Recommandation à l'intention du Conseil et de la Commission à la suite de l’enquête sur le blanchiment de capitaux, l’évasion fiscale et la fraude fiscale
Le Parlement européen a adopté par 492 à 50, avec 136 abstentions, une recommandation à l'intention du Conseil et de la Commission à la suite de lenquête sur le blanchiment de capitaux, lévasion fiscale et la fraude fiscale.
La recommandation a noté que les Panama Papers ont ébranlé la confiance des citoyens en nos systèmes financiers et fiscaux. Il est essentiel de restaurer la confiance du public, de disposer de systèmes fiscaux justes et transparents, ainsi que de veiller à la justice fiscale et sociale.
Le Parlement a insisté sur le besoin de redéfinir le modèle fiscal européen afin de limiter la concurrence déloyale entre les États membres.
Il a déploré le nombre de cas de mauvaise administration que la commission denquête du Parlement chargée dexaminer les allégations dinfraction et de mauvaise administration dans lapplication du droit de lUnion en matière de blanchiment de capitaux, dévasion fiscale et de fraude fiscale a mis au jour en ce qui concerne lapplication du droit de lUnion.
Considérant comme regrettable que de nombreuses failles demeurent dans la législation en vigueur relative à la fraude fiscale et au blanchiment de capitaux aux niveaux européen et national, le Parlement a jugé nécessaire et urgent dappliquer entièrement et de renforcer encore la législation existante.
Même sil a salué lintensification des efforts et les progrès réalisés depuis la publication des Panama Papers pour ce qui est de la présentation de nouvelles propositions législatives visant à mettre en place des stratégies inclusives, le Parlement a regretté le manque de volonté politique de certains États membres à progresser sur la voie de réformes et de mesures dapplication qui apporteraient de réels changements.
Le Parlement a regretté que le traitement des questions de fiscalité soit régulièrement bloqué au niveau du Conseil par certains États membres. Il a réitéré son appel à la Commission à recourir à la procédure prévue à larticle 116 du traité FUE, qui autorise la modification de lexigence dunanimité au cas où la Commission constate quune disparité existant entre les dispositions législatives, réglementaires ou administratives des États membres fausse les conditions de concurrence sur le marché intérieur.
Fraude et évasion fiscales : le Parlement a souligné lurgence de disposer dune définition commune au niveau international de ce quest un centre financier offshore (CFO), un paradis fiscal, une juridiction opaque, une juridiction fiscale non coopérative et un pays à haut risque en matière de blanchiment de capitaux. Ces définitions doivent être convenues au niveau international sans préjudice de la publication immédiate de la liste noire commune de lUnion.
Le Parlement sest également réjoui du rôle prépondérant que joue la Commission dans lélaboration de critères permettant de dresser une liste commune de lUnion des pays et territoires non coopératifs en matière fiscale. Il a invité le Conseil et la Commission à mettre en place un mécanisme de révision transparent et objectif, auquel serait associé le Parlement européen, permettant de mettre à jour la liste à lavenir.
Le Parlement a demandé que des sanctions soient également appliquées aux entreprises, aux banques, aux cabinets dexpertise juridique et comptable et aux conseillers fiscaux complices des activités illégales, nuisibles ou frauduleuses de ces pays et territoires non coopératifs ou connus pour avoir facilité des montages fiscaux illégaux, nuisibles ou frauduleux dans lesdits pays et territoires.
La Commission a été appelée à :
- présenter, dici la fin de lannée 2018, un rapport évaluant les régimes fiscaux des États membres et des entités, régions ou autres structures administratives en dépendant, qui facilitent lévasion et la fraude fiscales et ont un impact potentiellement dommageable sur le marché unique ;
- présenter une proposition législative afin de garantir que les structures offshore dont le ou les bénéficiaires effectifs se trouvent dans un État membre sont soumises à des audits et à des exigences de divulgation comptable identiques à ceux requis par lentité européenne où se trouvent le ou les bénéficiaires effectifs ;
- présenter une proposition législative visant à réviser la directive relative à la coopération administrative (DAC) afin de renforcer encore la coopération fiscale entre les États membres ;
- présenter une proposition législative afin de traiter la question des conversions transfrontalières et des transferts de sièges et de prévoir des règles claires concernant le transfert du siège social dune entreprise au sein de lUnion, notamment des règles visant à lutter contre les sociétés boîtes aux lettres ;
- modifier la législation européenne afin dinterdire le versement de crédits européens à des bénéficiaires finaux ou à des intermédiaires financiers dont limplication dans lévasion fiscale ou la planification fiscale agressive a été prouvée ;
- créer un registre européen des entreprises normalisé, public et obligatoire qui permette dobtenir des informations actualisées et fiables sur les entreprises et dassurer la transparence grâce à laccès transfrontalier à des informations comparables et fiables sur les sociétés établies dans lUnion ;
- ne pas conclure daccords commerciaux avec des juridictions définies par lUnion comme des paradis fiscaux ;
- veiller à la bonne la mise en uvre de la directive antiblanchiment ;
- finaliser une évaluation de la base juridique sur laquelle pourraient se fonder déventuelles mesures futures adoptées au niveau de lUnion et, le cas échéant, à présenter une législation complète couvrant à la fois le secteur public et le secteur privé, et prévoyant notamment des instruments visant à soutenir les lanceurs dalerte afin de leur garantir une protection efficace et une aide financière suffisante ;
- créer un fonds général pour soutenir financièrement les lanceurs dalerte dont les moyens de subsistance sont menacés à la suite de la révélation de faits importants, qui serait en partie financé par les recettes issues des recouvrements et amendes.
En dernier lieu, le Parlement a insisté sur le fait que le cadre juridique actuel régissant le fonctionnement des commissions denquête du Parlement européen est obsolète et nest pas en mesure de créer les conditions nécessaires pour que le Parlement puisse véritablement exercer son droit denquête. Le Parlement sest dit déterminé à créer une commission denquête permanente, sur le modèle du Congrès américain.