Agences de notation de crédit: surveillance
AVIS DE LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1060/2009 sur les agences de notation de crédit.
La BCE est largement favorable aux mesures introduites par le règlement proposé en vue de renforcer le cadre réglementaire applicable aux agences de notation de crédit, en particulier en vue : a) d’attribuer des pouvoirs étendus à l’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) en ce qui concerne l’enregistrement et la surveillance des agences de notation de crédit ; et b) d’introduire une transparence et une concurrence accrues sur le marché des instruments financiers structurés.
La BCE estime que l’approche consistant à confier la surveillance des agences de notation de crédit à une entité unique est préférable à une dispersion de la surveillance. Dans ce cadre, la BCE est favorable à l’attribution à l’AEMF d’un certain nombre de tâches liées à l’enregistrement et à la surveillance des agences de notation de crédit.
Tout en soutenant largement le dispositif de transparence figurant aux nouveaux articles 8bis et 8ter proposés du règlement, la BCE souhaite néanmoins attirer l’attention sur certaines préoccupations que peut susciter la mise en œuvre des nouvelles obligations de divulgation d’informations :
1°) en vertu du dispositif proposé, il faut s’attendre à ce que l’agence de notation de crédit désignée pour émettre une notation de crédit dans un cas donné soit soumise à une concurrence accrue de la part d’autres agences de notation de crédit éligibles (qui n’ont pas été désignées) ;
2°) la possibilité d’obtenir des notations de crédit multiples pourrait permettre aux émetteurs de choisir la notation la plus favorable («rating shopping»), ce qui est susceptible d’engendrer une concurrence entre les agences de notation de crédit pour fournir la notation la plus intéressante. Cela pourrait avoir des répercussions négatives sur la qualité des notations émises ;
3°) il faut aussi examiner la situation de l’émetteur, en tenant compte d’éléments comme : a) la charge qu’implique le fait de permettre aux agences de notation de crédit non désignées d’avoir accès aux informations ; et b) la protection contre tout abus éventuel des informations reçues par l’agence de notation de crédit non désignée.
La BCE comprend que le dispositif de transparence a reçu un large soutien dans le cadre des travaux préparatoires du règlement proposé. Les modifications suggérées par la BCE sont par conséquent limitées.
Transparence accrue du processus de notation.
Le règlement proposé requiert que chaque agence de notation de crédit désignée mette à la disposition de ses concurrents une liste des instruments financiers structurés pour lesquels elle émet actuellement une notation, accompagnée d’un lien vers le site web où l’émetteur stocke les informations utilisées dans le cadre de la préparation des notations de crédit. Les agences de notation de crédit non désignées peuvent avoir accès à ces informations, à condition que certains critères soient respectés.
La BCE recommande de définir avec plus de clarté dans le règlement proposé les méthodes mises en œuvre par l’AEMF pour vérifier le respect de ces critères.
En outre, la BCE fait les recommandations suivantes :
1°) les agences de notation de crédit devraient avoir l’obligation de déclarer à l’AEMF, tous les six mois, des données relatives au nombre de notations de crédit qu’elles ont émises pendant une période donnée, ventilées afin de faire apparaître :
a) les notations de crédit demandées par une entité notée ou par un tiers lié;
b) les notations de crédit non sollicitées, en indiquant la proportion de ces notations non sollicitées qui étaient supérieures, égales ou inférieures aux notations de crédit correspondantes émises par l’agence de notation de crédit désignée pertinente.
2°) l’AEMF devrait être chargée de suivre la mise en œuvre des nouveaux articles 8 bis et 8 ter proposés afin de déterminer:
a) quelles sont les répercussions de ces dispositions sur la quantité et la qualité des notifications de crédit émises, y compris les notations de crédit non sollicitées;
b) la nécessité éventuelle de modifier les critères d’éligibilité applicables aux agences de notation de crédit non désignées pour éviter la création d’obstacles excessifs à l’entrée sur le marché;
c) la charge imposée aux émetteurs;
d) la nécessité éventuelle de protéger les émetteurs contre l’abus des informations qu’ils transmettent à des agences de notation de crédit non désignées.
Parallèlement, la BCE recommande que les évolutions dans les domaines mentionnés ci-dessus soient étroitement suivies par l’AEMF dans le cadre de la mise en œuvre du règlement proposé, de sorte que les adaptations appropriées puissent être présentées par la Commission au regard de l’expérience acquise.
Transmission d'informations à l'AEMF et à l'Eurosystème.
La BCE relève que les agences de notation de crédit auront l’obligation de communiquer à un registre central, établi par l’AEMF, les données relatives à leur performance passée. La BCE recommande d’utiliser pour ces données un format comparable et compatible avec le cadre statistique de l’Union.
En outre, le nouveau cadre réglementant les agences de notation de crédit devrait permettre un niveau de coopération adéquat entre les autorités de surveillance et l’Eurosystème. La BCE apprécie le dispositif régissant l’échange d’informations figurant au règlement proposé. Elle recommande néanmoins que cette disposition garantisse de manière explicite que le SEBC et la BCE, ainsi que les autorités désignées des États membres, ont accès aux informations pertinentes pour l’exercice de leurs missions légales.