État des relations politiques entre l’Union européenne et la Russie

2018/2158(INI)

Le Parlement européen a adopté par 402 voix pour, 163 contre et 89 abstentions, une résolution sur l’état des relations politiques entre l’Union européenne et la Russie.

Le Parlement a rappelé que l’Union restait ouverte à une relation renforcée et au dialogue y conduisant et qu’elle souhaite revenir à des relations de coopération avec la Russie, lorsque les autorités russes auront respecté leurs obligations juridiques et internationales et prouvé l’engagement véritable de la Russie à rétablir la confiance rompue.

Défis et intérêts partagés

Tout en condamnant l’occupation et l’annexion illégales de la Crimée, ainsi que la violation continue par la Russie de l’intégrité territoriale de la Géorgie et de la Moldavie, les députés ont souligné que l’Union ne pouvait envisager de reprendre progressivement le cours normal de ses relations avant que la Russie ne mette pleinement en œuvre l’accord de Minsk et ne rétablisse complètement l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Étant donné que dans les circonstances actuelles, la Russie ne peut plus être considérée comme un «partenaire stratégique», les députés sont d’avis que l’accord de partenariat et de coopération devrait être reconsidéré. Ils ont déclaré que tout cadre pour les relations entre l’Union et la Russie devrait être fondé sur le plein respect du droit international, des principes démocratiques, des droits de l’homme et de l’état de droit, et permettre le dialogue en vue de renforcer la gouvernance mondiale et d’assurer l’application des règles internationales.

Les députés ont condamné l’implication de la Russie dans l’affaire Skripal et ont rappelé l’ingérence d’acteurs étatiques russes dans la campagne référendaire sur le Brexit qui fait actuellement l’objet d’une enquête par les autorités britanniques. La réponse de l’Union à la campagne de propagande russe et aux attaques massives et directes de désinformation a été insuffisante et devrait être renforcée, en particulier avant les prochaines élections européennes de mai 2019. Le financement et les ressources humaines de la task force européenne East StratCom devraient en ce sens être augmentés de façon significative.

Les députés s’inquiètent également des liens entre le gouvernement russe et les partis et gouvernements d’extrême droite et nationalistes populistes de l’Union et du soutien que la Russie apporte aux régimes et pays autoritaires tels que la Corée du Nord, l’Iran, le Venezuela, la Syrie, Cuba, le Nicaragua et d’autres, ainsi que de la manière dont elle persiste à bloquer toute action internationale par l’exercice de son droit de véto au sein du Conseil de sécurité des Nations unies.

Droits de l’homme et sanctions

Les députés ont regretté la détérioration significative de la situation des droits de l’homme et les restrictions généralisées et injustifiées des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique en Russie et se sont inquiétés du fait que la Russie manifeste qu’elle est prête à utiliser la force militaire contre d’autres nations par des actions concrètes, notamment l’armement nucléaire avancé. Ils ont condamné la répression constante du gouvernement contre la dissidence et la liberté des médias de même que les déclarations incitant à la violence contre les personnes LGBTI. Ils ont également condamné  les pratiques de blanchiment d’argent, les activités financières illégales et les autres moyens de guerre économique de la Russie.

Le Parlement a souligné qu’un dialogue constructif exigeait une unité plus ferme entre les États membres et une communication plus claire des lignes rouges de la part de l’Union. Il a déclaré que l’Union devrait se tenir prête à adopter de nouvelles sanctions, y compris des sanctions individuelles ciblées et une restriction de l’accès aux finances et aux technologies, si les violations du droit international par la Russie se poursuivent. Dans ce contexte, les députés ont invité les États membres à mettre fin à leurs programmes de «visas et passeports dorés», lesquels profitent aux oligarques russes qui soutiennent souvent le Kremlin et peuvent compromettre l’efficacité des sanctions internationales.

Le Parlement a demandé instamment à la Commission et au Service européen pour l’action extérieure (SEAE) de préparer sans délai une proposition législative pour une loi Magnitsky à l’échelle de l’Union, qui permettrait d’imposer des interdictions de visas et des sanctions ciblées, comme le gel des avoirs, à l’encontre de fonctionnaires ou de personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles et qui sont responsables d’actes de corruption ou de violations graves des droits de l’homme.

Domaines d’intérêt commun

Les députés rappellent leur soutien aux cinq principes directeurs de la politique de l’Union envers la Russie et demandent que le principe de l’engagement sélectif soit mieux défini. Ils recommandent  de mettre l’accent les questions liées à la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord et à la région du Nord et de l’Arctique, au terrorisme, à l’extrémisme violent, à la non-prolifération, à la maîtrise des armements, à la stabilité stratégique dans le cyberespace, à la criminalité organisée, à la migration et au changement climatique, y compris les efforts communs visant à sauvegarder le plan d’action global commun approuvé par le Conseil de sécurité des Nations unies et l’Iran et à mettre un terme à la guerre en Syrie.

Ils suggèrent également de mettre fin au projet de gazoduc Nord Stream 2 qui accroît la dépendance européenne vis-à-vis de l’approvisionnement en gaz russe.

Recommandations

Le Parlement a plaidé, entre autres, en faveur ;

- d’un soutien politique et financier permanent aux relations interpersonnelles en général, et, en particulier, aux militants de la société civile, aux défenseurs des droits de l’homme, aux blogueurs, aux médias indépendants, aux journalistes d’investigation, aux universitaires et personnalités publiques qui s’expriment ouvertement et aux ONG ;

- d’un accroissement des contacts interpersonnels axées sur les jeunes, d’un dialogue et une coopération renforcés entre experts, chercheurs, sociétés civiles et autorités locales de l’Union et de la Russie, ainsi que d’une intensification des échanges d’étudiants, de stagiaires professionnels et de jeunes, notamment dans le cadre d’Erasmus+ ;

- de la libération inconditionnelle de tous les défenseurs des droits de l’homme et des autres personnes détenues pour avoir exercé pacifiquement leurs droits à la liberté d’expression, de réunion et d’association ;

- d’une intensification des efforts de l’UE pour accroître leur résilience, en particulier dans les domaines de l’informatique et des médias, y compris les mécanismes de détection et de lutte contre l’ingérence dans les élections;

- de la mise en place d’un mécanisme à l’échelle de l’Union permettant d’examiner le financement des partis politiques et de prendre des mesures en conséquence afin d’éviter que certains partis et mouvements ne soient utilisés pour déstabiliser le projet européen de l’intérieur.