Coopération judiciaire civile: entreprises, procédures d'insolvabilité ayant un effet transfrontalier
La Commission présente un rapport sur lapplication du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil relatif aux procédures dinsolvabilité. Ce rapport tient compte notamment dune étude juridique comparative de lévaluation du règlement dans 26 États membres, réalisée par les universités de Heidelberg et de Vienne avec laide dun réseau de rapporteurs nationaux. Une consultation publique en ligne sest également déroulée entre mars et juin 2012.
Évaluation générale : la Commission estime que, de manière générale, le règlement fonctionne de manière correcte et satisfaisante. Il a bien mis en uvre le principe de la reconnaissance mutuelle des procédures dinsolvabilité transfrontières et a amélioré la coordination de ces cas. La jurisprudence de la Cour de justice de lUnion européenne (CJUE) a clarifié linterprétation du règlement sur plusieurs points, contribuant ainsi à son interprétation uniforme par les juridictions des États membres.
Létude dévaluation et la consultation publique ont néanmoins recensé un certain nombre de lacunes dans le règlement. La Commission suggère donc de proposer les adaptations nécessaires afin de répondre aux besoins dun environnement moderne et propice aux entreprises. Pour lessentiel, les problèmes détectés concernent les points suivants :
Le champ dapplication du règlement : du fait des nouvelles tendances et approches qui prévalent dans les États membres, un grand nombre de procédures nationales visant à résoudre lendettement des sociétés et des particuliers nest pas couvert par le champ dapplication du règlement.
En conséquence, la Commission suggère détendre le champ dapplication du règlement en modifiant la définition des procédures dinsolvabilité afin dy inclure les procédures de pré-insolvabilité et les procédures hybrides ainsi que les procédures dinsolvabilité concernant les particuliers, qui ne sont actuellement pas couverts.
Les règles relatives à la compétence : le rapport examine la question de la définition et de la détermination du «centre des intérêts principaux», un concept qui revêt une importance capitale pour lapplication du règlement. Lévaluation met aussi en lumière plusieurs problèmes importants concernant le cadre procédural applicable à la détermination de la compétence de la juridiction ouvrant la procédure dinsolvabilité.
Le rapport conclut que le règlement devrait maintenir le concept de centre des intérêts principaux tel quil a été interprété par la Cour de justice de lUnion européenne, mais la Commission propose de revoir le libellé afin den préciser le sens. La révision clarifie également lapplication de la règle du centre des intérêts principaux pour les particuliers. La révision proposée introduit une règle sur la compétence en matière dactions connexes. De plus, le cadre procédural dexamen de la compétence devrait être amélioré afin de limiter le risque dune recherche du système juridique le plus favorable («forum shopping»).
La publicité faite aux décisions dinsolvabilité : la conclusion selon laquelle la non-publication de louverture de la procédure dans un registre public réduit considérablement la capacité des créanciers à prendre connaissance de lexistence dune procédure dinsolvabilité ouverte dans un autre État membre bénéficie dun large soutien. Le manque dinformations sur des procédures en cours a également entraîné lengagement de procédures concurrentes inutiles dans différents États membres.
La Commission propose daméliorer la publication des procédures dinsolvabilité de deux manières: a) en rendant obligatoire la publication des décisions dans un autre État membre et b) en exigeant que les décisions ouvrant et clôturant les procédures dinsolvabilité et certaines autres décisions soient publiées dans un registre électronique accessible au public sur lInternet. Les registres électroniques dinsolvabilité devraient répondre aux besoins liés aux procédures dinsolvabilité transfrontières, mais ils seront bien évidemment aussi utiles aux utilisateurs nationaux.
La production des créances : létude dévaluation recense des problèmes pratiques concernant certains aspects de la production de créances dans des cas transfrontières, comme la barrière de la langue, les coûts, les délais à observer pour la production des créances et labsence dinformation sur la décision douverture, le syndic et les modalités de la loi de lÉtat douverture concernant la production des créances. Il existe également des difficultés liées à lapplication de la loi douverture de la procédure, notamment en ce qui concerne les délais à observer, la preuve des créances et les procédures spécifiques de production de créances.
La Commission propose dintroduire de nouveaux formulaires uniformisés pour la notification des procédures et la production des créances en vue de permettre aux créanciers étrangers de faire valoir leurs créances plus facilement. En outre, les délais fixés pour la production de créances doivent être suffisamment longs pour permettre à ceux-ci de présenter utilement une créance.
Linsolvabilité de membres dun groupe dentreprises : bien quun nombre important de cas dinsolvabilité transfrontières concerne des groupes dentreprises, le règlement ne contient aucune règle spécifique relative à linsolvabilité dun groupe multinational dentreprises. La Commission souscrit à la conclusion de létude dévaluation selon laquelle labsence dun cadre spécifique pour linsolvabilité des groupes constitue, dans certains cas, un obstacle à une administration efficace de linsolvabilité des membres dun groupe dentreprises.
La Commission propose dintroduire des dispositions spécifiques dans le règlement afin que le traitement de linsolvabilité des membres dun groupe multinational dentreprises soit plus efficace. Une meilleure coopération entre les syndics de différents États membres devrait contribuer au sauvetage des entreprises et optimiser la valeur de leurs actifs.
Dautres questions, au sujet desquelles certains problèmes ont été détectés dans lévaluation, comme ont été examinées, comme par exemple :
Lextension du champ dapplication en dehors de lUE : la Commission ne juge pas souhaitable dintroduire dans le règlement des dispositions spécifiques concernant la reconnaissance et la coordination des procédures dinsolvabilité ouvertes en dehors de lUE. La raison première en est que de telles dispositions ne seraient contraignantes que sur le territoire des États membres et pas dans les pays tiers. Par conséquent, la rédaction éventuelle dun projet de convention internationale serait plus à même datteindre ces objectifs et de protéger les intérêts de lUnion dans des négociations réciproques avec les pays tiers.
La loi applicable : la Commission ne propose pas de modification aux dispositions du règlement en ce qui concerne la loi applicable. Elle est davis que lapplication des dispositions existantes au sein de lUE est satisfaisante et que les domaines respectifs de la lex fori et de la lex situ apportent le juste équilibre. En conséquence, la Commission juge préférable de conserver les règles juridiques conflictuelles actuelles dans lattente que les effets des modifications éventuelles sur les législations nationales en matière dinsolvabilité, de droit des sociétés et de droit social soient analysés plus avant.