Conservation des ressources de pêche: réduction des captures accessoires des cétacés
La Commission présente une communication relative à la mise en œuvre de certaines dispositions du règlement (CE) n° 812/2004 du Conseil qui établit des mesures relatives à la communication de rapports concernant les captures accidentelles de cétacés dans certaines pêcheries, ainsi que des mesures visant à réduire ces captures.
En plus de recenser les pêcheries pour lesquelles il est obligatoire d'utiliser des dispositifs de dissuasion acoustiques et de préciser les spécifications techniques et les conditions d'utilisation de ces dispositifs, il faut rappeler que le règlement détermine également les pêcheries pour lesquelles des programmes relatifs à la présence d'observateurs à bord doivent être menés afin de collecter des données représentatives permettant d'évaluer le volume des prises accessoires de cétacés. Il incombe aux États membres de veiller à l'utilisation des dispositifs de dissuasion acoustiques et d'assurer le suivi de leur efficacité dans le temps, ainsi que d'assurer la mise en œuvre de programmes de surveillance conformément aux lignes directrices prévues par le règlement.
La communication inclut une synthèse des informations collectées entre 2007 et 2009 et transmises par les États membres à la Commission conformément à l'article 6 du règlement. Il a été également demandé au le Conseil international pour l'exploration de la mer (CIEM) et au comité scientifique, technique et économique de la pêche (CSTEP) d'analyser le contenu scientifique des rapports nationaux et la mise en œuvre du règlement, ainsi que les rapports scientifiques supplémentaires éventuellement fournis par les États membres. Les conclusions de cette analyse effectuée par le CIEM et le CSTEP ont été intégrées dans le document.
La Commission conclut que même si les objectifs de surveillance, les formats des rapports et d’autres points sont toujours en discussion, le règlement a permis, d’après le CIEM, de se faire une idée beaucoup plus précise des captures accessoires de cétacés dans les pêcheries européennes. Pourtant, malgré ces améliorations, le règlement en vigueur depuis 6 ans ne remplit toujours pas pleinement son objectif, qui est de prévenir les captures accidentelles de cétacés dans les engins de pêche :
a) les prises accessoires continuent d'être une réalité dans un certain nombre de pêcheries de l'Atlantique du Nord, de la mer du Nord et de la mer Baltique et, d'après le CIEM, plusieurs sous-populations de marsouins et de dauphins communs dans ces zones sont considérées comme menacées ;
b) il est manifeste que les estimations relatives à l’abondance des cétacés dans la Méditerranée et dans la mer Noire sont inadéquates, rendant impossible toute évaluation des populations ou des captures accessoires dans ces régions, mais il existe néanmoins assez d'éléments permettant de conclure que les prises accessoires demeurent élevées dans ces bassins maritimes.
Le document met l’accent sur les points suivants :
- Manque d’informations sur les populations de cétacés : l’effort d’échantillonnage a été insuffisant dans les pêcheries et zones où il aurait dû avoir lieu, ce qui n'a pas permis de prendre de bonnes décisions en matière de gestion des captures accessoires de cétacés. Si la plupart des États membres qui ont remis un rapport à la Commission font état d’un nombre limité voire nul de prises accessoires dans les eaux de l’UE, les preuves scientifiques apportées par les programmes d'observateurs à bord ou par l’autopsie des animaux échoués continuent à démontrer l’existence d'interactions importantes entre les activités de pêche et les cétacés. De plus, les informations sur les populations de cétacés sont fragmentées et l'état de ces populations demeure peu clair, ce qui contribue à une méconnaissance des incidences réelles de la pêche sur les cétacés. Des estimations absolues potentiellement intéressantes pour orienter les actions de gestion ne sont disponibles que pour quelques espèces dans la mer du Nord, la mer Baltique et certaines parties de l’Atlantique du Nord-Est.
- Faible utilisation des dispositifs de dissuasion acoustiques : l'on accorde actuellement trop d’importance aux mesures de réduction (à savoir les dispositifs de dissuasion acoustiques), alors que ces mesures se sont révélées efficaces uniquement pour les prises accessoires de marsouins dans les pêches à filets fixes, mais pas pour d'autres espèces de cétacés (dauphin commun ou dauphin bleu et blanc par exemple) ou pour d'autres méthodes de pêche (chaluts pélagiques notamment). En conséquence, l'article 2 du règlement est inefficace. De manière générale, les pêcheurs sont peu enclins à utiliser les dispositifs disponibles à l’heure actuelle pour une série de raisons pratiques et économiques bien documentées.
- Qualité inégale des rapports des États membres : de nombreux États membres ont déployé des efforts considérables pour respecter les exigences en matière de rapport prévues par le règlement. La qualité et le contenu des rapports de certains États membres demeurent toutefois inégaux, ce qui en complique l’analyse. Les rapports des États membres devraient être élaborés selon la segmentation de la flotte établie dans le cadre pour la collecte des données et contenir une ventilation par mois plutôt que par trimestre.
- Objectifs de surveillance trop ambitieux : ces objectifs pourraient être revus. D'après le CIEM, une approche plus générale obligeant les États membres à apporter la preuve que leurs pêcheries n’excèdent pas un certain niveau de prises accessoires de cétacés serait plus adaptée, sans imposer aux États membres des obligations excessives en matière de surveillance. Une plus grande flexibilité et une meilleure coordination sont nécessaires lors de la répartition des efforts de surveillance.
- Recherche : la répartition des cétacés et leurs interactions avec les pêcheries évoluent au fil du temps. Outre le respect du règlement, la multiplication de travaux de recherches portant spécifiquement sur les mesures de réduction des captures accidentelles et le renforcement de la surveillance relative aux interactions entre cétacés et pêcheries contribueront à une meilleure compréhension de ces évolutions et au développement d'instruments nécessaires à une bonne gestion.
- Obligations en vertu de la directive «Habitats» : en vertu de cette directive, les États membres ont l'obligation de surveiller les captures et mises à mort accidentelles de tous les cétacés et de veiller à ce que ces captures ou mises à mort accidentelles n'aient pas d’incidence négative importante sur les populations des espèces concernées. Concrètement, les prises accessoires de cétacés dans la mer Noire et les captures accidentelles de pinnipèdes, d'oiseaux marins et de tortues par les engins de pêche dans toutes les zones constituent des cas spécifiques qui ne relèvent pas actuellement du champ d'application du règlement mais doivent faire l'objet d'une surveillance.
Perspectives : sur la base de ces constations, la Commission estime nécessaire de veiller à ce que les mesures de surveillance et de réduction des captures accidentelles visent expressément les zones et les espèces les plus menacées.
Des mesures de réduction plus adaptées pourraient être intégrées dans le nouveau cadre de mesures techniques qui sera mis en place à l'occasion de la réforme de la politique commune de la pêche. Ce cadre définira le champ d'application des mesures, ainsi que les objectifs généraux et ciblés à atteindre en ce qui concerne les prises accessoires de cétacés, et permettra aux États membres de prendre des mesures de réduction spécifiques pour des zones et des pêcheries déterminées.
Les exigences en matière de surveillance pourraient être intégrées au cadre pour la collecte des données, parallèlement à l'adoption d'une approche écosystémique plus large appliquée à la surveillance des pêcheries, laquelle inclurait les prises accessoires d'espèces non ciblées telles que les cétacés, les oiseaux marins et les organismes benthiques. Une fois que toutes ces dispositions auront été mises en œuvre, le règlement (CE) n° 812/2004 pourra être abrogé.