Corps européen de garde-frontières et de garde-côtes

2015/0310(COD)

La commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures a adopté le rapport d’Artis PABRIKS (PPE, LV) sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes et abrogeant le règlement (CE) n° 2007/2004, le règlement (CE) n° 863/2007 et la décision 2005/267/CE du Conseil.

La commission parlementaire a recommandé que la position du Parlement européen adoptée en première lecture suivant la procédure législative ordinaire modifie la proposition de la Commission comme suit:

Renforcement des missions de l’Agence dans une perspective de contrôle des frontières et de sauvetage de vies : les députés appellent au renforcement des missions de l’Agence de sorte que celle-ci assure une gestion européenne intégrée des frontières extérieures de l'Union, dans le but de contrôler efficacement le franchissement des frontières extérieures et de s'attaquer aux défis migratoires et aux éventuelles futures menaces à ces frontières, en contribuant ainsi à lutter contre toute forme de criminalité grave ayant une dimension transfrontalière, et en assurant un niveau élevé de sécurité intérieure au sein de l'Union, dans le plein respect des droits fondamentaux, tout en y préservant la libre circulation des personnes.

Les missions de l’Agence viseraient entre autre à ;

  • contrôler les frontières et à prendre les mesures visant à faciliter le franchissement légal des frontières et les mesures liées à la prévention et à la détection de la criminalité transfrontalière;
  • mettre en place des opérations de recherche et de sauvetage de personnes en détresse en mer;
  • procéder à l'identification, la première information et l'orientation des personnes qui arrivent aux frontières extérieures et ont besoin, ou souhaitent faire la demande, d'une protection internationale.

La gestion européenne intégrée des frontières s’opèrerait en tant que responsabilité partagée de l'Agence et des autorités nationales chargées de la gestion des frontières, y compris les garde-côtes dans la mesure où ils exécutent des opérations de surveillance de la frontière maritime et d'autres tâches éventuelles de contrôle aux frontières. Cependant, la gestion de leur section des frontières extérieures incomberait principalement aux États membres.

Stratégie européenne de gestion intégrée des frontières : pour les députés, il incombe à la Commission de présenter une proposition législative en vue d'une stratégie de gestion européenne intégrée des frontières définissant les grandes orientations, les objectifs à atteindre et les actions prioritaires pour assurer le parfait fonctionnement de la gestion européenne intégrée des frontières extérieures de l'Union.

Coopération avec d’autres agences chargées de la surveillance des frontières maritimes: il est demandé que la coopération en matière de fonctions de garde-côtes soit renforcée de sorte que ces derniers puissent pleinement collaborer avec les autorités nationales, l'Agence européenne de contrôle des pêches et l'Agence européenne pour la sécurité maritime.

Evaluation de la vulnérabilité d’un État membre : les députés rappellent que l'évaluation de la vulnérabilité constitue une mesure préventive réalisée en continu par l'Agence, afin de compléter le mécanisme d'évaluation et de contrôle de Schengen créé conformément au règlement n° 1053/2013 du Conseil. L'évaluation de la vulnérabilité est destinée à permettre à l'Agence d'évaluer la capacité et l'état de préparation des États membres à faire face aux défis à venir, notamment aux menaces et pressions actuelles et futures aux frontières extérieures, à établir, en particulier pour les États membres exposés à des pressions spécifiques et disproportionnées, les éventuelles conséquences immédiates aux frontières extérieures et les conséquences ultérieures sur le fonctionnement de l'espace Schengen, et à évaluer leur capacité à contribuer à la réserve de réaction rapide visée au règlement. Parmi les éléments à contrôler figurent la capacité à gérer l'arrivée potentielle d'un grand nombre de personnes, dont beaucoup pourraient avoir besoin d'une protection internationale, avec humanité et dans le plein respect des droits de l’homme, et la disponibilité des équipements techniques, systèmes, moyens, ressources et infrastructures, ainsi que de personnels qualifiés pour assurer les missions de l’Agence.

L'évaluation de la vulnérabilité se baserait sur un certain nombre d’informations fournies par l'État membre et par un officier de liaison de l’Agence, sur base des informations délivrées par Eurosur.

Les résultats de l'évaluation de la vulnérabilité seraient transmis régulièrement, et au moins tous les 6 mois au Parlement européen et au Conseil

Mesure d’intervention d’urgence en cas de pression migratoire dans un État membre : à la demande d'un État membre confronté à une situation de pression présentant un caractère spécifique et disproportionné, l'Agence pourrait procéder, pour une durée limitée, à une intervention rapide aux frontières sur le territoire de cet État membre hôte. Dans cette zone dite de crise (une zone située aux frontières extérieures où un État membre est confronté à une pression migratoire importante) les différentes agences et États membres concernés devraient opérer dans le cadre de leurs mandats et de leurs compétences respectifs. Dans ce contexte, des dispositions sont prévues pour déterminer les rôles et missions des différentes agences de l’UE telles que le Bureau européen d'appui en matière d'asile, mais aussi Europol et Eurojust en coopération avec les autorités nationales pertinentes.

Mesures d’exécution assurées par le Conseil : lorsqu'un État membre ne prend pas les mesures correctives nécessaires conformément à l'évaluation de la vulnérabilité ou en cas de pression migratoire disproportionnée aux frontières extérieures, rendant le contrôle aux frontières extérieures inefficace dans une mesure risquant de mettre en péril le fonctionnement de l'espace Schengen, une réponse unifiée, rapide et efficace devrait être apportée au niveau de l'Union. À cette fin, et pour assurer une meilleure coordination au niveau de l'Union, la Commission devrait recenser les mesures à mettre en œuvre par l'Agence.

Pour l'adoption de ces mesures, compte tenu des aspects liés à la souveraineté et de leur caractère politiquement sensible, qui touchent aux compétences exécutives des États et à celles dont ceux-ci disposent en matière d'application de la législation, des compétences d'exécution devraient être conférées au Conseil, qui devrait agir sur proposition de la Commission.

Organisation des retours : l'Agence devrait apporter l'assistance nécessaire aux États membres dans l'organisation d'opérations de retour conjointes et des interventions de retour de migrants en situation irrégulière, sans examiner le fond des décisions de retour prises par les États membres et dans le plein respect des droits fondamentaux.

Il est précisé que les escortes pour les retours forcés devraient demeurer soumises aux mesures disciplinaires de leur État membre d'origine pendant tout le déroulement des opérations.

En tout état de cause, l'Agence ne devrait ni coordonner, ni organiser ou proposer elle-même des opérations de retour vers des pays tiers où l'analyse des risques a mis au jour des risques de violation des droits fondamentaux ou des manquements graves. De même, le directeur exécutif de l’Agence, en étroite coopération avec l'officier aux droits fondamentaux, devrait retirer le financement d'une opération conjointe, d'une intervention rapide aux frontières, d'un projet pilote, d'équipes d'appui à la gestion des flux migratoires ou d'une opération de retour s'il estime qu'il existe des violations graves ou susceptibles de persister des droits fondamentaux ou des obligations de protection internationale.

Respect du principe de non-refoulement : l'existence éventuelle d'un accord entre un État membre et un pays tiers n'exempte pas l'Agence ou les États membres des obligations qui leur incombent au titre du droit de l'Union et du droit international, eu égard en particulier au respect du principe de non-refoulement, lorsqu'ils savent ou sont censés savoir que les défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans ce pays tiers constituent des motifs sérieux de croire que le demandeur d'asile court un risque grave.

Respect des droits fondamentaux : le corps européen de garde-frontières et de garde-côtes devraient mener à bien leurs missions en respectant pleinement les droits fondamentaux, notamment la Charte des droits fondamentaux de l'UE, la convention relative au statut des réfugiés et les obligations relatives à l'accès à la protection internationale, en particulier le principe de non-refoulement, etc.

Étant donné que les missions de sauvetage se multiplient, l'Agence devrait en outre développer une stratégie de contrôle et de garantie de la protection des droits fondamentaux. À cette fin, elle devrait doter son officier aux droits fondamentaux des ressources humaines et financières suffisantes par rapport à son mandat et à son importance.

Ressources financières : pour garantir l'autonomie de l'Agence, celle-ci devrait être dotée d'un budget propre, alimenté pour l'essentiel par une contribution de l'Union. L'Agence devrait en outre financer l'intégralité de la formation nécessaire aux garde-frontières faisant partie de la réserve de réaction rapide prévue au règlement.

Obligation de rendre des comptes et transparence : l'Agence devrait être pleinement responsable devant le Parlement européen et le Conseil. Elle devrait être aussi transparente que possible en ce qui concerne ses activités, sans compromettre la réalisation de l'objectif de ses opérations. Elle devrait rendre publiques toutes les informations pertinentes sur l'ensemble de ses activités, et veiller à ce que le public et toute partie intéressée reçoivent rapidement des informations concernant ses travaux.

Plus globalement, l’Agence devrait adopter des règles internes selon lesquelles les membres des organes et les membres du personnel devront éviter toute situation pouvant donner lieu à un conflit d'intérêts.

Dispositions diverses : un ensemble d’amendements a été adopté pour renforcer les dispositions relatives : i) à la protection des données à caractère personnel utilisées par l’Agence, ii) au dépôt des plaintes en cas de non-respect des droits fondamentaux par le personnel de l’Agence. Ainsi s’il était démontré qu'un garde-frontière ou un expert national détaché avait violé des droits fondamentaux ou enfreint des obligations en matière de protection internationale, l'Agence devrait écarter immédiatement ce garde-frontière des activités de l'Agence ou de la réserve de réaction rapide ; iii) à la gouvernance, de sorte que le Parlement européen et le Conseil aient conjointement le charge de nommer le directeur exécutif et le directeur exécutif adjoint de l’Agence pour une durée de 5 ans.

Rapport : l'Agence devrait présenter un rapport au Parlement européen chaque année sur le nombre d'équipements techniques que chaque État membre s'est engagé à mettre à la disposition de l’Agence. Ce rapport devrait notamment dresser la liste des États membres ayant invoqué la situation exceptionnelle visée au règlement pendant l'année précédente et les motifs et informations fournis par l'État membre concerné.