Corps européen de garde-frontières et de garde-côtes

2015/0310(COD)

OBJECTIF : instituer un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes ainsi qu’une Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes afin d'assurer une gestion européenne intégrée des frontières extérieures de l'Union.

RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN : le Parlement européen décide conformément à la procédure législative ordinaire sur un pied d’égalité avec le Conseil.

CONTEXTE : en 2015, l'Union européenne a connu des pressions extraordinaires à ses frontières extérieures avec, selon les estimations, jusqu’à 1,5 million de franchissements irréguliers des frontières entre janvier et novembre 2015.

Les mouvements secondaires qui en ont résulté ont démontré que les structures existantes au niveau de l'Union et des États membres étaient inadéquates pour faire face aux défis que pose un afflux aussi important. Dans un espace sans frontières intérieures, la migration irrégulière à travers les frontières extérieures d'un État membre affecte tous les autres États membres dans l'espace Schengen. En conséquence, l'importance des mouvements secondaires a conduit plusieurs États membres à réinstaurer les contrôles à leurs frontières extérieures. Il en a résulté une pression considérable sur le fonctionnement et la cohérence de l'espace Schengen.

Tout au long de la crise migratoire actuelle, il est clairement apparu que l'espace Schengen sans frontières intérieures n'était viable que si les frontières extérieures étaient efficacement garanties et protégées. La solidité d'une chaîne se mesure toujours à l'aune de son maillon le plus faible. Il est donc nécessaire de réaliser une avancée décisive vers un système intégré de gestion des frontières extérieures. Cela n'est possible qu'au moyen d'une action commune de l'ensemble des États membres, conformément aux principes de solidarité et de responsabilité dont toutes les institutions de l'UE sont convenues de faire les principes directeurs de la gestion de la crise migratoire.

Le présent projet de règlement a donc pour objectif de prévoir une gestion plus intégrée des frontières extérieures de l'UE, notamment en dotant l'Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes de compétences spécifiques à cet effet pour empêcher que des lacunes dans la gestion des frontières extérieures ou des flux migratoires imprévus ne sapent le bon fonctionnement de l'espace Schengen. Il répond en outre aux appels lancés par le Parlement européen et le Conseil européen en faveur d'une gestion efficace des frontières extérieures de l'Union européenne.

CONTENU : l'objectif de la présente proposition est d’instituer un corps européen de garde-frontières et de garde-côtes chargé de la gestion intégrée des frontières, créé à partir de l’Agence FRONTEX. La future agence renforcerait le mandat accordé jusqu’ici à FRONTEX dans tous les aspects de la gestion intégrée des frontières.

Afin de refléter les modifications apportées aux compétences de FRONTEX, l'Agence serait renommée Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes et aurait les missions suivantes :

  • surveillance, analyse des risques et mise en place d’officiers de liaison : l’Agence aurait pour mission de suivre les flux migratoires à destination et à l'intérieur de l'Union européenne et d'effectuer une analyse des risques qui devrait être assurée par les États membres et couvrirait tous les aspects pertinents d'une gestion intégrée des frontières. A cet effet, des officiers de liaison de l'Agence seraient déployés dans les États membres afin que l'Agence puisse assurer une surveillance appropriée et efficace non seulement au moyen d'une analyse pertinente des risques, d'un échange d'informations et par l'intermédiaire d'Eurosur, mais aussi par sa présence sur le terrain. La tâche de l'officier de liaison serait de promouvoir la coopération entre l'Agence et les États membres et de soutenir la collecte d'informations requises par l'Agence pour effectuer l'évaluation de la vulnérabilité des frontières et de surveiller les mesures prises par les États membres aux frontières extérieures;
  • évaluation des besoins : l'Agence instaurerait des procédures d’évaluation obligatoire de la vulnérabilité afin d'évaluer la capacité des États membres à relever les défis à leurs frontières extérieures, y compris au moyen d'une évaluation des équipements et des ressources des États membres ainsi que de la planification par ces derniers des mesures d'urgence. Le directeur exécutif, sur avis d'un conseil de surveillance créé au sein de l'Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, recenserait les mesures devant être prises par l'État membre concerné et devrait fixer un délai pour l'adoption de ces mesures. La décision du directeur exécutif serait contraignante pour l'État membre concerné et, si les mesures nécessaires ne sont pas prises dans le délai prescrit, le conseil d'administration serait saisi en vue d'une nouvelle décision. Si l'État membre s'abstient toujours d'agir, risquant ainsi de mettre en péril le fonctionnement de l'espace Schengen, la Commission pourra alors adopter une décision d'exécution prévoyant une intervention directe de l'Agence;
  • opérations conjointe d’urgence : l'Agence pourra déployer des équipes européennes de garde-frontières et de garde-côtes pour des opérations conjointes et des interventions rapides aux frontières, mettre en place un parc d'équipements techniques, soutenir la Commission dans la coordination des activités des équipes d'appui à la gestion des migrations dans les zones de crise et jouer un rôle renforcé en matière de retour, d'analyse des risques, de formation et de recherche;
  • création d’une réserve d’intervention : l’Agence pourra prévoir la mise en commun obligatoire des ressources humaines par la création d'une réserve d'intervention rapide qui prendrait la forme d’un corps permanent composé d'un petit pourcentage du nombre total des garde-frontières dans les États membres, sur une base annuelle. Cette réserve d’intervention rapide serait mise à la disposition immédiate de l'Agence et pourrait être déployée à partir de chaque État membre dans un délai de 3 jours ouvrables à partir du moment où le plan opérationnel est approuvé par le directeur exécutif et l'État membre hôte. À cet effet, chaque État membre mettrait chaque année à la disposition de l'Agence un certain nombre de garde-frontières équivalent à au moins 3% du personnel des États membres sans frontières extérieures terrestres ou maritimes et à 2% du personnel des États membres ayant des frontières extérieures terrestres ou maritimes, soit un minimum de 1.500 gardes-frontières, correspondant aux profils établis par la décision du conseil d'administration;
  • gestion d’un parc commun d’équipement : il est prévu de déployer un parc d'équipements techniques propres par l'acquisition par l'Agence ou en copropriété avec un État membre, d'un parc d'équipements techniques fournis par les États membres, sur la base des besoins établis par l'Agence et en exigeant que ce parc soit acheté par les États membres dans le cadre des actions spécifiques du Fonds pour la sécurité intérieure;
  • rôle renforcé de l'Agence en matière de retour : l’Agence serait chargée de créer un «Bureau chargé des retours» dont la mission serait d'apporter aux États membres tout le renforcement opérationnel nécessaire au retour effectif des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. L'Agence coordonnerait et organiserait les opérations de retour et les interventions en matière de retour d'un ou plusieurs États membres et favoriserait leur organisation de sa propre initiative pour renforcer le système des retours des États membres qui sont soumis à une pression particulière. L'Agence devrait avoir à sa disposition des équipes de contrôleurs des retours forcés, d'escortes pour les retours forcés et de spécialistes des retours à mettre à disposition par les États membres, qui constitueraient les équipes européennes d'intervention en matière de retour à déployer dans les États membres;
  • recherche : l'Agence participerait à la gestion des activités de recherche et d'innovation pertinentes pour le contrôle des frontières extérieures, y compris l'utilisation d'une technologie de surveillance avancée telle que des systèmes d'aéronef télépiloté et l'élaboration de projets pilotes portant sur des questions couvertes par le présent règlement;
  • coopération intersectorielle : une coopération européenne aux fonctions de garde-côtes serait initiée par l'élaboration d'une coopération intersectorielle entre l'Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, l'Agence européenne de contrôle des pêches et l'Agence européenne pour la sécurité maritime pour améliorer les synergies entre ces agences, afin de fournir des services polyvalents plus efficaces et rentables aux autorités nationales exécutant des fonctions de garde-côtes;
  • coopération accrue avec les pays tiers : l’Agence renforcerait sa coordination opérationnelle avec les États membres et les pays tiers, y compris la coordination des opérations conjointes et par le déploiement d'officiers de liaison dans les pays tiers, ainsi que par la coopération avec les autorités des pays tiers en matière de retour, y compris en ce qui concerne l'acquisition de documents de voyage;
  • renforcement du mandat de l'Agence : le mandat de l’Agence en matière de traitement des données à caractère personnel serait renforcé en lui permettant également de traiter les données personnelles dans l'organisation et la coordination d'opérations conjointes, de projets pilotes, d'interventions rapides aux frontières, d'opérations de retour, d'interventions en matière de retour et dans le cadre des équipes d'appui à la gestion des migrations, ainsi que dans l'échange d'informations avec les États membres, le Bureau européen d'appui en matière d'asile, Europol, Eurojust ou d'autres agences, organes et organismes de l'Union;
  • garantie de la protection des droits fondamentaux : l’Agence assurerait enfin la mise en place d'un mécanisme de plainte pour traiter les plaintes concernant d'éventuelles violations des droits fondamentaux au cours de ses activités.

INCIDENCE BUDGÉTAIRE : l'Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, qui doit être créée à partir de l'Agence Frontex existante, serait chargée de la gestion des frontières extérieures au côté des États membres.

La subvention accordée à FRONTEX fait déjà partie du budget de l'Union.

Le budget de l'Agence pour 2015 et 2016 a été renforcé en 2015 afin de lui permettre de lutter contre la crise en matière de migration, notamment en triplant les ressources financières pour les opérations conjointes Poséidon et Triton, en élargissant l'appui de l'Agence aux États membres au domaine des retours et en accordant les ressources nécessaires pour les centres de crise.

La subvention finale de l'UE pour 2016, telle qu'adoptée par l'autorité budgétaire, s'élève à 238.686.000 EUR.

Toutefois, pour que l'Agence puisse s'acquitter de manière adéquate de ses nouvelles missions, un montant supplémentaire d'au moins 31,5 millions EUR devra être alloué à l'Agence dans le budget de l'Union en 2017.