement après l'annonce d'un accident d'aéronef, la liste des marchandises dangereuses à bord.
Afin de permettre une information rapide des familles des passagers de la présence de leurs proches à bord de l'avion accidenté, les compagnies aériennes et les agences de voyage doivent proposer aux voyageurs d'indiquer le nom et les coordonnées d'une personne à joindre en cas d'accident. Ces informations ne pourront être utilisées que dans le cas d'un accident; elles ne seront pas communiquées à des tiers et ne pourront servir à des fins commerciales.
Le nom d'une personne à bord ne doit pas être rendu public avant que les proches de cette personne aient été informés par les autorités compétentes. Les listes visées au règlement sont confidentielles ; les noms des personnes figurant sur ces listes ne seront rendus publics qu'à la condition que les proches des personnes à bord ne s'y opposent pas.
Assistance aux victimes d’accidents aériens et à leurs familles : chaque État membre doit mettre en place à l'échelon national un plan d'urgence en cas d'accident de l'aviation civile. Ce plan d'urgence doit prévoir également l'aide aux victimes d'accidents de l'aviation civile et à leurs proches.
Les États membres doivent veiller à ce que toutes les compagnies aériennes enregistrées sur leur territoire disposent d'un plan d'aide aux victimes d'accidents de l'aviation civile et à leurs proches. Ces plans doivent prendre particulièrement en compte le soutien psychologique aux victimes d'accidents de l'aviation civile et à leurs proches et permettre à la compagnie de faire face à un accident de grande ampleur. Les États membres doivent encourager les compagnies aériennes de pays tiers qui exploitent des vols dans l'Union à disposer également d'un plan d'aide aux victimes des accidents de l'aviation civile et à leurs proches.
Quand un accident se produit, l'État membre qui est chargé de l'enquête, ou qui est l'État d'enregistrement de la compagnie aérienne dont l'aéronef est accidenté, ou qui comporte un nombre important de ressortissants à bord de l'aéronef accidenté, doit prévoir la désignation d'une personne de référence qui sera le point de contact et d'information des victimes et de leurs familles.
Modification du règlement: le règlement fera l'objet d'un examen au plus tard 4 ans après son entrée en vigueur. Si la Commission estime que le règlement doit être modifié, elle demandera au réseau de donner un avis préalable, qui sera également transmis au Parlement européen, au Conseil, aux États membres et à l'AESA.