Règlement sur les exigences de fonds propres: ajustements en réponse à la pandémie de COVID-19

2020/0066(COD)

OBJECTIF : alléger temporairement les exigences de fonds propres afin de maximiser la capacité des banques à prêter et à absorber les pertes liées à la pandémie de COVID-19, tout en préservant leur résilience.

ACTE PROPOSÉ : Règlement du Parlement européen et du Conseil.

RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN: le Parlement européen décide conformément à la procédure législative ordinaire sur un pied d’égalité avec le Conseil.

CONTEXTE : le règlement (UE) nº 575/2013 du Parlement européen et du Conseil sur les exigences de fonds propres (ou «CRR») a établi, avec la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil sur les exigences de fonds propres (ou «CRD»), le cadre de réglementation prudentielle applicable aux établissements de crédit exerçant des activités dans l’Union.

Adopté à la suite de la crise financière survenue en 2007-2008 et se fondant en grande partie sur des normes internationales approuvées en 2010 par le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire (CBCB), connues sous le nom de «dispositif de Bâle III», ce cadre prudentiel a contribué à renforcer la résilience des établissements opérant dans l’Union et à mieux les préparer à faire face à d’éventuelles crises futures.

Les mesures exceptionnelles de confinement qui ont été prises face à la pandémie de COVID-19 ont entraîné un grave choc économique. Les établissements de crédit auront un rôle majeur à jouer dans la reprise mais il est probable qu’ils vont pâtir de la détérioration de la situation économique.

Les autorités compétentes ont accordé aux banques un allègement temporaire des exigences de fonds propres et de liquidités et des exigences opérationnelles, afin qu’elles puissent continuer à jouer leur rôle dans le financement de l’économie réelle en dépit d’un environnement plus difficile. Du fait de la situation exceptionnelle causée par la pandémie de COVID-19, certaines de ces règles pourraient pour l'heure être appliquées de manière plus souple, afin de permettre aux banques de se concentrer sur les prêts aux ménages et aux entreprises.

Dans le même temps, il est indispensable que les banques continuent de mesurer les risques de manière précise, cohérente et transparente pour pouvoir suivre les effets de la pandémie sur leur bilan et éviter de compromettre la résilience du secteur bancaire européen.

La présente proposition s’inscrit dans un train de mesures prises par la Commission européenne pour atténuer l'impact économique de la pandémie de COVID-19 dans toute l'Union européenne.

CONTENU : la Commission propose, à titre de solutions à court terme, d’introduire des modifications ciblées des règles prudentielles bancaires de l'UE (le règlement sur les exigences de fonds propres) afin de maximiser la capacité des banques à prêter et à absorber les pertes liées au coronavirus.

Dispositions transitoires visant à atténuer l’incidence des dispositions d’IFRS 9 sur les fonds propres réglementaires

La Commission propose d’adapter les dispositions transitoires qui permettent aux établissements de crédit d’atténuer l’incidence sur leurs fonds propres du provisionnement pour pertes de crédit attendues imposé par la norme comptable internationale IFRS 9.

L’application d'IFRS 9 durant la pandémie de COVID-19 pourrait conduire les banques à devoir augmenter brusquement et fortement leurs provisions pour pertes de crédit attendues, ce qui éroderait leur capital et donc leur capacité de continuer à accorder des prêts au moment où c’est le plus nécessaire. Afin d'atténuer ces effets négatifs potentiels, la Commission propose de prolonger de deux ans les dispositions transitoires actuelles du CRR. Ainsi, la date de référence, pour toute augmentation des provisions qui relèverait des dispositions transitoires étendues, serait déplacée du 1er janvier 2018 au 1er janvier 2020.

L’extension de la période transitoire permettrait aux banques de réintégrer pleinement dans leurs fonds propres de base de catégorie 1 toute augmentation des provisions nouvellement comptabilisées en 2020 et 2021 pour les actifs financiers non dépréciés. Le montant pouvant être réintégré de 2022 à 2024 diminuerait de façon linéaire.

Traitement plus favorable des prêts bénéficiant de garanties publiques dans le cadre du filet de sécurité prudentiel pour les prêts non performants (PNP)

Les PNP garantis par les organismes publics de crédit à l’exportation bénéficient d’un traitement préférentiel en ce qui concerne les exigences de provisionnement au titre du CRR.

Il est proposé d'étendre temporairement ce traitement préférentiel aux PNP bénéficiant d'une garantie publique dans le cadre de mesures destinées à atténuer l'impact économique de la pandémie de COVID-19, dans le respect des règles de l'Union en matière d'aides d'État. Les similitudes des garanties accordées par les organismes de crédit à l’exportation avec celles liées à la COVID-19 seraient ainsi reconnues.

Date d’application du coussin de ratio de levier

La dernière révision du CRR a instauré une exigence de coussin de ratio de levier pour les établissements d'importance systémique mondiale (EISm). Il est proposé de reporter d’un an, au 1er janvier 2023, la date d'application de cette nouvelle exigence, initialement fixée au 1er janvier 2022. Une telle mesure donnerait plus de capacité opérationnelle aux établissements de crédit et leur permettrait de se concentrer sur les défis plus immédiats liés à la pandémie de COVID-19.

Compensation de l’incidence de l’exclusion de certaines expositions du calcul du ratio de levier

Conformément au dispositif de Bâle, le CRR accorde le pouvoir discrétionnaire, dans des circonstances exceptionnelles, d'exclure temporairement du calcul du ratio de levier d'une banque les réserves que celle-ci détient auprès de la banque centrale. Les autorités compétentes peuvent accorder cette exemption pour une durée limitée à un an.

Destiné à faciliter la transmission effective des mesures de politique monétaire, ce pouvoir discrétionnaire doit entrer en application en même temps que l’exigence de ratio de levier, le 28 juin 2021. Cependant, la crise actuelle de la COVID-19 a montré que le mécanisme de compensation était trop restrictif.

Afin d'offrir une plus grande souplesse permettant d'agir lors d'éventuelles crises futures, la proposition modifie le mécanisme de compensation. Concrètement, un établissement de crédit qui exerce son pouvoir discrétionnaire ne serait tenu de calculer le ratio de levier ajusté qu’une seule fois, à savoir au moment où il exerce ce pouvoir. Le ratio de levier ajusté s’appliquerait tout au long de la période pendant laquelle le pouvoir discrétionnaire est exercé et ne varierait pas.

Autres dates d’application

La Commission propose également d’avancer les dates d’application de certains allègements des exigences de fonds propres prévues par le CRR, mais pas encore applicables, à savoir i) les dispositions relatives au traitement de certains actifs logiciels, ii) les dispositions relatives à certains prêts garantis par des pensions ou des salaires, iii) le facteur supplétif révisé pour les petites et moyennes entreprises (PME) et iv) le nouveau facteur supplétif pour le financement des infrastructures. L’objectif est de permettre aux établissements de crédit de libérer des fonds propres et de donner à leur activité de prêt un coup de fouet bien nécessaire durant la pandémie de COVID-19 et à sa suite.