Coopération judiciaire civile: entreprises, procédures d'insolvabilité ayant un effet transfrontalier

1999/0806(CNS)

La Commission présente un rapport sur l’application du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil relatif aux procédures d’insolvabilité. Ce rapport tient compte notamment d’une étude juridique comparative de l’évaluation du règlement dans 26 États membres, réalisée par les universités de Heidelberg et de Vienne avec l’aide d’un réseau de rapporteurs nationaux. Une consultation publique en ligne s’est également déroulée entre mars et juin 2012.

Évaluation générale : la Commission estime que, de manière générale, le règlement fonctionne de manière correcte et satisfaisante. Il a bien mis en œuvre le principe de la reconnaissance mutuelle des procédures d’insolvabilité transfrontières et a amélioré la coordination de ces cas. La jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a clarifié l’interprétation du règlement sur plusieurs points, contribuant ainsi à son interprétation uniforme par les juridictions des États membres.

L’étude d’évaluation et la consultation publique ont néanmoins recensé un certain nombre de lacunes dans le règlement. La Commission suggère donc de proposer les adaptations nécessaires afin de répondre aux besoins d’un environnement moderne et propice aux entreprises. Pour l’essentiel, les problèmes détectés concernent les points suivants :

Le champ d’application du règlement : du fait des nouvelles tendances et approches qui prévalent dans les États membres, un grand nombre de procédures nationales visant à résoudre l’endettement des sociétés et des particuliers n’est pas couvert par le champ d’application du règlement.

En conséquence, la Commission suggère d’étendre le champ d’application du règlement en modifiant la définition des procédures d’insolvabilité afin d’y inclure les procédures de pré-insolvabilité et les procédures hybrides ainsi que les procédures d’insolvabilité concernant les particuliers, qui ne sont actuellement pas couverts.

Les règles relatives à la compétence : le rapport examine la question de la définition et de la détermination du «centre des intérêts principaux», un concept qui revêt une importance capitale pour l’application du règlement. L’évaluation met aussi en lumière plusieurs problèmes importants concernant le cadre procédural applicable à la détermination de la compétence de la juridiction ouvrant la procédure d’insolvabilité.

Le rapport conclut que le règlement devrait maintenir le concept de centre des intérêts principaux tel qu’il a été interprété par la Cour de justice de l’Union européenne, mais la Commission propose de revoir le libellé afin d’en préciser le sens. La révision clarifie également l’application de la règle du centre des intérêts principaux pour les particuliers. La révision proposée introduit une règle sur la compétence en matière d’actions connexes. De plus, le cadre procédural d’examen de la compétence devrait être amélioré afin de limiter le risque d’une recherche du système juridique le plus favorable («forum shopping»).

La publicité faite aux décisions d’insolvabilité : la conclusion selon laquelle la non-publication de l’ouverture de la procédure dans un registre public réduit considérablement la capacité des créanciers à prendre connaissance de l’existence d’une procédure d’insolvabilité ouverte dans un autre État membre bénéficie d’un large soutien. Le manque d’informations sur des procédures en cours a également entraîné l’engagement de procédures concurrentes inutiles dans différents États membres.

La Commission propose d’améliorer la publication des procédures d’insolvabilité de deux manières: a) en rendant obligatoire la publication des décisions dans un autre État membre et b) en exigeant que les décisions ouvrant et clôturant les procédures d’insolvabilité et certaines autres décisions soient publiées dans un registre électronique accessible au public sur l’Internet. Les registres électroniques d’insolvabilité devraient répondre aux besoins liés aux procédures d’insolvabilité transfrontières, mais ils seront bien évidemment aussi utiles aux utilisateurs nationaux.

La production des créances : l’étude d’évaluation recense des problèmes pratiques concernant certains aspects de la production de créances dans des cas transfrontières, comme la barrière de la langue, les coûts, les délais à observer pour la production des créances et l’absence d’information sur la décision d’ouverture, le syndic et les modalités de la loi de l’État d’ouverture concernant la production des créances. Il existe également des difficultés liées à l’application de la loi d’ouverture de la procédure, notamment en ce qui concerne les délais à observer, la preuve des créances et les procédures spécifiques de production de créances.

La Commission propose d’introduire de nouveaux formulaires uniformisés pour la notification des procédures et la production des créances en vue de permettre aux créanciers étrangers de faire valoir leurs créances plus facilement. En outre, les délais fixés pour la production de créances doivent être suffisamment longs pour permettre à ceux-ci de présenter utilement une créance.

L’insolvabilité de membres d’un groupe d’entreprises : bien qu’un nombre important de cas d’insolvabilité transfrontières concerne des groupes d’entreprises, le règlement ne contient aucune règle spécifique relative à l’insolvabilité d’un groupe multinational d’entreprises. La Commission souscrit à la conclusion de l’étude d’évaluation selon laquelle l’absence d’un cadre spécifique pour l’insolvabilité des groupes constitue, dans certains cas, un obstacle à une administration efficace de l’insolvabilité des membres d’un groupe d’entreprises.

La Commission propose d’introduire des dispositions spécifiques dans le règlement afin que le traitement de l’insolvabilité des membres d’un groupe multinational d’entreprises soit plus efficace. Une meilleure coopération entre les syndics de différents États membres devrait contribuer au sauvetage des entreprises et optimiser la valeur de leurs actifs.

D’autres questions, au sujet desquelles certains problèmes ont été détectés dans l’évaluation, comme ont été examinées, comme par exemple :

L’extension du champ d’application en dehors de l’UE : la Commission ne juge pas souhaitable d’introduire dans le règlement des dispositions spécifiques concernant la reconnaissance et la coordination des procédures d’insolvabilité ouvertes en dehors de l’UE. La raison première en est que de telles dispositions ne seraient contraignantes que sur le territoire des États membres et pas dans les pays tiers. Par conséquent, la rédaction éventuelle d’un projet de convention internationale serait plus à même d’atteindre ces objectifs et de protéger les intérêts de l’Union dans des négociations réciproques avec les pays tiers.

La loi applicable : la Commission ne propose pas de modification aux dispositions du règlement en ce qui concerne la loi applicable. Elle est d’avis que l’application des dispositions existantes au sein de l’UE est satisfaisante et que les domaines respectifs de la lex fori et de la lex situ apportent le juste équilibre. En conséquence, la Commission juge préférable de conserver les règles juridiques conflictuelles actuelles dans l’attente que les effets des modifications éventuelles sur les législations nationales en matière d’insolvabilité, de droit des sociétés et de droit social soient analysés plus avant.