Frontières extérieures: mandat de l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures (FRONTEX)

2010/0039(COD)

Le Parlement européen a adopté par 431 pour, 49 voix contre et 48 abstentions, une résolution législative sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2007/2004 portant création d'une Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l'Union européenne (FRONTEX).

Le Parlement a arrêté sa position en première lecture suivant la procédure législative ordinaire. Les amendements adoptés en plénière sont le résultat d’un compromis négocié entre le Parlement européen et le Conseil. Ils modifient la proposition comme suit :

Droits fondamentaux : le volet « droits fondamentaux » de la proposition a été renforcé. Il est précisé que l'Agence devra accomplir ses tâches dans le plein respect des dispositions pertinentes du droit de l'Union, y compris de la Charte des droits fondamentaux de l'UE, du droit international, dont la convention de Genève, des obligations relatives à l'accès à la protection internationale, en particulier le principe de non-refoulement, et des droits fondamentaux ainsi qu'en tenant compte des rapports du Forum consultatif prévu à la proposition (voir ci-après). Un nouvel amendement est ainsi inséré précisant que « nul ne peut être débarqué dans un pays ni livré aux autorités de celui-ci en violation du principe de non-refoulement ou s'il existe un risque d'expulsion ou de renvoi vers un autre pays en violation de ce principe ». Dans ce contexte, les besoins spécifiques des enfants, des victimes de la traite des êtres humains, des personnes nécessitant une assistance médicale ou des personnes vulnérables devront être pris en compte conformément au droit international et à celui de l'Union.

  • Code de conduite et stratégie en matière de droits fondamentaux : il est précisé que l’Agence devra élaborer, puis développer un code de conduite applicable à toutes les opérations dont elle assure la coordination. Ce code devra notamment définir les procédures, applicables à toutes les personnes participant aux activités de l'Agence, dont l'objectif est de garantir le respect des principes de l'état de droit et des droits fondamentaux, en accordant une attention particulière aux mineurs non accompagnés et aux personnes vulnérables, ainsi qu'aux personnes en quête de protection internationale. Le texte amendé précise en outre que FRONTEX devra mettre en place une stratégie en matière de droits fondamentaux et mettre en place un mécanisme efficace pour contrôler le respect des droits fondamentaux dans toutes ses activités.
  • Forum consultatif : il est précisé qu’un forum consultatif sera créé au sein de l'Agence pour assister son directeur et le conseil d'administration dans les matières concernant les droits fondamentaux. Entre autres tâches, ce Forum sera consulté sur le rapport annuel d’activités de FRONTEX, lequel sera rendu public.
  • Officier aux droits fondamentaux : le conseil d'administration de l'Agence devra également désigner un Officier aux droits fondamentaux. Ce dernier devra disposer des qualifications et de l'expérience nécessaires dans le domaine des droits fondamentaux, être indépendant dans l'accomplissement de ses obligations et rendre directement compte au conseil d'administration et au Forum consultatif. L’Officier et le Forum consultatif auront tous deux accès à toutes les informations concernant le respect des droits fondamentaux en rapport avec les activités de l'Agence.

Tâches de l’Agence : le texte amendé apporte des précisions aux différentes tâches attribuées à l’Agence. FRONTEX devra : i) assister les États membres dans les situations qui exigent une assistance technique et opérationnelle renforcée aux frontières extérieures, en tenant compte du fait que certaines situations peuvent relever de cas d'urgence humanitaire et impliquer des sauvetages en mer ; ii) mettre à la disposition de la Commission et des États membres l'assistance technique et les connaissances spécialisées nécessaires en matière de gestion des frontières extérieures et favoriser la solidarité entre les États membres, en particulier ceux qui sont exposés à des pressions spécifiques et disproportionnées ; iii) mettre sur pied des équipes européennes de gardes-frontières qui seraient déployées dans le cadre d'opérations conjointes, de projets pilotes et d'interventions rapides ; iv) déployer les gardes-frontières participant aux équipes européennes de gardes-frontières dans des États membres demandeurs lors d'opérations conjointes, de projets pilotes ou d'interventions rapides, conformément au règlement (CE) n° 863/2007.

Équipes européennes de gardes-frontières : des précisions sont apportées aux tâches et activités des équipes européennes de gardes-frontières qui seront déployées dans le cadre des opérations conjointes et des projets pilotes ainsi que dans le cadre des interventions rapides aux frontières. Les États membres seront appelés à contribuer à ces équipes en fournissant un nombre approprié de gardes-frontières qualifiés. Ces équipes seront constituées à partir d'une réserve nationale d’experts ayant des profils définis. La contribution des États membres en ce qui concerne le dépêchement des gardes-frontières pour des opérations spécifiques devra être programmée sur la base de négociations et d'accords bilatéraux conclus entre l'Agence et les États membres. Pour sa part, FRONTEX devra contribuer à la mise en place de ces équipes en mettant à disposition les gardes-frontières détachés par les États membres en tant qu'experts nationaux. Les États membres pourront dépêcher leurs gardes-frontières en cas de besoin, sauf s'ils sont confrontés à des situations exceptionnelles affectant sérieusement l'exécution de leurs tâches nationales. Dans ce cas, les États membres pourront rappeler leurs gardes-frontières. Le Parlement européen devra être tenu informé du nombre de gardes-frontières que chaque État membre s'est engagé à mettre à disposition.

Il est également précisé qu’en cas de violations des droits fondamentaux de ces gardes-frontières en opération, des mesures disciplinaires ou d'autres mesures appropriées devront être prises conformément à la législation des États membres.

Pressions spécifiques et disproportionnées sur certains États membres : le texte amendé précise que si un ou plusieurs États membres se retrouve(nt) soumis à des pressions spécifiques et disproportionnées et confrontés à une situation exigeant une assistance opérationnelle et technique renforcée lors de l'exécution de leurs obligations en matière de contrôle et de surveillance des frontières extérieures, ils pourront solliciter l'assistance de l'Agence. FRONTEX organiserait dans ce contexte l'assistance opérationnelle et technique nécessaire pour le ou les État(s) membre(s) demandeur(s). Ainsi, si un État membre fait face à une situation présentant un caractère urgent et exceptionnel, notamment à l'arrivée en certains points des frontières extérieures d'un grand nombre de ressortissants de pays tiers tentant d'entrer clandestinement sur leur(s) territoire, l'Agence pourra déployer, dans le cadre d’une intervention dite « rapide », et pour une durée limitée, une ou plusieurs équipes européennes de gardes-frontières pour un laps de temps approprié. Si le directeur exécutif de FRONTEX décide de déployer une ou plusieurs équipes, un plan opérationnel devra immédiatement être établi et en tout état de cause au plus tard 5 jours ouvrables après la date de la décision, par l'Agence et l'État membre demandeur.

Formation des gardes-frontières : pour les gardes-frontières qui font partie des équipes européennes de gardes-frontières, il est prévu que l'Agence organise des formations spécialisées en rapport avec les tâches qu'ils seront appelés à accomplir et les compétences qu'ils sont amenés à exercer, de même que des exercices périodiques selon le calendrier de formations spécialisées et d'exercices indiqué dans son programme de travail annuel. FRONTEX prendra également les initiatives nécessaires pour veiller à ce que tous les gardes-frontières et les autres membres du personnel des États membres qui participent aux équipes européennes de gardes-frontières, ainsi que les membres du personnel de l'Agence, reçoivent, préalablement à leur participation aux activités opérationnelles organisées par l'Agence, une formation sur les dispositions pertinentes du droit de l'Union et du droit international, y compris les droits fondamentaux et l'accès à la protection internationale, ainsi que des orientations permettant d'identifier les personnes en quête de protection et de les orienter vers les structures pertinentes.

Équipement technique à déployer : FRONTEX aura le droit d’acquérir, elle-même ou en copropriété avec un État membre, ou louer par crédit-bail, des équipements techniques de contrôle des frontières extérieures qui seront déployés dans le cadre d'opérations conjointes, de projets pilotes, d'interventions rapides, d'opérations de retour ou de projets d'assistance technique conformément aux règles financières qui s'appliquent à l'Agence. Toute acquisition ou location par crédit-bail d'équipements entraînant des coûts significatifs pour l'Agence devra être précédée d'une analyse approfondie des besoins et d’un rapport coûts/avantages. Des dispositions spécifiques sont prévues pour déterminer qui, de l'Agence ou des États membres, sera chargé d’enregistrer les équipements techniques visés et les conditions de leur utilisation.

Coopérations avec des organismes tiers : il est prévu que l'Agence puisse, avec l'accord de l'État membre ou des États membres concernés, inviter des observateurs d'agences ou d'organes de l'Union ou d'autres organisations internationales à participer à certaines de ses activités, dans la mesure où leur présence peut contribuer à l'amélioration de la coopération et à l'échange de bonnes pratiques, et ne porte pas atteinte à la sécurité générale des activités menées. Il en va de même avec la présence de représentants de certains pays tiers, dans le cadre d’accords de travail à prédéfinir entre FRONTEX et ces États tiers.

Traitement des données à caractère personnel : des dispositions spécifiques sont prévues afin de définir les modalités applicables au traitement des données à caractère personnel dans le cadre tant des opérations de retour conjointes, que des projets pilotes et des interventions rapides. De manière générale, le traitement des données devra respecter les principes de nécessité et de proportionnalité. Á titre d’exemple, il est précisé que le traitement des données à caractère personnel par l'Agence devra se limiter aux données concernant des personnes dont les autorités compétentes des États membres ont des motifs raisonnables de soupçonner la participation à des activités criminelles transfrontalières, à l'aide à des activités liées à l'immigration clandestine ou à des activités de traite des êtres humains. Dans ce cas, des dispositions sont prévues pour transmettre les informations à EUROPOL ou tout autre organisme pertinent en fonction de la pertinence du risque. En tout état de cause, l'Agence ne pourra utiliser les données à des fins d'enquêtes, celles-ci demeurant de la responsabilité des autorités nationales compétentes. Qui plus est, la transmission ultérieure ou toute autre communication de telles données traitées par l'Agence à des pays tiers ou d'autres tierces parties sera totalement prohibée.

Contrôle du Parlement : des dispositions sont prévues pour renforcer le rôle de contrôle et le droit à l’information du Parlement européen. Ce dernier et le Conseil pourront notamment inviter le directeur exécutif de l'Agence à faire rapport sur l'exécution de ses tâches, en particulier sur la mise en œuvre et le suivi de la stratégie en matière de droits fondamentaux, le rapport général de l'Agence concernant l'année précédente, le programme de travail de l'année à venir et son plan pluriannuel.

Personnalité juridique : à noter enfin que conformément au texte amendé, l’Agence serait dotée de la personnalité juridique, en tant qu’organisme de l'Union.