État des relations politiques entre l’Union européenne et la Russie

2018/2158(INI)

La commission des affaires étrangères a adopté un rapport d’initiative de Sandra KALNIETE (PPE, LV) sur l’état des relations politiques entre l’Union européenne et la Russie.

Les députés rappellent que l’Union reste ouverte à une relation renforcée et au dialogue y conduisant et qu’elle souhaite revenir à des relations de coopération avec la Russie, lorsque les autorités russes auront respecté leurs obligations juridiques et internationales et prouvé l’engagement véritable de la Russie à rétablir la confiance rompue.

Défis et intérêts partagés

Tout en condamnant l’occupation et l’annexion illégales de la Crimée, ainsi que la violation continue par la Russie de l’intégrité territoriale de la Géorgie et de la Moldavie, les députés ont souligné que l’Union ne pouvait envisager de reprendre progressivement le cours normal de ses relations avant que la Russie ne mette pleinement en œuvre l’accord de Minsk et ne rétablisse complètement l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Étant donné que dans les circonstances actuelles, la Russie ne peut plus être considérée comme un «partenaire stratégique», les députés sont d’avis que l’accord de partenariat et de coopération devrait être reconsidéré. Ils déclarent que tout cadre pour les relations entre l’Union et la Russie devrait être fondé sur le plein respect du droit international, des principes d’Helsinki de l’OSCE, des principes démocratiques, des droits de l’homme et de l’état de droit, et permettre le dialogue en vue de relever les défis mondiaux, de renforcer la gouvernance mondiale et d’assurer l’application des règles internationales.

Les députés ont condamné l’implication de la Russie dans l’affaire Skripal et dans des campagnes de désinformation et des cyberattaques menées par les services de renseignement russes visant à déstabiliser les infrastructures de communication publiques et privées et à accroître les tensions au sein de l’Union et de ses États membres. Ils s’inquiètent des liens entre le gouvernement russe et les partis et gouvernements d’extrême droite et nationalistes populistes de l’Union, comme en Hongrie. Ils rappellent également que l’ingérence d’acteurs étatiques russes dans la campagne référendaire sur le Brexit fait actuellement l’objet d’une enquête par les autorités britanniques.

Droits de l’homme et sanctions

Les députés regrettent la détérioration significative de la situation des droits de l’homme et les restrictions généralisées et injustifiées des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique en Russie et s’inquiètent du fait que la Russie manifeste qu’elle est prête à utiliser la force militaire contre d’autres nations par des actions concrètes, notamment l’armement nucléaire avancé. Ils condamnent la répression constante du gouvernement contre la dissidence et la liberté des médias de même que les déclarations incitant à la violence contre les personnes LGBTI. Ils condamnent également les pratiques de blanchiment d’argent, les activités financières illégales et les autres moyens de guerre économique de la Russie.

Bien que la position de l’Union soit ferme et cohérente en ce qui concerne les sanctions de l’Union à l’encontre de la Russie, qui se prolongeront tant que les violations russes du droit international se poursuivront, les députés estiment que son approche en matière de politique étrangère et de sécurité de l’Union vis-à-vis de la Russie nécessite une meilleure coordination. Ils invitent les États membres, dans ce contexte, à mettre fin à leurs programmes de «visas et passeports dorés», lesquels profitent aux oligarques russes qui soutiennent souvent le Kremlin et peuvent compromettre l’efficacité des sanctions internationales.

Le rapport condamne également les activités de la Russie dans la mer d’Azov dans la mesure où elles constituent une violation du droit maritime international et des engagements internationaux de la Russie.

Domaines d’intérêt commun

Les députés rappellent leur soutien aux cinq principes directeurs de la politique de l’Union envers la Russie et demandent que le principe de l’engagement sélectif soit mieux défini. Ils recommandent  de mettre l’accent les questions liées à la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord et à la région du Nord et de l’Arctique, au terrorisme, à l’extrémisme violent, à la non-prolifération, à la maîtrise des armements, à la stabilité stratégique dans le cyberespace, à la criminalité organisée, à la migration et au changement climatique, y compris les efforts communs visant à sauvegarder le plan d’action global commun approuvé par le Conseil de sécurité des Nations unies et l’Iran et à mettre un terme à la guerre en Syrie.

Ils recommandent également de mettre fin au projet de gazoduc Nord Stream 2 qui accroît la dépendance européenne vis-à-vis de l’approvisionnement en gaz russe.

Recommandations

Le rapport plaide en faveur ;

- d’un soutien politique et financier permanent aux relations interpersonnelles en général, et, en particulier, aux militants de la société civile, aux défenseurs des droits de l’homme, aux blogueurs, aux médias indépendants, aux journalistes d’investigation, aux universitaires et personnalités publiques qui s’expriment ouvertement et aux ONG ;

- d’un accroissement des contacts interpersonnels axées sur les jeunes, d’un dialogue et une coopération renforcés entre experts, chercheurs, sociétés civiles et autorités locales de l’Union et de la Russie, ainsi que d’une intensification des échanges d’étudiants, de stagiaires professionnels et de jeunes, notamment dans le cadre d’Erasmus+ ;

- de la libération inconditionnelle de tous les défenseurs des droits de l’homme et des autres personnes détenues pour avoir exercé pacifiquement leurs droits à la liberté d’expression, de réunion et d’association ;

- d’une intensification des efforts de l’UE pour accroître leur résilience, en particulier dans les domaines de l’informatique et des médias, y compris les mécanismes de détection et de lutte contre l’ingérence dans les élections; les députés réclament l’élaboration d’un cadre juridique contraignant, tant au niveau de l’Union qu’au niveau international, pour faire face à la guerre hybride et pour permettre à l’Union de réagir fermement aux campagnes qui menacent la démocratie ou l’état de droit ;

- d’une unité plus ferme entre les États membres et une communication plus claire des lignes rouges de la part de l’Union;

- de la mise en place d’un mécanisme à l’échelle de l’Union permettant d’examiner le financement des partis politiques et de prendre des mesures en conséquence afin d’éviter que certains partis et mouvements ne soient utilisés pour déstabiliser le projet européen de l’intérieur.

Le rapport demande instamment à la Commission et au Service européen pour l’action extérieure (SEAE) de préparer sans délai une proposition législative pour une loi Magnitsky à l’échelle de l’Union (le régime mondial de sanctions de l’Union européenne en matière de droits de l’homme), qui permettrait d’imposer des interdictions de visas et des sanctions ciblées, comme le gel des avoirs et des intérêts relevant de la compétence de l’Union à l’encontre de fonctionnaires ou de personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles et qui sont responsables d’actes de corruption ou de violations graves des droits de l’homme.