Normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale. Refonte
CONTEXTE : le 7 mai 2009, le Parlement européen a adopté sa position sur la proposition de la Commission, approuvant la grande majorité des modifications apportées à la directive 2003/9/CE du Conseil relative à des normes minimales pour l’accueil des demandeurs d’asile dans les États membres. La proposition a été examinée au Conseil, principalement au cours des présidences tchèque et suédoise, mais les négociations ont été difficiles et aucune position n'a été dégagée sur le texte du Conseil.
En présentant une proposition modifiée, la Commission entend exercer son droit d'initiative pour relancer les travaux en vue de la mise au point d'un véritable régime d’asile européen commun (RAEC). La présente proposition modifiée vise à faire la synthèse des connaissances et de l'expérience acquises au cours des consultations et des négociations avec d'autres acteurs concernés tels que le HCR et les ONG, afin d'aboutir à un régime d'accueil simplifié et plus cohérent, respectueux des droits fondamentaux.
Elle doit être considérée en liaison avec la proposition modifiée de directive relative aux procédures d'asile. Cette proposition vise, notamment, à améliorer l'efficacité et la qualité des régimes nationaux d'asile et, partant, à réduire les coûts de l'accueil dans les États membres en permettant une prise de décision plus rapide.
CONTENU : la présente proposition modifiée a pour principal objectif de préciser davantage et d'assouplir les normes d'accueil proposées, afin qu'elles puissent être plus facilement intégrées dans les systèmes juridiques nationaux. Elle conserve parallèlement les éléments clés de la proposition de 2008, consistant à assurer des conditions d'accueil adéquates et comparables dans l'ensemble de l'UE. Elle continue également de garantir le plein respect des droits fondamentaux conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne et de la Cour européenne des droits de l'homme. Cela vaut en particulier pour le droit à la libre circulation et au respect de la dignité.
Enfin, la proposition renforce la cohérence avec le paquet législatif RAEC, notamment avec la proposition modifiée de directive relative aux procédures d'asile. Elle reprend également, le cas échéant, les modifications résultant des négociations sur la directive «qualification» et sur le règlement de Dublin, afin d'assurer une cohérence en ce qui concerne les questions horizontales.
La proposition modifiée porte principalement sur les questions suivantes:
Simplification de la mise en œuvre pour les États membres : par rapport à la proposition de 2008, la proposition modifiée accorde aux États membres une marge de manœuvre accrue pour la mise en œuvre de certaines des mesures proposées, tenant ainsi compte des préoccupations quant aux implications financières, contraintes administratives et coûts potentiellement élevés. Cette amélioration passe par des notions juridiques mieux définies, des normes et des dispositifs d'accueil simplifiés, et des règles plus souples pouvant être plus aisément intégrées dans les pratiques nationales. Ces modifications concernent en particulier :
- les garanties offertes aux demandeurs d'asile placés en rétention,
- les conditions d'accueil dans les centres de rétention,
- les délais d'accès au marché du travail,
- le niveau de soins de santé fournis aux personnes ayant des besoins particuliers en matière d'accueil et les mécanismes de détermination de ces besoins,
- l'accès à une aide matérielle et l'obligation de rendre compte visant à assurer un meilleur suivi des dispositions clés de la directive.
La proposition modifiée garantit également mieux la mise à disposition des instruments nécessaires aux État membres pour traiter les cas dans lesquels les règles en matière d'accueil sont contournées et/ou transformées en facteurs d'attraction. Elle autorise notamment un plus grand nombre de cas de retrait d'aide matérielle, sous réserve de l'application des garanties nécessaires et du respect de la situation des personnes particulièrement vulnérables.
Règles claires et strictes en matière de rétention : il est nécessaire d'établir des règles européennes strictes et exhaustives afin d'exclure toute mesure de rétention arbitraire et de garantir le respect des droits fondamentaux dans tous les cas. La Commission est préoccupée par la généralisation des mesures de rétention à l'égard des demandeurs d'asile, alors que l'acquis de l'UE en matière d'asile est silencieux sur ce point. La proposition modifiée reprend dès lors l'approche générale de la proposition de 2008 sur la question de la rétention. En particulier, un placement en rétention ne peut être ordonné que pour les motifs prévus et uniquement s'il est conforme aux principes de nécessité et de proportionnalité, après examen au cas par cas. Les garanties nécessaires, telles que l'accès à un recours effectif et, au besoin, à l'assistance juridique gratuite, doivent être offertes. Les conditions d'accueil dans les centres de rétention doivent être également respectueuses de la dignité humaine. Les modifications proposées sont pleinement conformes à la Charte des droits fondamentaux de l'UE et à la jurisprudence récente de la Cour européenne des droits de l'homme dans son interprétation de l'article 3 de la Convention.
Une plus grande souplesse de certaines des règles de rétention proposées et la clarification de différentes notions ont été simultanément introduites afin d'en faciliter l'application, ainsi que pour tenir compte des particularités des différents systèmes juridiques des États membres (en ce qui concerne, par exemple, l'accès à l'assistance juridique gratuite et la possibilité pour les autorités administratives d'ordonner un placement en rétention). La proposition modifiée prévoit également des conditions de rétention plus souples en ce qui concerne les zones géographiques dans lesquelles il est difficile, dans la pratique, de toujours offrir l'éventail complet des garanties proposées, notamment les postes frontières et les zones de transit. Plusieurs modifications ont également été apportées, conformément aux règles de l'UE sur la rétention applicables aux ressortissants de pays tiers faisant l'objet d'une décision de retour, afin d'assurer, le cas échéant, une approche plus cohérente de ces règles.
Les discussions menées au sein du Conseil ont montré que dans certaines circonstances, il est de l'intérêt supérieur des mineurs non accompagnés d'être gardés dans des centres de rétention, notamment pour éviter les enlèvements qui se produisent, selon les informations recueillies, dans les centres ouverts. À cet égard, la proposition modifiée n'autorise le placement en rétention des mineurs non accompagnés que lorsqu'il est démontré que leur intérêt supérieur l'exige. En outre, il y a lieu de veiller, au moyen d'un examen au cas par cas de la situation, à ce que la rétention n'affecte ni leur santé ni leur bien être. La rétention ne peut par ailleurs être appliquée que si les conditions d'accueil nécessaires peuvent être offertes dans le centre de rétention concerné (accès aux activités de loisirs, y compris en plein air).
Garantir un niveau de vie digne : plusieurs nouvelles mesures sont prévues :
- prise en compte des besoins en matière d'accueil particuliers : ce thème apparaît comme l'un des points les plus problématiques en ce qui concerne les normes nationales en vigueur. La détermination de ces besoins a non seulement une incidence sur l’accès à un traitement approprié, mais pourrait aussi influer sur la qualité du processus décisionnel. La proposition modifiée vise à garantir la mise en place de mesures nationales permettant de déterminer rapidement les besoins particuliers en matière d'accueil des personnes vulnérables et d'assurer le soutien et le suivi continus des cas individuels. Une attention particulière est accordée aux besoins d'accueil spécifiques des groupes particulièrement vulnérables, tels que les mineurs et les victimes d'actes de torture. La proposition modifiée vise parallèlement à simplifier ce processus de détermination des besoins particuliers et instaure un lien plus évident entre personnes vulnérables et personnes ayant des besoins particuliers en matière d'accueil. La proposition ne mentionne pas l'égalité de traitement avec les ressortissants de l'État membre d'accueil en ce qui concerne l'accès aux soins de santé, prenant acte de la position du Parlement européen et des fortes réserves du Conseil ;
- aide matérielle aux demandeurs : l'évaluation de la mise en œuvre de la directive actuelle a révélé des lacunes en ce qui concerne l'aide matérielle que les États membres fournissent aux demandeurs d'asile. Si la directive actuelle impose l'obligation d'assurer des normes adéquates en matière de traitement, il s'est avéré difficile, dans la pratique, de définir le niveau d'aide requis. Il importe dès lors d'établir des points de référence qui permettront de mieux «quantifier» cette obligation et pourront être efficacement appliqués par les administrations nationales. Lors des négociations au sein du Conseil et des récentes consultations avec les États membres, il est apparu clairement que des points de référence pertinents, bien que très divergents, sont actuellement prévus dans les législations ou pratiques nationales en la matière. Compte tenu de cette situation, la proposition modifiée autorise une certaine souplesse et ne vise pas à établir un point de référence unique dans l'UE. Elle autorise au contraire l'application de différents critères nationaux, pour autant qu'ils soient mesurables et de nature à faciliter le suivi du niveau d'aide fourni aux demandeurs.
Favoriser l'autosuffisance des demandeurs d'asile : l'accès à l'emploi pourrait prévenir l'exclusion des demandeurs d'asile de la société d'accueil et favoriser leur autosuffisance. À l’inverse, le chômage obligatoire fait peser des coûts sur l’État en raison du versement de prestations sociales supplémentaires et peut encourager le travail illégal. À cet égard, faciliter l'accès à l'emploi est bénéfique tant pour les demandeurs d'asile que pour l'État membre d'accueil. La proposition modifiée offre dès lors plus de souplesse, en ce qui concerne l'accès au marché du travail, conformément aux dispositions sur la durée de l'examen d'une demande d'asile établies dans la proposition modifiée de directive relative aux procédures d'asile.