Définition des infractions pénales et des sanctions applicables en cas de violation des mesures restrictives de l’Union

2022/0398(COD)

OBJECTIF : garantir des définitions communes pour les infractions liées à la violation des mesures restrictives de l’Union et la disponibilité de sanctions pénales efficaces, dissuasives et proportionnées pour les infractions graves liées à la violation des mesures restrictives de l’Union.

ACTE PROPOSÉ : Directive du Parlement européen et du Conseil.

RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN : le Parlement européen décide conformément à la procédure législative ordinaire et sur un pied d'égalité avec le Conseil.

CONTEXTE : les mesures restrictives de l’Union, telles que les mesures concernant le gel de fonds et de ressources économiques, les interdictions de mise à disposition de fonds et de ressources économiques, les interdictions d’entrée ou de transit sur le territoire d’un État membre, ainsi que des mesures économiques sectorielles et les embargos sur les armes, constituent un outil essentiel pour la promotion des objectifs de la politique étrangère et de sécurité commune, tels qu’ils sont énoncés à l’article 21 du traité sur l’Union européenne.

Parmi ces objectifs figurent la sauvegarde des valeurs, de la sécurité, de l’indépendance et de l’intégrité de l’Union, la consolidation et le soutien de la démocratie, de l’État de droit, des droits de l’homme et des principes du droit international, ainsi que la préservation de la paix internationale, la prévention des conflits et le renforcement de la sécurité internationale, conformément aux buts et aux principes de la charte des Nations unies.

Actuellement, plus de 40 séries de mesures restrictives sont d’application dans l’UE. Certaines d’entre elles mettent en œuvre des mesures restrictives adoptées par les Nations unies; d’autres sont adoptées de manière autonome par l’Union.

Si l’adoption de mesures restrictives de l’Union s’est intensifiée au cours des dernières décennies, il en a été de même de l’élaboration de mécanismes visant à les contourner. La Commission a relevé une application incohérente des mesures restrictives et le fait que cela nuit à leur efficacité et entrave la capacité de l’Union à s’exprimer d’une seule voix. S’exprimer d’une seule voix est devenu particulièrement urgent dans le contexte actuel de l’agression militaire russe contre l’Ukraine.

En l’absence d’harmonisation au niveau de l’UE, les systèmes nationaux diffèrent considérablement en ce qui concerne l’incrimination de la violation du droit de l’UE sur les mesures restrictives de l’Union. Les systèmes de sanctions diffèrent aussi sensiblement selon les États membres, de même que les amendes maximales pouvant être infligées (qui vont de 1200 EUR à 5 millions d’EUR).

Dans la pratique, très peu d’individus ou de personnes morales responsables de violations des mesures restrictives de l’Union doivent effectivement répondre de leurs actes. Dans de nombreux États membres, la priorité accordée aux enquêtes et aux poursuites concernant la violation des mesures restrictives de l’Union est insuffisante.

Dans ce contexte, à la suite d’une proposition de la Commission européenne présentée le 25 mai 2022, le Conseil a décidé de désigner la violation des mesures restrictives de l’Union en tant que domaine de criminalité qui remplit les critères énoncés à l’article 83, paragraphe 1, du TFUE. Cela a ouvert la possibilité pour la Commission d’adopter la présente proposition de directive, qui vise à rapprocher les définitions des infractions et des sanctions pénales en matière de violation des mesures restrictives de l’Union.

CONTENU : la présente proposition a pour objectif directive d’établir des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions en cas de violation des mesures restrictives de l’Union. Elle vise à: i) rapprocher les définitions des infractions pénales liées à la violation des mesures restrictives de l’Union; ii) instituer des types et des degrés de sanctions efficaces, dissuasifs et proportionnés pour les infractions pénales liées à la violation des mesures restrictives de l’Union; iii) encourager les enquêtes et les poursuites transfrontières; et iv) améliorer l’efficacité opérationnelle des chaînes répressives nationales afin de favoriser les enquêtes, les poursuites et les sanctions.

Les principaux éléments de la proposition sont les suivants:

1) Une liste des infractions pénales violant les sanctions de l’UE, telles que:

- mettre des fonds ou des ressources économiques à la disposition d’une personne, d’une entité ou d’un organisme désigné ou à son profit;

- ne pas geler ces fonds;

- permettre l’entrée de personnes désignées sur le territoire d’un État membre ou leur transit par le territoire d’un État membre;

- conclure, avec des pays tiers, des transactions qui font l’objet d’une interdiction ou de restrictions dans le cadre des mesures restrictives de l’UE;

- échanger des biens ou des services dont l’importation, l’exportation, la vente, l’achat, le transfert, le transit ou le transport font l’objet d’une interdiction ou de restrictions;

- exercer des activités financières qui font l’objet d’une interdiction ou de restrictions; ou

- fournir d’autres services faisant l’objet d’une interdiction ou de restrictions, tels que des services de conseil juridique, des services de confiance et des services de conseil fiscal;

- le contournement d’une mesure restrictive de l’UE : sont visés le contournement ou la tentative de contournement des mesures restrictives en dissimulant des fonds ou en dissimulant le fait qu’une personne est le propriétaire final des fonds.

2) Des normes minimales en matière de sanctions pénales : en ce qui concerne les personnes physiques, la proposition exige que les États membres établissent des niveaux et des types de sanctions spécifiques pour les infractions pénales liées à la violation des mesures restrictives de l’Union. La catégorisation proposée reflète la gravité des infractions. Un seuil monétaire de 100.000 EUR est fixé pour distinguer les infractions plus graves qui devraient être passibles d’une peine maximale d’emprisonnement d’au moins 5 ans.

La proposition énonce également les sanctions applicables aux personnes morales impliquées dans les infractions pénales liées à la violation des mesures restrictives de l’Union. Les entreprises pourraient être passibles de sanctions correspondant à 5% au moins du chiffre d’affaires mondial total réalisé par l’entreprise au cours de l’exercice fiscal précédant la décision infligeant une amende.

En outre, la proposition :

- érige en infraction pénale le fait d’inciter à commettre toute infraction pénale liée à la violation des mesures restrictives de l’Union ou de s’en rendre complice;

- établit les circonstances aggravantes et atténuantes qu’il convient de prendre en considération lors de l’application de sanctions;

- prévoit des dispositions relatives à la compétence afin de garantir que les États membres établissent leur compétence pour traiter des infractions visées par la proposition;

- établit des dispositions relatives aux délais de prescription afin de permettre aux autorités compétentes, pendant un certain délai, d’enquêter sur les infractions pénales visées par la présente proposition, de les poursuivre et de les juger;

- traite de la protection des lanceurs d’alerte qui communiquent des informations ou fournissent des éléments de preuve dans le cadre d’une enquête pénale relative à la violation de mesures restrictives de l’Union;

- impose aux autorités des États membres, à Europol, à Eurojust, au Parquet européen et à la Commission, dans les limites de leurs compétences respectives, de coopérer dans le cadre de la lutte contre les infractions pénales visées.