Surveillance des positions budgétaires ainsi que surveillance et coordination des politiques économiques
La Commission a présenté un rapport au Conseil relatif à la mission de surveillance renforcée en Roumanie, conformément à l’article11, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1466/97.
Contexte : en raison de l’écart important observé en 2016 par rapport à son objectif budgétaire à moyen terme (OMT), la Roumanie fait l'objet d’une procédure pour écart important (PEI) depuis le printemps 2017. Son déficit structurel, qui était inférieur à 1% en 2015, a augmenté pour atteindre 2,5% du PIB en 2016, en raison de réductions significatives de la fiscalité indirecte et d’augmentations des salaires du secteur public.
En conséquence, le 22 mai 2017, la Commission a adressé un avertissement à la Roumanie et proposé au Conseil d'engager une procédure pour écart important à l'égard de cet État membre. Dans sa recommandation PEI, approuvée le 16 juin 2017, le Conseil a invité la Roumanie à prendre les mesures nécessaires pour que le taux de croissance nominal des dépenses publiques primaires nettes n’excède pas 3,3% en 2017. Cela correspond à un ajustement structurel annuel de 0,5% du PIB –l’effort minimum requis dans le cadre du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance – et se traduit par la nécessité d'adopter des mesures correctives qui, par rapport au scénario de base figurant dans les prévisions économiques du printemps 2017 de la Commission, représentent 1,8 % du PIB.
La Roumanie a fait rapport au Conseil avant le 15 octobre 2017 sur les mesures prises pour donner suite à sa recommandation. La Commission évalue actuellement le contenu de ce rapport.
La mission de surveillance renforcée de la Commission a eu lieu les 26 et 27 septembre 2017. Les membres de la mission se sont entretenus avec le ministre des finances Ionuţ Mişa, le gouverneur de la Banque nationale de Roumanie Mugur Isărescu, les membres du conseil budgétaire de la Roumanie et les membres des commissions budgétaires du parlement
roumain. Leur objectif était de prendre connaissance dans le détail des mesures budgétaires envisagées par les autorités roumaines, d’accroître la visibilité des risques budgétaires et d’encourager le respect du pacte de stabilité et de croissance. Les évolutions budgétaires et l’exécution du budget en 2017 ont également été évaluées dans le cadre de la mission.
Résultats de la mission : il semble que les autorités roumaines n’aient pas l’intention de donner suite à la recommandation PEI. Le ministre des finances a confirmé que, pour 2017, l'objectif restait un déficit nominal de 3% du PIB au maximum et qu’un ajustement structurel n’était pas une priorité. Dans la correction budgétaire 2017, adoptée par le gouvernement à la mi-septembre 2017, l’objectif de déficit nominal a été maintenu à2, 96% du PIB, malgré l'amélioration des projections macroéconomiques qui le sous-tendent. Cela laisse présumer une détérioration du déficit structurel sous-jacent par rapport au budget initial de 2017, qui prévoyait déjà une orientation budgétaire expansionniste. Le ministre des finances a fait valoir que la recommandation PEI arrivait tard dans l’année, ce qui ne laisse que peu de possibilités de mettre en œuvre l’ajustement structurel recommandé. La correction budgétaire 2017 adoptée récemment soulève également des inquiétudes quant à la qualité des finances publiques.
Le ministre des finances a annoncé deux objectifs pour 2018 :
- un objectif principal consistant à maintenir un déficit nominal de 3 % du PIB ;
- un objectif secondaire de réduction du déficit structurel de 0,5 % du PIB.
Les membres de la mission ont observé que, compte tenu de l’écart de production positif et croissant, le maintien du déficit nominal à 3 % du PIB en 2018 signifierait une détérioration de la position budgétaire structurelle.
Selon les projections de la Commission, et le scénario habituel de politiques inchangées, le déficit nominal devrait augmenter en 2018 et dépasser largement les 3 % du PIB, sous l’effet de nouvelles augmentations significatives des salaires du secteur public.
Pour arriver aux objectifs affichés en 2018, les autorités ont l’intention de :
- transférer les cotisations sociales entièrement vers les salariés afin d’atténuer l'incidence budgétaire de la loi unifiée sur les salaires. Leur intention est de relever le taux des cotisations sociales payées par les salariés sur leur rémunération brute ;
- assortir ce transfert d’une réduction à 36 % du taux global des cotisations sociales pour les salariés, les taux actuels étant de 22,75 % pour les employeurs et de 16,5 % pour les salariés, et de réduire le taux de l’impôt sur le revenu de 16 % à 12 % ou 10 %.
- Le gouvernement envisage aussi de revenir sur la réforme des retraites de 2008, qui a mis en place le deuxième pilier du système de retraites. Les autorités envisagent une réduction des transferts des cotisations sociales vers le deuxième pilier des retraites, qui, en vertu des règles du système européen des comptes (SEC), est classé en dehors du secteur des administrations publiques. Ces transferts s’élèvent à environ 0,8 % du PIB par an. Une telle mesure permettrait de réduire le déficit budgétaire sur le court terme. Toutefois, ce gain budgétaire s’estomperait sur le long terme car la réaffectation des cotisations sociales du deuxième pilier s’accompagnerait de l’obligation de verser des pensions de retraite dans le futur. En outre, ce revirement pourrait avoir des conséquences négatives pour la viabilité du système de retraites, ainsi que pour le développement des marchés de capitaux.
Selon le conseil budgétaire, le déficit structurel connaîtra une forte dégradation en 2018 et le déficit nominal dépassera le seuil de 3 % du PIB en l’absence de mesures fiscales compensatoires.