Révision du mécanisme de suspension des visas

2023/0371(COD)

OBJECTIF : modifier le mécanisme de suspension de l’exemption de visa.

ACTE PROPOSÉ : Règlement du Parlement européen et du Conseil.

RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN : le Parlement européen décide conformément à la procédure législative ordinaire et sur un pied d'égalité avec le Conseil.

CONTEXTE : l’exemption de visa apporte des avantages appréciables à l’UE et à ses partenaires dans le monde entier. Elle stimule le secteur des voyages et du tourisme et favorise les échanges culturels et universitaires. En 2019, le nombre de voyageurs qui se sont déplacés entre l’UE et les pays tiers exemptés de visa s’élevait à 364,8 millions, soit 7% de plus qu’en 2018.

Cependant, le suivi par la Commission des régimes d’exemption de visa de l’UE, notamment les rapports qu’elle établit dans le cadre du mécanisme de suspension de l’exemption de visa, a révélé que cette exemption pouvait aussi être source d’importants problèmes en matière de migration et de sécurité.

Le mécanisme de suspension, établi par le règlement (UE) 2018/1806, est destiné à prévenir l’utilisation abusive du régime d’exemption de visa. Ce mécanisme permet la suspension temporaire de l’exemption de visa en cas d’accroissement soudain et substantiel de la migration irrégulière ou des risques pour la sécurité. Cependant, compte tenu des problèmes croissants que pose la migration irrégulière ainsi que des menaces pesant sur la sécurité de l’UE, il est devenu manifeste que ce mécanisme devait encore être renforcé et amélioré.

CONTENU : afin de remédier efficacement aux multiples problèmes que pose le régime d’exemption de visa dans un contexte géopolitique en constante évolution, la présente proposition vise à adapter le mécanisme de suspension à ces problèmes, en modifiant les dispositions pertinentes figurant à l’article 8 du règlement (UE) 2018/1806.

La révision proposée comprend plusieurs modifications de fond. Concrètement, la proposition:

- définit le mécanisme de suspension temporaire. Elle prévoit que le mécanisme de suspension peut être déclenché par une notification d’un État membre à la Commission ou par la Commission elle-même, sur la base de sa propre analyse;

- précise que, dans les cas où un accord d’exemption de visa de court séjour entre l’Union et un pays tiers figurant sur la liste de l’annexe II comporte des dispositions prévoyant des motifs ou des procédures de suspension différents, ces dispositions doivent être appliquées en lieu et place des dispositions pertinentes du règlement;

- établit les conditions et la procédure de suspension : la proposition énonce et modifie tous les motifs et seuils de suspension de l’exemption de l’obligation de visa. Les motifs de suspension de l’exemption de visa sont notamment i) un accroissement de la migration irrégulière, ii) un accroissement du nombre de demandes d’asile infondées, iii) une diminution de la coopération en matière de réadmission et d’autres cas de non-coopération en matière de réadmission, et iv) le non-respect des critères de libéralisation du régime des visas;

- élargit le motif de suspension lié à l’ordre public et à la sécurité de manière à inclure explicitement les menaces pour l’ordre public et la sécurité des États membres qui découlent de menaces hybrides, telles que les situations d’instrumentalisation étatique des migrants visant à déstabiliser ou à affaiblir la société et les principales institutions;

- introduit un nouveau motif de suspension, spécifique aux programmes de citoyenneté par investissement qui sont actuellement appliqués par plusieurs pays tiers («passeports dorés»). L’Union devrait avoir la possibilité, après une analyse de la Commission, de suspendre l’exemption de visa à l’égard d’un pays tiers qui choisit d’appliquer un programme de citoyenneté par investissement permettant d’octroyer la citoyenneté en échange de paiements ou d’investissements prédéterminés, en l’absence de tout lien réel avec le pays tiers concerné;

- ajoute nouveau motif de suspension pour le cas où le défaut d’alignement de la politique des visas d’un pays tiers figurant sur la liste de l’annexe II, sur la politique de l’Union en matière de visas, pourrait conduire à des situations dans lesquelles des ressortissants de pays tiers, autres que ceux dudit pays tiers, arrivent légalement sur son territoire pour entrer ensuite de manière irrégulière sur le territoire des États membres;

- introduit la possibilité pour la Commission d’envisager différents seuils lorsqu’elle décide s’il faut suspendre une exemption de visa en cas d’accroissement substantiel de la migration irrégulière, des demandes d’asile infondées ou des infractions pénales graves commises par des ressortissants de ce pays tiers, après une évaluation au cas par cas;

- fixe la procédure et les conditions de notification par un État membre à la Commission lorsqu’il est confronté à une ou plusieurs circonstances qui constituent un motif de suspension, ainsi que la procédure d’examen d’une telle notification par la Commission;

- modifie la période de référence pour établir l’existence des circonstances susceptibles d’entraîner la suspension. Cette période de référence est modifiée pour couvrir au moins une durée de deux mois;

- énonce l’obligation de la Commission de contrôler régulièrement l’existence des motifs de suspension à l’égard de tous les pays tiers énumérés à l’annexe II, ainsi que la procédure pour déclencher le mécanisme de suspension sur la base de sa propre analyse de l’existence de tels motifs;

- introduit la possibilité pour la Commission de faire rapport sur tout pays exempté de l’obligation de visa figurant sur la liste de l’annexe II, soit de sa propre initiative, soit à la demande du Parlement européen ou du Conseil;

- modifie la procédure de suspension déclenchée par voie d’acte d’exécution et par voie d’acte délégué, en portant la durée de la suspension temporaire de l’exemption de visa de 9 mois à 12 mois (pour la première phase) et de 18 mois à 24 mois (pour la deuxième phase);

- introduit une procédure d’urgence, qui permettrait à la Commission de suspendre une exemption de visa en adoptant un acte d’exécution immédiatement applicable, lorsqu’elle estime qu’il existe des raisons d’urgence impérieuses requérant une prompte action qui ne pourrait être assurée dans le cadre de la procédure ordinaire.