Système européen de surveillance des frontières (Eurosur)

2011/0427(COD)

Le Parlement européen a adopté par 479 voix pour, 101 voix contre et 20 abstentions, une résolution législative sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création du système européen de surveillance des frontières (EUROSUR).

Le Parlement a arrêté sa position en première lecture suivant la procédure législative ordinaire. Les amendements adoptés en plénière sont le résultat d’un compromis négocié entre le Parlement européen et le Conseil. Ils modifient la proposition comme suit :

Objet : "EUROSUR" devrait créer un cadre commun pour l'échange d'informations et pour la coopération entre les États membres et FRONTEX en vue d’améliorer la connaissance de la situation et accroître la capacité de réaction aux frontières extérieures des États membres de l'Union dans le but de détecter, prévenir et combattre l'immigration illégale et la criminalité transfrontalière et ainsi contribuer à assurer la protection de la vie des migrants et à leur sauver la vie.

Á cet égard, la pratique consistant à voyager dans de petites embarcations inadaptées à la navigation en mer est évoquée en ce qu’elle entraînerait une hausse considérable du nombre de migrants qui se noient, ce qu’il conviendrait de prévenir grâce à une amélioration de la détection de ces barques afin de réduire le nombre de décès de migrants.

Il est également précisé que le règlement devrait reconnaitre que les routes migratoires sont également suivies par les demandeurs d’asile.

Champ d'application : outre la surveillance des frontières extérieures terrestres et maritimes des États membres, le règlement devrait s'appliquer à la surveillance des frontières aériennes et aux vérifications aux points de passage frontaliers si les États membres fournissent volontairement de telles informations à EUROSUR. Le règlement ne devrait toutefois pas s’appliquer aux mesures d'ordre juridique ou administratif prises dès l'instant où les autorités compétentes d'un État membre ont intercepté les mouvements d'activités criminelles transfrontières ou de personnes qui franchissent illégalement les frontières extérieures.

Cadre d'EUROSUR : diverses dispositions ont été ajoutées pour renforcer le système d’échange d’informations et de coopération dans le domaine de la surveillance des frontières entre États membres, en tenant compte des mécanismes d'échange d'informations et de coopération existants afin d'optimiser l'utilisation du budget de l'Union et d'éviter la création de doublons.

Des mesures ont ainsi été prévues pour renforcer : i) le Centre national de coordination et lui donner de nouvelles tâches, ii) FRONTEX, de sorte que l’Agence FRONTEX mette en place et tienne le réseau de communication d'EUROSUR et en assure le fonctionnement, iii) le réseau de communication lui-même, de sorte que les centres nationaux de coordination échangent, traitent et stockent des informations sensibles non classifiées.

Connaissance de la situation : cette terminologie a été revue : celle-ci recouvre dorénavant la capacité à surveiller, détecter, identifier, localiser et comprendre les activités transfrontières illégales afin de motiver les mesures de réaction mais aussi prévenir les pertes de vies des migrants aux frontières extérieures, ou le long ou à proximité de celles-ci.

Tableaux de situation : des dispositions ont été prévues pour renforcer les tableaux de situation qu’ils soient nationaux, européens ou communs. Pour rappel, un tableau de situation est une interface graphique présentant des données et des informations reçues en temps quasi réel de différentes autorités, capteurs, plateformes et autres sources.

- le tableau de situation national devrait ainsi également inclure des informations recueillies auprès des autorités de pays tiers et devrait se composer des couches suivantes :

  • la couche "événements" devrait se composer de plusieurs sous-couches dont une sous-couche "franchissement non autorisé des frontières", avec des informations sur les incidents ayant trait à une menace pour la vie des migrants ;
  • la couche "opérations" se composerait d’une sous-couche "ressources propres, y compris les ressources militaires appuyant une mission de maintien de l'ordre et zones d'opération". En ce qui concerne les ressources militaires appuyant une mission de maintien de l'ordre, le centre national de coordination pourrait décider de limiter l'accès à de telles informations (ce type d’informations devant être classées comme "RESTREINT UE") ;
  • la couche «analyse» devrait inclure une sous-couche "renseignement", présentant des informations utiles aux fins de l'attribution des niveaux d'impact aux tronçons de frontières extérieures.

Il est également prévu que les centres nationaux de coordination d'États membres voisins puissent se communiquer directement, et en temps quasi réel, leur tableau de situation des tronçons de frontière extérieure adjacents.

- le tableau de situation européen serait élaboré et tenu à jour par FRONTEX en vue de fournir aux centres nationaux de coordination des informations et des analyses utiles, précises et pertinentes. Parmi les informations dont il serait composé, figureraient des informations obtenues par la Commission sur les contrôles aux frontières, celles émanant des délégations et bureaux de l’UE et d’autres organes et agences de l’UE pertinents. Les informations devraient en outre inclure toute information sur les interventions rapides coordonnées par FRONTEX. Certaines de ces informations (informations relatives aux ressources propres figurant dans la couche "opérations") seraient également classées "RESTREINT UE".

- des dispositions similaires ont été introduites en ce qui concerne le tableau commun du renseignement en amont des frontières, en insistant sur l’homogénéité des 3 tableaux du point de vue de la structure et de la présentation.

Traitement des données à caractère personnel : il est prévu que lorsque le tableau de situation national sera utilisé pour le traitement de données à caractère personnel, le traitement devrait être effectué conformément à la directive 95/46/CE, à la décision-cadre 2008/977/JAI et aux dispositions nationales pertinentes en matière de protection des données.

Le tableau de situation européen et le tableau commun du renseignement ne pourraient être utilisés que pour le traitement de données à caractère personnel concernant des numéros d'identification de navires. Ces données à caractère personnel traitées conformément au règlement FRONTEX ne devraient en outre être traitées qu’à des fins de détection, d'identification et de pistage des navires. Elles seraient automatiquement effacées dans un délai de 7 jours à compter de leur réception par l'Agence ou, lorsque le pistage d'un navire exigerait davantage de temps, dans les deux mois à compter de leur réception par l'Agence.

Réaction correspondant aux niveaux d'impact : aux fins du système EUROSUR, chaque État membre doit, conformément au règlement, diviser ses frontières extérieures terrestres et maritimes en tronçons. Dans ce contexte, il est prévu que les États membres s'assurent que les actions de surveillance effectuées le long de ces tronçons correspondent à certains niveaux d'impact. D’une manière générale, lorsqu’un niveau d’impact faible est attribué à un tronçon de frontière extérieure, les autorités nationales chargées de la surveillance des frontières extérieures devraient organiser une surveillance régulière sur la base d'une analyse des risques et veiller à ce que des ressources et du personnel suffisants soient maintenus dans la zone frontalière concernée pour d'éventuelles actions de pistage, d'identification et d'interception.

Si le niveau d'impact est considéré comme moyen, des mesures de surveillance supplémentaires devraient être prises à cette frontière en tenant le centre de coordination nationale informé. Ce dernier pourrait alors prévoir des ressources complémentaires.

Si le niveau d’impact se révèle élevé, les autorités nationales devraient alors renforcer les mesures de surveillance avec le soutien de FRONTEX, en vue d’engager des opérations conjointes ou des interventions rapides.

Mise en œuvre : lors de la mise en œuvre du règlement, l'Agence FRONTEX et les États membres devraient faire le meilleur usage possible des capacités existantes en termes de ressources humaines et d'équipements techniques, tant à l'échelle de l'UE qu'à l'échelle nationale.

Coopération avec l'Irlande et le Royaume-Uni : des dispositions ont été prévues pour améliorer la coopération avec l'Irlande et le Royaume-Uni, qui pourraient contribuer à une meilleure réalisation des objectifs d'EUROSUR. Cette coopération se fonderait sur des accords bilatéraux ou multilatéraux entre l'Irlande et le Royaume-Uni et un ou plusieurs États membres voisins ou s'effectuer par le biais de réseaux régionaux fondés sur ces accords.

Coopération avec les pays tiers voisins ou d’autres tiers : plusieurs types de coopération seraient prévus, dont la coopération avec la Commission européenne, le Service européen pour l'action extérieure, les organes, bureaux et agences de l'Union, y compris le Bureau européen d'appui en matière d'asile,… Des coopérations spécifiques avec des pays tiers conformément à des accords bilatéraux ou multilatéraux conclus ou à conclure sont également prévues, en accord avec les dispositions pertinentes du droit de l'Union et du droit international relatif aux réfugiés, et au principe de non-refoulement.

Avant la conclusion de tels accords, les États membres concernés devraient les notifier à la Commission, laquelle vérifiera que les dispositions prévues respectent le règlement EUROSUR. Une fois l'accord conclu, l'État membre concerné le notifierait à la Commission, qui en informerait le Parlement européen, le Conseil et FRONTEX.

En matière d’échange de données, il est clairement spécifié que tout échange de données à caractère personnel avec des pays tiers n'interviendrait qu'à titre exceptionnel et uniquement dans le cadre du droit européen applicable en matière de protection des données. En tout état de cause, tout échange de données à caractère personnel entre États membres ou avec des pays tiers par le biais d'EUROSUR doit rester une exception et respecter les lois sur la protection des données.

Par ailleurs, les États membres ne doivent pas avoir recours à EUROSUR pour envoyer à des pays tiers des informations qui pourraient être utilisées pour identifier une personne dont la demande de protection internationale est en cours de traitement ou dont la vie ou l'intégrité physique pourrait être menacée.

Agence FRONTEX : l'Agence devrait être dotée des ressources financières et humaines appropriées lui permettant d'accomplir adéquatement les tâches supplémentaires qui lui sont assignées au titre d’EUROSUR. Elle pourrait également coopérer avec le Centre opérationnel d'analyse du renseignement maritime pour les stupéfiants (MAOC-N) et le Centre de coordination de la lutte antidrogue en Méditerranée (CeCLAD-M), pour échanger des informations sur la criminalité transfrontière.

Á noter que des modifications ont été apportées au règlement instituant FRONTEX en vue de tenir compte des modifications prévues au règlement EUROSUR.

Évaluation : la Commission devrait évaluer régulièrement les résultats de la mise en œuvre du règlement afin de déterminer dans quelle mesure les objectifs d'EUROSUR ont été atteints. Les rapports de mise en œuvre devraient être transmis au Parlement européen tous les 2 ans et inclure la question de savoir si le principe de non-refoulement a été respecté.

Entrée en vigueur et applicabilité : le règlement devrait s'appliquer à partir du 2 décembre 2013. La Bulgarie, l'Estonie, la Grèce, l'Espagne, la France, la Croatie, l'Italie, Chypre, la Lettonie, la Lituanie, la Hongrie, Malte, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, la Slovénie, la Slovaquie et la Finlande devraient mettre en place chacune un centre national de coordination à compter de cette date et les autres États membres à compter du 1er décembre 2014.

NB. Dans une déclaration annexée du Parlement européen, il est prévu d’insister sur la terminologie employée afin que la question des ressortissants de pays tiers dont la présence sur le territoire des États membres n'a pas été autorisée, ou ne l'est plus, soit abordée de manière neutre. Dans ce cas, les institutions européennes devraient éviter d'utiliser l'adjectif "illégal" à chaque fois qu'il est possible de trouver une autre formulation, et lui préférer l’expression "migrants en situation irrégulière".