Mesures visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement en gaz
Le Parlement européen a adopté par 601 voix pour, 27 voix contre et 23 abstentions, une résolution législative concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement en gaz et abrogeant la directive 2004/67/CE.
Le Parlement a arrêté sa position en première lecture suivant la procédure législative ordinaire (l’ex-procédure de codécision). Les amendements adoptés en plénière sont le résultat d’un compromis négocié entre le Parlement européen et le Conseil. Ils modifient la proposition de la Commission comme suit :
Objet du règlement: le texte amendé précise que le règlement énonce des dispositions visant à préserver la sécurité de l'approvisionnement en gaz en garantissant le fonctionnement correct et continu du marché intérieur du gaz naturel, en permettant la mise en œuvre de mesures exceptionnelles lorsque le marché ne peut plus fournir les approvisionnements en gaz nécessaires.
Le règlement prévoit également des mécanismes transparents, dans un esprit de solidarité, pour la coordination de la préparation et de la réaction à une situation d'urgence au niveau des États membres, au niveau régional et au niveau de l'Union.
Clients protégés : cette définition couvre tous les ménages qui sont connectés à un réseau de distribution de gaz et, en outre, lorsque l'État membre concerné le décide: a) les PME pour autant qu'elles soient connectées à un réseau de distribution de gaz, et les services sociaux essentiels, pour autant qu'ils soient connectés à un réseau de distribution ou de transport de gaz, et que l'ensemble de ces clients supplémentaires ne représente pas plus de 20% de la consommation finale de gaz; et/ou b) les installations de chauffage urbain, dans la mesure où elles fournissent du chauffage aux ménages et aux clients protégés, pour autant que ces installations ne soient pas en mesure de passer à d'autres combustibles et qu'elles soient connectées à un réseau de distribution ou de transport de gaz.
Responsabilité de la sécurité de l'approvisionnement en gaz : le texte précise que la sécurité de l'approvisionnement en gaz est une responsabilité partagée des entreprises de gaz naturel, des États membres, notamment au travers de leurs autorités compétentes et de la Commission, dans leurs domaines d'activité et de compétence respectifs. Cette responsabilité partagée exige un niveau élevé de coopération entre ces acteurs. Dans les meilleurs délais, et au plus tard 12 mois après l'entrée en vigueur du règlement, chaque État membre devra désigner une autorité compétente qui assure la mise en œuvre des mesures prévues par le règlement.
Plan d'action préventive et plan d'urgence : avant d'adopter un plan d'action préventive et un plan d'urgence au niveau national, les autorités compétentes devront échanger leurs projets de plans et se consulter au niveau régional approprié. Elles devront consulter la Commission, pour s'assurer que leurs projets ne sont pas incompatibles avec le plan d'action préventive et le plan d'urgence d'un autre État membre et qu'ils sont conformes au règlement. Cette consultation aura lieu, en particulier, entre États membres voisins, notamment entre les systèmes isolés constituant des îlots gaziers et les États membres limitrophes.
Les autorités compétentes concernées pourront décider d'établir des plans d'action conjoints au niveau régional, en plus des plans établis au niveau national. Dans le cas de plans conjoints, les autorités compétentes concernées devront s'efforcer, le cas échéant, de conclure des accords pour mettre en œuvre la coopération régionale.
Lors de l'établissement et de la mise en œuvre des plans d'action préventive et du plan d'urgence, l'autorité compétente devra tenir compte de la sûreté d'exploitation du réseau de gaz à tout moment et exposer dans ces plans les contraintes techniques affectant l'exploitation du réseau, y compris les raisons techniques et de sûreté qui peuvent amener à la réduction des flux en cas d'urgence.
Les plans d'action préventive et les plans d'urgence devront être adoptés et rendus publics au plus tard deux ans après l'entrée en vigueur du règlement ; ils devront être notifiés à la Commission. Les autorités compétentes devront veiller au contrôle régulier de la mise en œuvre desdits plans.
Contenu du plan d'action préventive : les plans d'action préventive nationaux et conjoints devront contenir : a) les résultats de l'évaluation des risques; b) les mesures, les volumes, les capacités et les délais nécessaires pour satisfaire aux normes en matière d'infrastructures et d'approvisionnement, y compris, le cas échéant, l'ampleur des mesures axées sur la demande qui peuvent compenser une rupture d'approvisionnement ; c) les obligations imposées aux entreprises de gaz naturel, y compris pour la sûreté de l'exploitation du réseau gazier; d) les autres mesures préventives, par exemple celles liées à la nécessité de renforcer les interconnexions entre États membres voisins et à la possibilité de diversifier les voies et les sources d'approvisionnement en gaz ; e) les mécanismes à utiliser pour la coopération avec d'autres États membres afin de préparer et de mettre en œuvre des plans d'action conjoints, f) les informations sur les interconnexions existantes et futures, y compris celles donnant accès au réseau gazier de l'Union, sur les flux transfrontaliers, sur l'accès transfrontalier aux installations de stockage et sur la capacité physique de transport du gaz dans les deux sens (capacité bidirectionnelle), en particulier en cas d'urgence; g) les informations relatives à toutes les obligations de service public en rapport avec la sécurité de l'approvisionnement en gaz.
Les plans d'action préventive doivent reposer essentiellement sur des mesures liées au marché et prendre en compte l'impact économique, l'efficacité des mesures, les effets sur le fonctionnement du marché intérieur de l'énergie et l'impact sur l'environnement et sur les consommateurs et ne doivent pas imposer une charge excessive aux entreprises de gaz naturel ni porter préjudice au fonctionnement du marché intérieur du gaz.
Normes relatives aux infrastructures : le texte amendé prévoit qu’au plus tard 4 ans après l'entrée en vigueur du règlement, l'autorité compétente devra veiller à ce que, dans le cas d'une défaillance de l'infrastructure principale, les infrastructures restantes (N-1) soient en mesure de livrer le volume nécessaire de gaz pour satisfaire la demande totale de gaz de la zone couverte pendant une journée de demande en gaz exceptionnellement élevée se produisant avec une probabilité statistique d'une fois en 20 ans.
Au plus tard 3 ans après l'entrée en vigueur, les gestionnaires de réseau de transport de gaz devront adapter le fonctionnement des réseaux de transport en partie ou dans leur ensemble afin de permettre des flux de gaz physiques dans les deux directions sur les interconnexions transfrontalières.
Le Luxembourg, la Slovénie et la Suède, par dérogation, ne sont pas liés devront mais s'efforcer de se conformer à l'obligation en matière d'infrastructures standard, tout en assurant l'approvisionnement en gaz des clients protégés.
Procédure de détermination de la capacité bidirectionnelle ou de demande de dérogation : pour chaque interconnexion transfrontalière entre des États membres, les gestionnaires de réseau de transport devront communiquer, au plus tard 15 mois après l'entrée en vigueur du règlement à leurs États membres, après consultation de tous les autres gestionnaires de réseau de transport concernés: a) une proposition de capacité bidirectionnelle concernant la direction inversée (capacité de flux inversé); ou b) une demande de dérogation à l'obligation de mettre en place une capacité bidirectionnelle.
La proposition de capacité de flux inversé ou la demande de dérogation doivent s'appuyer sur une évaluation de la demande du marché, sur des projections de la demande et de l'offre, de la faisabilité technique, des coûts de la capacité de flux inversé, y compris le renforcement consécutif du réseau de transport, et des avantages en termes de sécurité de l'approvisionnement.
Lorsqu'elle reçoit la proposition ou la demande de dérogation, l’autorité concernée doit la notifier aux autorités concernées des autres États membres qui pourraient, selon l'évaluation des risques, bénéficier de la capacité de flux inversé, ainsi qu'à la Commission. L'autorité concernée doit donner auxdites autorités concernées et à la Commission la possibilité d'émettre un avis dans un délai de quatre mois à compter de la réception de cette notification.
Normes d'approvisionnement : l'autorité compétente devra exiger que les entreprises de gaz naturel qu'elle identifie prennent les mesures visant à garantir l'approvisionnement en gaz des clients protégés de l'État membre dans les cas suivants: a) températures extrêmes pendant une période de pointe de 7 jours telles qu'il s'en produit statistiquement tous les 20 ans; et b) une période d’au moins 30 jours de demande en gaz exceptionnellement élevée se produisant avec une probabilité statistique d'une fois en 20 ans; et c) pour une période d'au moins 30 jours en cas de défaillance de la plus grande infrastructure gazière dans des conditions hivernales moyennes.
Plans d'urgence et niveaux de crise : les plans d'urgence nationaux et conjoints doivent, entre autres : a) définir le rôle et les responsabilités des entreprises de gaz naturel et des clients industriels consommant du gaz, y compris des producteurs d'électricité concerné ; b) préciser le rôle et les responsabilités des autorités compétentes et des autres instances auxquelles des tâches ont été déléguées à chacun des niveaux de crise ; c) veiller à ce que les entreprises de gaz naturel et les clients industriels consommant du gaz aient une latitude suffisante pour réagir à chaque niveau de crise; d) définir, si c'est approprié, les mesures et actions à prendre pour atténuer l'impact potentiel d'une rupture de l'approvisionnement en gaz sur le chauffage urbain et sur l'approvisionnement en électricité produite à partir du gaz; e) établir des procédures et mesures détaillées à suivre pour chaque niveau de crise.
Les trois principaux niveaux de crise sont les suivants:
- niveau d'alerte précoce (alerte précoce): lorsqu'il existe des informations concrètes, sérieuses et fiables, selon lesquelles un événement peut se produire, qui est de nature à nuire considérablement à l'état de l'approvisionnement et susceptible d'entraîner le déclenchement du niveau d'alerte ou d'urgence; le niveau d'alerte précoce peut être activé au moyen d'un mécanisme d'alerte précoce ;
- niveau d'alerte (alerte): lorsqu'il y a rupture d'approvisionnement ou que la demande en gaz est exceptionnellement élevée, ce qui nuit considérablement à l'état de l'approvisionnement, mais que le marché est encore en mesure de faire face à cette rupture ou cette demande sans qu'il soit nécessaire de recourir à des mesures non fondées sur le marché ;
- niveau d'urgence (urgence): en cas de demande en gaz exceptionnellement élevée ou d'interruption significative de l'approvisionnement ou d'autre détérioration importante de l'état de l'approvisionnement et au cas où toutes les mesures pertinentes fondées sur le marché ont été mises en œuvre sans que l'approvisionnement en gaz soit suffisant pour satisfaire la demande en gaz restante, de sorte que des mesures supplémentaires, non fondées sur le marché, doivent être mises en place en vue, en particulier, de préserver les approvisionnements en gaz au profit des clients protégé.
Lorsque des informations fiables indiquent qu'une situation en dehors de l'Union menace la sécurité d'approvisionnement de l'un ou de plusieurs des États membres et peut déclencher un mécanisme d'alerte précoce entre l'Union et un pays tiers, la Commission devrait informer le groupe de coordination pour le gaz sans tarder et l'Union devrait prendre des mesures appropriées pour tenter de désamorcer la situation.
Les États membres devront veiller à ce que: a) aucune mesure ne soit prise, à aucun moment, qui restreigne indûment le flux de gaz au sein du marché intérieur; b) aucune mesure ne soit prise qui risque de compromettre gravement l'état de l'approvisionnement en gaz dans un autre État membre; et c) l'accès transfrontalier aux infrastructures, conformément au règlement (CE) n° 715/2009, soit maintenu autant que possible au regard des contraintes techniques et de sûreté, conformément au plan d'urgence.
Les plans d'urgence nationaux et conjoints devront être mis à jour tous les deux ans, à moins que les circonstances ne justifient des mises à jour plus fréquentes.
Mesures d'urgence au niveau de l'Union et au niveau régional : à la demande d'une autorité compétente qui a décrété une situation d'urgence, la Commission pourra déclarer une situation d'urgence au niveau de l'Union ou une situation d'urgence au niveau régional pour une région géographique spécifiquement touchée. À la demande d'au moins deux autorités compétentes qui ont décrété une situation d'urgence, la Commission pourra déclarer, selon le cas, une situation d'urgence au niveau de l'Union ou au niveau régional. Dans tous les cas, la Commission devra motiver sa décision et en informer le Conseil.
En cas de situation d'urgence au niveau de l'Union ou au niveau régional, la Commission devra coordonner les actions des autorités compétentes en tenant pleinement compte des informations pertinentes découlant de la consultation du groupe de coordination pour le gaz et des résultats de cette consultation.
Suivi exercé par la Commission : la Commission devra suivre en permanence les mesures de sécurité de l'approvisionnement en gaz, et présenter des rapports en la matière. Au plus tard 4 après l’entrée en vigueur du règlement, la Commission, après consultation du groupe de coordination pour le gaz, devra:
- tirer des conclusions quant aux éventuels moyens de renforcer la sécurité de l'approvisionnement à l'échelon de l'Union, évaluer la possibilité de procéder à des évaluations des risques et d'établir des plans d'action préventive ainsi que des plans d'urgence au niveau de l'Union et présenter un rapport sur la mise en œuvre du règlement, comprenant, en autres, les progrès réalisés en matière d'interconnectivité des marchés; et
- présenter un rapport sur la cohérence globale des plans d'action préventive et des plans d'urgence des États membres ainsi que sur leur contribution à la solidarité et au niveau de préparation du point de vue de l'Union.
Dérogation : le règlement n'est pas applicable à Malte et à Chypre tant qu'aucun approvisionnement en gaz n'a lieu sur leurs territoires respectifs.