Gel et confiscation des instruments et des produits du crime dans l'Union européenne

2012/0036(COD)

Le présent document de travail des services de la Commission présente les résultats de l'analyse effectuée par la Commission européenne des dispositions des législations des États membres relatives à la confiscation sans condamnation.

Il convient de préciser que la Commission vérifie actuellement la transposition complète de la directive 2014/42/UE relative au gel et à la confiscation des instruments et des produits du crime dans l'Union européenne dans la législation nationale des États membres. Le délai de transposition de la directive a expiré en octobre 2016, mais la directive est encore en cours de transposition dans certains États membres.

Par conséquent, le présent document de travail ne fait que décrire les régimes juridiques régissant la confiscation sans condamnation afin d'identifier les différentes approches adoptées dans ce domaine politique et de dégager les tendances. Elle ne vise pas à faire de déclarations quant à l'exhaustivité ou à la conformité de la transposition au niveau national et ne préjuge en rien d'éventuelles procédures d'infraction relatives à la directive sur la confiscation.

Typologies de confiscation sans condamnation

Aux fins de la présente analyse, les informations factuelles recueillies sont organisées selon des modèles inspirés du Guide des typologies de confiscation sans condamnation élaboré par le réseau CARIN (Camden Asset Recovery Inter-Agency Network) en 2015, qui prévoit quatre modèles :

- Modèle 1 : la confiscation classique sans condamnation s'applique lorsque la confiscation n'est pas possible sur la base d'une condamnation définitive. Bien que des poursuites aient été engagées contre un délinquant, elles ne peuvent être menées à terme, car le délinquant ne peut être traduit devant le tribunal ou condamné en raison de son décès, parce qu'il s'est enfui ou parce que le tribunal le juge inapte aux poursuites en raison de son immunité, son âge ou son état mental.

- Modèle 2 : la confiscation élargie permet la confiscation d'avoirs qui ne sont pas liés à l'infraction pour laquelle l'auteur est poursuivi. L'ordonnance de confiscation est effectivement "étendue" au-delà des avoirs liés à l'accusation, à d'autres avoirs appartenant au défendeur.

- Modèle 3 : une procédure in rem (action contre les avoirs et non contre la personne) est engagée pour confisquer les avoirs obtenus par un comportement illicite.

- Modèle 4 : le modèle de richesse inexpliquée compare les biens réels qu'une personne a acquis au revenu déclaré par cette personne afin d'identifier toute disparité entre les deux. Il n'est pas nécessaire d'établir un lien direct ou indirect avec une infraction principale.

Il ressort clairement de l'analyse que les régimes de confiscation sans condamnation de la plupart des États membres vont au-delà des exigences minimales d'harmonisation définies dans la directive sur la confiscation, mais que leur champ d'application varie considérablement :

- 25 États membres (tous sauf BG, IE et UK) recourent principalement aux procédures classiques de confiscation sans condamnation (modèle 1) ;

- 26 États membres (tous sauf EL et IE) ont étendu les régimes de confiscation (modèle 2) ;

- 13 États membres (EE, DE, EL, IT, LV, LT, LU, NL, PL, RO, SK, SL, ES) disposent également, outre les modèles classiques, de procédures de richesse in rem/ inexpliquée (modèles 3 et 4) ou ont un projet de loi prévoyant un tel régime ;

- 3 États membres (BG, IE, UK) s'appuient principalement sur des procédures relatives à la richesse réelle ou inexpliquée (modèles 3 et 4).

Si l'on considère les États membres qui ont mis en œuvre des régimes classiques de confiscation sans condamnation (modèle 1), on constate des différences de portée :

- 8 États membres couvrent la situation de maladie ou de fuite, mais aussi d'autres situations ; quatre d'entre eux (ES, HU, SE, SI) couvrent également le décès, les quatre autres (EE, PL, PT, SK) excluent le décès ;

- 7 États membres (BE, CZ, FR, LT, LU, MT, NL) ne couvrent que les cas de maladie ou de fuite ;

- 7 États membres (AT, CY, EL, FI, HR, IT, LV) couvrent les situations de décès, de maladie ou de fuite ;

- 2 États membres (DK, EL) ne couvrent que la situation de décès ;

- 1 État membre (DE) couvre tous les cas où une condamnation n'est pas possible dans le cadre d'une procédure pénale ;

- 1 État membre (RO) ne couvre que le cas de maladie du suspect ou de l'inculpé.

Défis possibles

L'un des principaux obstacles à l'introduction d'une législation sur la confiscation fondée sur la non-condamnation est le respect des droits fondamentaux. L'absence de condamnation pénale soulève des questions relatives au droit à un procès équitable, à un recours judiciaire effectif, à la présomption d'innocence ainsi qu'au droit à la propriété.

Conclusions

Les cadres juridiques des États membres en matière de confiscation sans condamnation ont subi des changements considérables au cours des dernières années.

Il est vrai que si la confiscation a récemment fait l'objet d'une plus grande attention, le taux réel est encore très faible. Le manque de données actuelles est un aspect qui devrait également être abordé. Une réflexion et des consultations plus approfondies sur cette question sont nécessaires.

Ce travail constitue une étape intermédiaire et éclairera la réponse de la Commission à l'appel lancé par le Parlement européen et le Conseil dans leur déclaration commune dans le cadre du rapport sur la transposition de la directive relative à la confiscation, qui sera présenté par la Commission à la fin 2019.