Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI)

2015/0009(COD)

Avis n° 4/2015 de la Cour des Comptes concernant la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur le Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI) et modifiant les règlements (UE) n° 1291/2013 et (UE) n° 1316/2013.

La Cour des comptes a formulé les remarques générales suivantes sur la proposition de la Commission :

Gouvernance de l'EFSI : la proposition indique que les opérations de financement et d'investissement de la BEI couvertes par la garantie de l'Union comporteront un risque financier non négligeable et que des appels à la garantie sont probables. La Cour note cependant que  la participation majoritaire du budget de l'UE à l'EFSI n'apparaît pas dans sa structure de gouvernance.

Cadre législatif : pour éviter des failles dans la législation, la Cour estime que la gestion des instruments financiers de l'UE devrait être régie par des dispositions normalisées, ce qui permettrait de promouvoir des instruments cohérents valables pour plusieurs politiques.

Il conviendrait de justifier dûment les dérogations aux dispositions du règlement financier. En effet, bien que le règlement financier constitue le cadre juridique pour l'exécution du budget de l'UE et que ce dernier soit appelé à fournir la majorité des fonds de l'EFSI, les dispositions particulières du règlement financier ne s'appliqueront ni à la garantie apportée par l'Union à la BEI ni au fonds de garantie. Or, aucune explication satisfaisante n'est donnée pour justifier cette dérogation.

De plus, conformément à l'article 290 du TFUE, les éléments essentiels d'un acte législatif devraient rester du ressort du législateur et être couverts par le règlement lui-même. Si une délégation de pouvoir à la Commission s'avère nécessaire, elle devrait être limitée à des éléments non essentiels. Ses objectifs, son contenu, sa portée et sa durée devraient être explicitement délimités dans le règlement, afin d'assurer la transparence requise.

Obligation de rendre compte faite à la Commission : selon la Cour, il existe plusieurs sources d'inquiétude à cet égard : 1°) les dispositions en matière d'obligation de rendre compte semblent centrées sur les réalisations plutôt que sur les résultats et sur les impacts ; 2°) la proposition de la Commission n'indique pas clairement si elle entend compléter les rapports de la BEI par sa propre évaluation, ni dans quelle mesure elle inclura l'EFSI dans son rapport d'évaluation annuel sur les finances de l'Union fondé sur les résultats obtenus ; 3°) les principaux décideurs (le comité de pilotage de l'EFSI et les organes directeurs de la BEI) ne semblent soumis à aucune obligation de rendre compte devant les autorités budgétaires.

La Cour estime que la responsabilité pleine et entière de la Commission concernant l'exécution du budget de l'UE ne devrait pas être remise en cause. Une obligation de rendre compte s'inscrivant dans un cadre fragmenté diminuerait aussi inévitablement la pertinence de la procédure de décharge budgétaire de l'UE.

Mandat d'audit de la Cour des comptes européenne : la proposition de la Commission limiterait les droits d'audit de la Cour : en effet, elle semble n'inclure que les paiements et recouvrements liés à la garantie de l'Union, alors qu'elle exclut du contrôle les opérations réalisées dans le cadre de l'EFSI, les instruments/entités/mécanismes qui seront mis en place en vertu du projet de règlement sur l'EFSI, comme la plateforme européenne de conseil en investissement et le fonds de garantie de l'Union, ainsi que la gestion, par la BEI et par le FEI, des opérations de financement et d'investissement réalisées avec la garantie de l'Union.

En outre, le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne confère à la Cour le mandat de contrôler la légalité, la régularité et la bonne gestion financière de la totalité des recettes et des dépenses de l'UE.

Pour accomplir son mandat, la Cour devrait jouir d'un accès sans restriction à tout document ou toute information qu'elle juge «nécessaire à l'accomplissement de sa mission», y compris dans les locaux de toute personne physique ou morale bénéficiaire de versements provenant du budget de l'UE. La Cour devrait pouvoir définir l'étendue de ses audits. Dans ce contexte, la Commission devrait s'assurer que toutes les parties concernées par les activités entreprises en vertu du règlement sur l'EFSI soient informées du fait que la Cour a accès à toutes les informations nécessaires pour réaliser ses audits.

Passifs financiers pour les finances publiques : la proposition n'exclut pas explicitement tout passif éventuel pour le budget de l'UE au-delà des fonds engagés et ne fixe pas de plafond pour les dépenses de la BEI.

Pour que la Commission ne soit pas responsable au-delà de la garantie de l'Union (financée par le budget de l'UE), la Cour suggère de prévoir une immunité générale et des dérogations concernant les actions en justice que des bénéficiaires de l'EFSI pourraient intenter. En outre, les dépenses de la BEI effectuées au nom de l'EFSI devraient être plafonnées sans condition.

La Cour estime également qu'une attention suffisante devrait être accordée à l'impact global de l'EFSI sur la dette et le déficit publics et que cet impact devrait être évalué en fonction de critères transparents et cohérents.

Examen/révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel (CFP) : l'examen/la révision à mi-parcours du CFP devrait fournir au législateur une occasion d'évaluer les progrès accomplis par l'EFSI et de prendre toutes les mesures correctrices nécessaires. La Commission devrait alors aussi faire rapport sur l'état d'avancement de la première série de mesures adoptée en décembre 2014 pour régler la question du cadre réglementaire et supprimer les obstacles à l'investissement.

La Cour a également préconisé :

  • de donner une définition de la «capacité de prise de risque» ;
  • de préciser la forme juridique et la structure opérationnelle de la Plateforme européenne de conseil en investissement (EIAH) ;
  • d’aborder la question des dépenses de la BEI et du cofinancement par les fonds ESI ;
  • d’introduire des dispositions concernant la forme juridique et le fonctionnement du fonds de garantie de l'Union ;
  • de préciser que les évaluations prévues devraient être réalisées par des partenaires extérieurs indépendants ;
  • d’améliorer la transparence et la publication des informations en cas d’accord passé entre la Commission et la BEI.