Instrumentalisation des flux migratoires

2021/0427(COD)

OBJECTIF : faire en sorte que l'espace Schengen puisse faire face au défi de l'instrumentalisation des migrants aux frontières extérieures de l’UE.

ACTE PROPOSÉ : Règlement du Parlement européen et du Conseil.

RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN : le Parlement européen décide conformément à la procédure législative ordinaire et sur un pied d'égalité avec le Conseil.

CONTEXTE : on parle d'instrumentalisation des migrants lorsqu'un pays tiers est à l'origine de flux migratoires irréguliers vers l'UE en encourageant ou en facilitant activement le déplacement de personnes de l'extérieur de l'UE vers les frontières extérieures. L'intention manifeste du pays tiers est de déstabiliser l'Union ou un État membre, lorsque la nature de telles actions est susceptible de mettre en péril des fonctions essentielles de l'État, notamment son intégrité territoriale, le maintien de l'ordre public ou la sauvegarde de sa sécurité nationale.

Il est donc important que l'Union et ses États membres soient dotés des outils juridiques nécessaires pour faire face à toute instrumentalisation future des migrants et y répondre rapidement.

CONTENU : cette proposition de règlement prévoit des règles spécifiques qui peuvent être appliquées par un Etat membre dans une situation d'instrumentalisation des migrants lorsque cela est nécessaire pour répondre à une telle situation. Elle accompagne la proposition de mise à jour des règles de gouvernance de l'espace Schengen et s'appuie sur la proposition de la Commission relative à des mesures temporaires de gestion de la situation à la frontière extérieure avec la Biélorussie.

La proposition prévoit notamment les mesures suivantes :

Procédure de gestion des migrations et de l'asile en situation d'urgence

La proposition prévoit que l'État membre confronté à une situation d'instrumentalisation des migrants peut prolonger jusqu'à quatre semaines le délai d'enregistrement des demandes de protection internationale pour les ressortissants de pays tiers ou les apatrides appréhendés ou trouvés à proximité de la frontière extérieure avec le pays tiers qui instrumentalise les migrants à l'occasion d'un passage non autorisé ou après s'être présentés aux points de passage frontaliers. Seraient enregistrées en priorité les demandes présentées par des mineurs non accompagnés, ainsi que par des mineurs et leur famille.

Cette procédure permettrait aux États membres d'appliquer la procédure d'asile à la frontière pour statuer sur toutes les demandes, à l'exception des cas médicaux. La durée maximale de la procédure de gestion de l'asile d'urgence serait de 16 semaines.

Conditions matérielles d’accueil

La proposition étend la possibilité de fixer des conditions d'accueil matérielles différentes dans une situation d'instrumentalisation des migrants, à condition que les besoins fondamentaux soient couverts, notamment un abri temporaire, de la nourriture, de l'eau, des vêtements, des soins médicaux adéquats, une assistance aux personnes vulnérables, dans le plein respect du droit à la dignité humaine. L'État membre concerné devrait garantir l'accès et permettre la fourniture d'une aide humanitaire par les organisations humanitaires en fonction des besoins.

Mesures de soutien et de solidarité

La proposition prévoit la possibilité pour un État membre de demander des mesures de soutien et de solidarité à d'autres États membres. L'État membre concerné devrait envoyer une demande à la Commission pour solliciter des mesures de soutien et de solidarité auprès d'autres États membres. En outre, en ce qui concerne le soutien opérationnel, un État membre confronté à une situation d'instrumentalisation pourrait demander l'aide du Bureau européen d’appui en matière d’asile, de Frontex ou d'Europol, conformément à leur mandat.

Procédure d'urgence pour la gestion des retours

Dans une situation d'instrumentalisation des migrants, les États membres concernés doivent disposer  des outils juridiques nécessaires pour assurer un retour rapide des personnes qui ne remplissent pas les conditions requises pour bénéficier d'une protection internationale. La proposition prévoit donc la possibilité de déroger à la proposition de règlement relatif à la procédure d'asile et à l'application de la proposition de directive «retour» refondue en ce qui concerne les ressortissants de pays tiers ou les apatrides dont la demande de protection internationale a été rejetée sur la base d’une procédure d'urgence pour la gestion des retours.

Garanties

La proposition prévoit également des garanties spécifiques, notamment en ce qui concerne le respect du principe de non-refoulement, en tenant compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, de la vie familiale et de l'état de santé des ressortissants de pays tiers et des apatrides, ainsi qu'en ce qui concerne la limitation du recours aux mesures coercitives, le report de l'éloignement, les soins de santé d'urgence, les besoins des personnes vulnérables et les conditions de détention, tout en garantissant pleinement les droits fondamentaux de ces personnes.

Implications budgétaires

En raison de la nature de cette proposition, il n'est pas possible d'estimer a priori l'impact budgétaire éventuel. Tous les coûts découlant de la mise en œuvre de la proposition seront pris en compte dans le budget des instruments de financement de l'UE existants au cours de la période 2021-2027 dans le domaine de la migration et de l'asile. En cas de nécessité exceptionnelle, les mécanismes de flexibilité prévus par le cadre financier pluriannuel actuel au titre du règlement (UE, Euratom) 2020/2093 du Conseil pourraient être utilisés.