Mise en oeuvre de la directive 2011/36/UE concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes

2020/2029(INI)

Le Parlement européen a adopté par 571 voix pour, 61 contre et 59 abstentions, une résolution sur la mise en œuvre de la directive 2011/36/UE concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes.

Les députés ont souligné la nécessité de mettre en place un cadre coordonné, harmonisé et cohérent au niveau de l’Union, fondé sur des mécanismes d’évaluation et de suivi plus efficaces, qui garantisse le renforcement de la prévention de la traite des êtres humains, le soutien et l’assistance aux victimes, et leur protection, et vise l’éradication totale de la traite des êtres humains.

Regrettant l’absence de données comparables et détaillées relatives à l’échelle de la traite dans toute l’UE, le Parlement a demandé aux États membres d’accroître leurs efforts et leur financement en matière de recherche, d’analyse et de collecte des données relatives à toutes les formes de traite des êtres humains.

Utilisation des médias sociaux et des technologies numériques

Le Parlement a invité la Commission et les États membres à analyser l’utilisation des technologies numériques, des médias sociaux et de l’internet en tant que principaux outils utilisés pour recruter les victimes de la traite. Il leur a demandé :

- de donner les moyens nécessaires aux services répressifs et aux organisations de la société civile dans la lutte contre la traite des êtres humains,

- d’adopter des règles de responsabilité civile pour les entreprises technologiques qui hébergent du matériel lié à l’exploitation d’êtres humains,

- d’améliorer les instruments législatifs utilisés dans les procédures judiciaires et dans les poursuites contre les trafiquants,

- de promouvoir l’échange d’informations et la coopération entre les autorités compétentes, les fournisseurs de services internet et les entreprises de médias sociaux,

- de promouvoir des campagnes d’information du public à travers l’UE sur la traite des êtres humains,

Identification, protection, assistance et soutien aux victimes

L’identification précoce des victimes reste l’un des principaux enjeux pour la mise en œuvre, et l’un des plus cruciaux en vue de permettre aux victimes d’exercer leurs droits.

Le Parlement a recommandé d’améliorer les mesures de prévention et l’identification précoce des victimes ainsi que l’accès simplifié et inconditionnel à une assistance et à la protection tout en renforçant une perspective de genre horizontale et adaptée aux enfants dans toutes les formes de traite. Il a également demandé aux États membres de répondre en particulier aux besoins des personnes LGBTI, compte tenu de leur grande vulnérabilité à la traite des êtres humains.

Traite des êtres humains en tant que crime à caractère sexiste et lutte contre la traite à des fins d’exploitation sexuelle

La résolution a souligné que 92 % des victimes de la traite sont des femmes et des filles, et que plus de 70 % des auteurs de ce crime sont des hommes.

Le Parlement a invité les États membres à adopter des mesures spécifiques pour lutter contre la violence à caractère sexiste, la violence à l’encontre des femmes et des mineurs, l’acceptation sociale de la violence et la culture de l’impunité, et contre les inégalités structurelles entre les hommes et les femmes et les stéréotypes sexistes en tant que causes premières de la traite.

Les États membres et la Commission ont été invités à i) donner la priorité à la prévention du crime de traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle, notamment au moyen de campagnes d’information, de sensibilisation et d’éducation, ii) se concentrer sur les modèles émergents de traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle, tels que la hausse de l’exploitation d’enfants et de femmes, notamment par le pédopiégeage et la sextorsion.

Traite des êtres humains dans le contexte de l’asile et de la migration

Les demandeurs d’asile, les réfugiés et les migrants, et notamment les mineurs non accompagnés et isolés, sont vulnérables face à la traite. Les femmes et les enfants se retrouvent souvent victimes d'abus sexuels sur leur route migratoire, en échange de mesures de protection et de moyens de subsistance de base.

Soulignant le très faible nombre de victimes de la traite des êtres humains enregistrées dans les procédures de protection internationale, le Parlement a invité les États membres à renforcer la fourniture aux arrivants d’informations sur leurs droits et les procédures applicables au titre de la législation de l’Union, y compris les possibilités de recevoir de l’aide par l’intermédiaire d’avocats et de médiateurs culturels afin de prévenir la traite et l’exploitation des êtres humains.

Traite des enfants

Les enfants représentent près d’un quart de toutes les victimes dans l’Union. Le Parlement a invité les États membres à garantir des mesures strictes de protection de l’enfance, la protection avant et pendant les procédures pénales, l’accès à une assistance inconditionnelle, l’indemnisation, l’absence de sanctions, l’assistance et l’aide aux membres de la famille d’un enfant victime ainsi que la prévention. Il a insisté sur l’importance de mettre en place une justice et des services spécialisés adaptés aux enfants.

Autres formes d’exploitation

Face à l’augmentation de la traite à des fins d’exploitation par le travail, les députés ont invité les inspections nationales du travail des États membres à prendre des mesures pour identifier ces pratiques et y mettre un terme. Ils ont également appelé à se concentrer sur les nouvelles formes de traite des êtres humains à des fins telles que la mendicité forcée, la criminalité forcée, la vente de bébés, le prélèvement d’organes, l’adoption illégale, l’exploitation financière par la fraude et la traite des êtres humains par le biais de la gestation pour autrui.

Recommandations

Le Parlement a invité la Commission à :

- réviser, à l’issue d’une analyse d’impact exhaustive, la directive concernant la lutte contre la traite des êtres humains afin d’améliorer les mesures de prévention, de lutte et de poursuite de toutes les formes de traite, notamment à des fins d’exploitation sexuelle, principal motif de traite des êtres humains;

- publier sans délai une stratégie particulière et spécifique de l’Union en vue de l’éradication de la traite des êtres humains afin d’éliminer en priorité la traite des êtres humains dans l’Union, au moyen d'un cadre juridique et politique global sexospécifique, adapté aux enfants et axé sur les victimes;

- analyser les effets de la pandémie de COVID-19 sur les éventuelles victimes de la traite des êtres humains.