Protection des intérêts des consommateurs: action en cessation. Codification

2003/0099(COD)

La Commission a présenté un rapport sur l’application de la directive 2009/22/CE du Parlement européen et du Conseil relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs.

Pour rappel, la directive 98/27/CE relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs a introduit une procédure judiciaire ou administrative permettant aux associations de consommateurs ou aux pouvoirs publics d’agir en cessation, dans tous les États membres, afin d’empêcher un opérateur de poursuivre une pratique contraire à certaines règles de l’Union européenne en matière de protection des consommateurs. Cet instrument a été modifié à plusieurs reprises et il a été codifié par la directive 2009/22/CE en vigueur.

Un premier rapport sur l’application de la directive a été adopté en novembre 2008. Ce deuxième rapport de la Commission s’appuie sur les réponses aux questionnaires sur l’application de la directive adressés aux pouvoirs publics et aux associations de consommateurs.

1) Actions en cessation : le rapport note qu’il est difficile d’évaluer le nombre d’actions en cessation et toute estimation à ce sujet est à considérer avec prudence. Les réponses au questionnaire envoyé aux parties intéressées montrent qu’en tout, 5.632 actions en cessation ont été recensées, majoritairement nationales. Les pays ayant enregistré le plus grand nombre d’actions en cessation après 2008 sont les suivants: l’Allemagne (3.000 actions), la Lettonie (956 affaires), le Royaume-Uni (938), l’Autriche (500) et Malte (267). Le taux de succès des poursuites engagées est généralement élevé.

Les domaines d’activité le plus souvent cités dans les réponses au questionnaire comme les plus touchés par ce type de recours sont: i) les télécommunications; ii) les services bancaires et les services d’investissement; iii) le tourisme et les voyages à forfait. D’autres secteurs évoqués à plusieurs reprises sont la vente à distance, les assurances, l’énergie, les biens de consommation non alimentaires et le transport de passagers.

Sur la base des réponses au questionnaire, les pratiques illicites qui ont le plus souvent donné lieu à des actions en cessation sont les suivantes :

  • les clauses abusives de contrats (principal motif des actions en cessation);
  • les pratiques commerciales déloyales et les publicités trompeuses, en mesure égale.

2) Un instrument utile malgré des imperfections : le rapport souligne que malgré ses imperfections, l’action en cessation reste un instrument utile pour protéger l’intérêt collectif des consommateurs. Les entités qualifiées sont de plus en plus au fait des possibilités offertes par la directive et s’habituent à s’en servir. Les principales incidences positives de la directive pour les consommateurs sont les suivantes :

  • les actions en cessation offrent un moyen expédient pour réglementer les marchés et garantir, notamment, des contrats équitables ;
  • les actions en cessation sont particulièrement efficaces vis-à-vis des acteurs du marché qui respectent la loi dans une certaine mesure. En revanche, elles ne sont pas toujours l’instrument adéquat pour mettre fin aux pratiques illicites des opérateurs voyous ou criminels ;
  • la directive a contribué à un plus grand respect des dispositions relatives à la protection des consommateurs par les opérateurs économiques dans certains secteurs d’activité, même si l’on ne dispose pas de données suffisantes pour calculer le pourcentage de diminution des infractions ;
  • la directive a entraîné des bénéfices qualitatifs directs pour les consommateurs, même si ces bénéfices ne peuvent pas toujours être traduits en termes monétaires ;
  • la procédure en cessation instaurée par la directive ne permet pas aux consommateurs lésés par une pratique illicite d’obtenir réparation du préjudice subi. Toutefois, les moyens d’obtenir réparation d’un dommage né de pratiques commerciales déclarées illicites au terme d’une action en cessation varient d’un État membre à l’autre.

Le rapport note toutefois que d’importants écarts subsistent entre les États membres quant à l’utilisation et à l’efficacité de cet instrument. En outre, même dans les pays où l’efficacité des actions en cessation est reconnue et où elles sont largement employées, leur potentiel n’est pas pleinement exploité en raison des principaux problèmes suivants : les coûts élevés liés à ce type d’action, la longueur et la complexité des procédures, les effets relativement limités des sentences et la difficulté d’assurer leur exécution. Ces obstacles sont encore plus présents dans les actions en cessation à caractère transfrontalier.

3) Prochaines étapes : malgré ses limites, l’action en cessation est considérée par l’immense majorité des parties prenantes et des experts comme un instrument valable au potentiel considérable, pour autant que soient comblées les carences signalées.

Dans sa résolution du 2 février 2012 intitulée «Vers une approche européenne cohérente du recours collectif», le Parlement européen a exprimé l’avis que les mécanismes introduits par la directive 2009/22/CE relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs, peuvent être sensiblement améliorés de sorte à encourager la coopération et le redressement par voie d’injonction dans les affaires transfrontalières.

Le rapport énumère quelques mesures proposées par les parties prenantes en vue de rendre plus efficaces les actions en cessation:

  • Mesures non législatives : campagnes de sensibilisation et des formations à l’intention des entités qualifiées sur les actions en cessation ; utilisation d’instruments tels qu’un site Internet pour mieux faire connaître les affaires de cette nature partout en Europe.
  • Modifications possibles du cadre juridique : la directive laisse une importante marge de manœuvre aux États membres pour définir les caractéristiques des actions en cessation (y compris les règles de procédure), leur portée et leur durée. Plusieurs des personnes interrogées ont plaidé pour une plus grande harmonisation à l’échelle européenne des actions en cessation (concernant les délais d’introduction d’une instance, l’échéance à laquelle une décision doit être rendue et le coût de la procédure), au moins pour les affaires transfrontalières.

Il a également été suggéré d’introduire au niveau européen des mesures existant dans certains États membres, à savoir :

  • extension du champ d’application de la directive à l’ensemble des règles en matière de protection des consommateurs ;
  • extension de l’effet des décisions : faire en sorte que les consommateurs puissent bénéficier directement d’une sentence favorable plutôt qu’être obligés d’engager de nouvelles poursuites pour faire valoir leurs droits ; introduire dans la directive des dispositions univoques sur la possibilité et les moyens d’indemniser les consommateurs ; suspendre le délai accordé aux victimes d’une infraction pour demander des dommages et intérêts pendant toute la durée du jugement en cessation ;
  • adoption de procédures d’urgence pour l’ordonnance de mesures provisoires ;
  • droit à l’information : les entités qualifiées devraient avoir le droit de connaître le nom et le siège social des entreprises responsables de pratiques illicites ; les professionnels devraient être obligés de rendre publics leurs contrats types ;
  • financement : le principe du «perdant payeur» doit être maintenu dans les actions en cessation, mais il doit être appliqué à bon escient, en favorisant les entités qualifiées, comme dans certains États membres ;
  • amélioration de l’exécution des décisions : les États membres devraient être tenus d’appliquer des peines dissuasives en cas de non-respect des décisions de cessation, afin de garantir que les pratiques illicites ne profitent pas aux opérateurs.

Enfin, plusieurs parties prenantes, dont les pouvoirs publics de certains États membres, ont déclaré qu’un mécanisme de recours collectif pour les consommateurs devrait être adopté au niveau européen, sans préjudice d’une amélioration éventuelle des actions en cessation.

La Commission prend bonne note des problèmes évoqués par les parties prenantes et de leurs propositions en vue d’y remédier. Elle continuera de surveiller l’application de la directive dans l’Union. Elle étudiera plus avant, avec les États membres, les meilleures solutions à apporter aux carences évoquées dans le rapport.

En conclusion, la Commission estime qu’il n’existe pas, à ce stade, de raisons suffisamment impérieuses pour proposer de modifier la directive; elle réexaminera la situation au moment de préparer son prochain rapport sur l’application de cet instrument.