Relations UE-Chine

2023/2127(INI)

Le Parlement européen a adopté par 529 voix pour, 47 contre et 40 abstentions, une recommandation au Conseil et au vice-président de la Commission/haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité concernant les relations UE-Chine.

La République populaire de Chine (RPC) est à la fois un partenaire de l’Union et un rival systémique et concurrent de plus en plus redoutable. La politique de l’Union à l’égard de la Chine doit continuer à être régie par le principe consistant, dans la mesure du possible, à coopérer et, si cela s’avère nécessaire, à entrer en concurrence avec elle, voire à lui faire front.

Le gouvernement chinois est en train de renforcer son rôle et son influence au sein des institutions internationales et il a non seulement l’intention de remodeler l’ordre international fondé sur des règles mais aussi les moyens économiques, technologiques et militaires pour y parvenir. Le parti communiste chinois (PCC) au pouvoir ne partage pas les valeurs des démocraties européennes. Il est de plus en plus autoritaire à l’échelon national et il promeut, sur la scène internationale, des modèles de gouvernance incompatibles avec les valeurs de l’Union.

La coopération avec la Chine est importante pour relever les défis mondiaux. Toutefois, face à une Chine de plus en plus affirmée, l’Union ne peut défendre ses intérêts et ses valeurs de façon crédible qu’en adoptant une approche unifiée, commune et déterminée et en restant cohérente avec sa ligne politique.

Pour défendre ses valeurs fondamentales et être traitée comme un partenaire à part entière, l’Europe doit adopter une nouvelle approche à l’égard de la Chine qui soit fondée sur l’autonomie stratégique ouverte de l’Europe, la réciprocité ainsi que la coopération avec des partenaires partageant les mêmes valeurs, mais aussi se doter des instruments législatifs et non législatifs nécessaires pour se défendre contre la coercition.

La stratégie actuelle pour les relations entre l'UE et la Chine date de 2016 et a été mise à jour pour la dernière fois en 2019. Il serait donc souhaitable de la revoir et de l'actualiser à la lumière du nouveau contexte géopolitique. Le Parlement adresse dès lors au Conseil et au vice-président de la Commission/haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité les recommandations suivantes :

Mobiliser la Chine à relever les défis mondiaux

- continuer à coopérer de manière pragmatique avec la Chine pour relever les défis mondiaux tels que le changement climatique, la protection de la biodiversité, les problèmes de santé humaine et la préparation aux pandémies, la sécurité alimentaire, la réduction des risques de catastrophes, l'allégement de la dette des pays du Sud, la stabilité financière et l'aide humanitaire, et renforcer le dialogue effectif avec la Chine et les partenaires partageant les mêmes valeurs sur les questions de sécurité, au vu du rôle de plus en plus important que joue la Chine en matière de paix et de sécurité dans le monde, compte tenu notamment de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine ainsi que d’autres conflits régionaux (péninsule coréenne, Moyen-Orient);

- exiger de la Chine qu'elle respecte l'ordre international fondé sur des règles, en particulier les principes universels des droits de l'homme;

- réaffirmer que la Chine, en tant que premier émetteur mondial de carbone, doit respecter ses propres promesses et agir conformément à l'Accord de Paris en plafonnant ses émissions de CO2 avant 2030 et en participant, proportionnellement à sa puissance économique, aux efforts visant à soutenir financièrement les pays plus pauvres touchés par les conséquences négatives du changement climatique dans le cadre du fonds pour les pertes et dommages;

- apporter une réponse appropriée aux efforts toujours plus importants de la Chine qui visent à modifier l’ordre multilatéral fondé sur des règles au moyen d’instruments tels que le groupe de pays BRICS ou l’initiative «une ceinture, une route».

S'opposer aux violations des droits de l'homme commises par la Chine

- insister sur le fait que la Chine devra répondre de ses violations croissantes des droits de l'homme;

- élaborer une stratégie de l’Union en faveur des droits de l’homme en Chine qui soit axée sur les résultats et garantir une réaction unifiée de l’Union européenne lorsque la Chine exerce une pression économique pour faire taire les voix dénonçant les violations des droits de l’homme qu’elle commet;

- condamner le recours à la peine de mort (le nombre total estimé d'exécutions en Chine dépasse celui de tous les autres pays appliquant la peine capitale en 2022);

- annuler toutes les mesures qui défavorisent les minorités ou leur font subir des préjudices, telles que le travail forcé et la rééducation politique, y compris la détention arbitraire et discriminatoire de membres de la communauté ouïgoure et d’autres groupes à prédominance musulmane;

- s'attaquer au recours systématique au travail forcé par la Chine au Xinjiang et au Tibet en collaborant avec le secteur privé pour diversifier les chaînes d'approvisionnement;

- suivre de près les procès des prisonniers politiques à Hong Kong et demander leur libération;

- s’employer à contrer l’ingérence étrangère et mettre en œuvre les recommandations et les initiatives suggérées dans plusieurs résolutions du Parlement européen relatives à l’ingérence étrangère dans tous les processus démocratiques de l’Union, y compris la désinformation;

- évaluer le statut d'autonomie de Hong Kong et de Macao à la lumière de la loi sur la sécurité nationale, qui devrait être abrogée.

Réduire les risques vis-à-vis de la Chine pour garantir l’autonomie stratégique ouverte de l’Europe

- travailler en étroite collaboration pour favoriser l'unité des approches des États membres à l'égard de la Chine et renforcer l'autonomie stratégique de l'UE afin que l'Europe soit en mesure de défendre ses valeurs et ses intérêts économiques, ainsi que l'ordre mondial fondé sur des règles;

- faire progresser l'objectif déclaré de l'UE de réduire les risques liés aux flux commerciaux avec la RPC afin de renforcer l'autonomie stratégique ouverte de l'UE sans viser le découplage ou le repli sur soi;

- œuvrer en faveur d'une approche plus coordonnée de la protection des infrastructures critiques au niveau de l'UE afin de limiter le contrôle exercé par la Chine, en contrant les actes de tactique hybride tels que les cyberattaques, les campagnes de désinformation, la surveillance de la diaspora chinoise et l'espionnage provenant de la Chine et se déroulant au sein de l'Union européenne;

- maintenir la politique d'engagement de l'UE vis-à-vis de Taïwan afin d'intensifier la coopération et de continuer à soutenir la démocratie dans ce pays;

- tirer pleinement parti de la stratégie Global Gateway pour intensifier l'engagement de l'UE dans les efforts de développement mondiaux et les relations commerciales avec les partenaires des pays en développement, afin d'offrir une alternative aux stratégies d'investissement étranger pilotées par la Chine;

- intensifier la coopération avec les institutions financières internationales et le secteur privé afin de mobiliser les fonds nécessaires;

- mettre pleinement en œuvre les lignes directrices de la «boîte à outils de sécurité 5G» de l'UE pour atténuer les risques de sécurité dans les réseaux, et proposer des normes de sécurité supplémentaires pour les fournisseurs chinois de 5G. Les députés ont salué la décision des institutions de l'UE et des institutions de plusieurs États membres de l'UE de suspendre l'application TikTok sur les appareils d'entreprise, ainsi que sur les appareils personnels inscrits dans les services d'appareils mobiles des institutions.