Résolution sur la nécessité du soutien de l'Union en faveur d'une transition et d'une reconstruction justes en Syrie
Le Parlement européen a adopté par 462 voix pour, 76 contre et 106 abstentions, une résolution sur la nécessité d'un soutien de l'UE à une transition juste et à la reconstruction en Syrie.
Le texte adopté en plénière a été déposé par les groupes PPE, S&D, ECR, Renew et Verts/ALE.
En premier lieu, le Parlement a salué le courage, la dignité et la résilience du peuple syrien, qui a finalement réussi à renverser la cruelle dictature d'Assad. Il a appelé l'UE à saisir cette opportunité historique pour soutenir une transition politique dirigée par les Syriens afin d'unifier et de reconstruire le pays, et pour aider la Syrie à mettre en uvre sa reconstruction et à réaliser une transition politique juste et inclusive. Toutefois, les députés restent préoccupés par le degré élevé d'instabilité, tant en Syrie que dans la région. Ils estiment que la stabilité en Syrie viendra d'une transition politique pluraliste incluant des représentants crédibles de toutes les composantes de la société syrienne et de toutes les zones géographiques, c'est-à-dire toutes les communautés religieuses et ethniques, les femmes, la société civile et les forces d'opposition pacifiques.
Le gouvernement intérimaire syrien dirigé par Ahmed al-Sharaa est invité à élaborer une feuille de route exposant son plan pour mener à bien le processus de transition politique et à améliorer la transparence à l'égard des citoyens syriens. Toutefois, les députés ont exprimé un optimisme prudent quant au comportement des autorités intérimaires en matière de liberté de religion et les ont encouragées à mettre en uvre de nouvelles mesures de confiance.
Profondément préoccupé par la fragilité de la situation sécuritaire en Syrie, en particulier dans la zone côtière, le Parlement a exhorté le gouvernement intérimaire à veiller à ce que toutes les nominations militaires et de sécurité soient strictement fondées sur les qualifications professionnelles, le respect des droits de l'homme et du droit international humanitaire, et l'engagement à lutter contre le terrorisme. Il a également exprimé sa préoccupation concernant la présence de combattants extrémistes étrangers, y compris des citoyens européens, parmi les forces qui ont renversé le régime d'Assad, et a mis en garde contre leur intégration permanente dans l'appareil de sécurité syrien.
Financement et sanctions
L'UE est invitée à accroître son soutien financier, en particulier aux organisations de la société civile syrienne qui s'adaptent à des conditions de fonctionnement changeantes, en mettant l'accent sur la promotion du dialogue civique, notamment entre les communautés ethniques, culturelles et religieuses, afin de favoriser le pluralisme, la coexistence pacifique et la confiance au sein de la société syrienne.
La résolution salue la suspension progressive et conditionnelle des sanctions dans certains secteurs économiques et la prorogation illimitée des exemptions humanitaires en Syrie. Elle note toutefois que les politiques de sanctions de l'UE, des États-Unis et du Royaume-Uni restent un obstacle aux efforts de reconstruction. Le Parlement appelle la Commission et le Conseil à sadresser aux autres pays qui imposent des sanctions à la Syrie, en particulier les États-Unis et le Royaume-Uni, et à soutenir une levée totale et réversible des sanctions sectorielles, en particulier dans le secteur financier, afin de fournir une bouée de sauvetage à l'économie syrienne. Les députés soulignent le problème de la surconformité due aux sanctions étendues des États-Unis et du Royaume-Uni, et demandent instamment à la Commission et aux États membres de fournir aux entreprises et aux banques européennes des garanties juridiques pour contrer ce problème. Ils insistent sur le maintien des sanctions individuelles à l'encontre du personnel militaire, des fonctionnaires et des entités liées à la famille Assad.
Avec 7 millions de personnes déplacées à l'intérieur du pays et 90% de la population syrienne vivant dans la pauvreté, le Parlement a salué l'annonce de la Commission d'allouer 235 millions d'euros de nouvelle aide humanitaire aux Syriens et a appelé l'UE et ses États membres à soutenir les efforts d'aide humanitaire et de développement et à maintenir le soutien financier aux pays voisins qui accueillent des réfugiés syriens. Il a également invité l'UE à explorer les possibilités d'utiliser les avoirs gelés du régime Assad pour un fonds fiduciaire destiné à la reconstruction de la Syrie, à la réhabilitation et à l'indemnisation des victimes. Les députés sont préoccupés par la suspension de tous les financements de l'USAID liés à la Syrie ou aux réfugiés syriens et par la non-participation prévue des États-Unis à la prochaine conférence de Bruxelles.
Reconstruction et réinstallation
La résolution salue la décision prise par la France de permettre aux réfugiés de rentrer en Syrie et de participer à sa reconstruction sans mettre en péril leur statut, y compris pour y effectuer des visites de reconnaissance. Elle appelle les États membres et les pays tiers à reproduire d'urgence cette initiative. La Commission est invitée à encourager et à fournir aux États membres des orientations et des bonnes pratiques sur la mise en uvre de la législation de l'UE sur cette question, y compris en ce qui concerne la différence entre «voyage» et «ré- établissement». Le Parlement a insisté sur le fait que toutes les demandes de statut d'asile et les renouvellements doivent faire l'objet d'un examen individuel et approfondi.
Soutien de Téhéran et de Moscou
Le Parlement invite la Syrie à se libérer de ses alliances notoires de longue date avec Téhéran et Moscou, qui ont causé des souffrances au peuple syrien et déstabilisé le Moyen-Orient et au-delà. Il a également appelé les autorités syriennes intérimaires à mettre fin à la présence militaire russe en Syrie. Les députés condamnent également la Russie pour avoir accueilli Bachar el-Assad et sa famille et les avoir protégés de la justice, après avoir fait obstruction à la justice en interférant activement dans les enquêtes internationales et en opposant son veto aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies visant à lutter contre les crimes de guerre du régime.
La résolution demande à l'Iran de cesser toute activité visant à torpiller les efforts politiques et économiques du gouvernement intérimaire syrien et à modifier par la force le statu quo.
Les députés ont mis en garde contre le risque grave qu'un désengagement soudain des États-Unis dans la région ferait peser sur la sécurité internationale dans ce contexte incertain. Ils ont réitéré leur appel aux Etats membres pour qu'ils rapatrient tous leurs ressortissants.
Enfin, le Parlement a condamné les politiciens européens, y compris les membres actuels et anciens du Parlement, qui ont diffusé à plusieurs reprises des récits pro-Assad et se sont activement engagés à blanchir la dictature sanglante. Il a exprimé sa profonde inquiétude concernant l'invitation récente, par l'intergroupe du Parlement sur les chrétiens au Moyen-Orient, d'organisations étroitement liées aux Assadistes visés par des sanctions de l'UE.