Sécurité et santé au travail: exposition des travailleurs aux rayonnements optiques
OBJECTIF : fixer des prescriptions minimales harmonisées en matière de protection des travailleurs contre les risques résultant d'une exposition aux rayonnements optiques artificiels (comme les lampes UV, rayonnement laser, etc.).
ACTE LÉGISLATIF : Directive 2006/25/CE du Parlement européen et du Conseil relative aux prescriptions minimales de sécurité et de santé relatives à l'exposition des travailleurs aux risques dus aux agents physiques (rayonnements optiques artificiels) (19ème directive particulière au sens de l'article 16, paragraphe 1, de la directive 89/391/CEE).
CONTEXTE : Cette directive fait partie d'un « paquet » de 4 directives relatives à l'exposition des travailleurs aux risques dus aux agents physiques : bruits, vibrations, champs électromagnétiques et rayonnements optiques.
Scission de la directive originelle : pour rappel, en 1992, la Commission a présenté une première proposition de directive particulière au sens de la directive cadre 89/391/CEE, visant à protéger les travailleurs contre 4 types d'agents physiques différents : le bruit, les vibrations mécaniques, les ondes et champs électromagnétiques et les rayonnements optiques. Devant la difficulté à adopter une directive portant sur l'ensemble de ces agents, il a été décidé en 1999 de scinder le texte de base en 4 propositions distinctes portant sur chacun des agents concernés. Toutes les délégations ainsi que la Commission ont accepté cette approche consistant à négocier un seul volet de la proposition sans pour autant renoncer aux autres volets. Pour les deux premiers agents physiques, les vibrations et le bruit, le Parlement européen et le Conseil sont parvenus à adopter respectivement les 2 directives suivantes : directive 2002/44/CE (voir COD/1992/0449) pour les vibrations mécaniques et directive 2003/10/CE (voir COD/1992/0499A) pour le bruit. La directive 2004/40/CE, adoptée plus récemment, se concentre sur les risques dus à l'exposition aux champs électromagnétiques (voir COD/1992/0449C), le 4ème volet faisant l’objet de la présente directive.
Directive « Sunshine » : dans sa proposition initiale, la Commission prévoyait de fixer des mesures contre les risques résultant d’une exposition des travailleurs à tous les types de rayonnements optiques, en ce compris les rayonnements naturels comme le soleil (ce qui a valu à ce texte le sobriquet de "Directive Sunshine"). Le compromis final obtenu à l’issue d’une 3ème lecture du texte par le Parlement européen et le Conseil, a finalement prévu de limiter le champ d’application de la directive aux seuls rayonnements artificiels. Au cours de la procédure législative qui a mené à l’adoption de la directive, la Commission a toutefois rappelé que l’acceptation du compromis ne signifiait pas que l'exposition aux radiations optiques d'origine naturelle ne constituait pas un risque pour les travailleurs exerçant des activités à l'extérieur.
CONTENU : la directive entend fixer des prescriptions minimales en matière de protection des travailleurs contre les risques pour leur santé et leur sécurité résultant (ou susceptibles de résulter) d'une exposition à des rayonnements optiques artificiels durant leur travail.
Champ d'application : par rayonnements optiques artificiels il faut entendre tous les rayonnements électromagnétiques d'une longueur d'onde comprise entre 100 nm et 1 mm, tels que rayonnements ultraviolets, rayonnements visibles ou rayonnements infrarouges. La directive s’applique également aux rayonnements émis par des lasers ou par des sources artificielles de rayonnements incohérents, pouvant entraîner des effets nocifs sur les yeux et sur la peau de manière aiguë ou chronique.
La directive réglemente le niveau d'exposition des travailleurs à ces rayonnements notamment en obligeant les employeurs à effectuer une analyse des risques préalable et à mettre en place des mesures de prévention dès la conception des postes de travail, afin d'éliminer ou de réduire les risques à la source.
En outre, elle fixe, parallèlement à d'autres mesures de protection, des valeurs limites d'exposition des travailleurs aux rayonnements incohérents (tous rayonnements autres que ceux émis par les sources naturelles de rayonnement optique tels que décrits à l’annexe I de la directive) et aux rayonnements laser (tels que décrits à l’annexe II).
Mesures à prendre par l'employeur pour limiter les risques : globalement, les employeurs devront s’employer à réduire les risques dus à une exposition des travailleurs à des rayonnements optiques artificiels, en appliquant des mesures en 2 temps :
1) en évaluant le niveau de risques des rayonnements : pour évaluer les risques, l'employeur devra tout d’abord mesurer les niveaux de rayonnements optiques auxquels les travailleurs sont exposés en vue de s'assurer que l'exposition ne dépasse pas les limites applicables. Pour mesurer ces seuils d’exposition, l’employeur se fondera sur les normes pertinentes fixées par la Commission électrotechnique internationale (CEI), la Commission internationale de l'éclairage (CIE), le Comité européen de normalisation (CEN) ou, à défaut, sur les lignes directrices d'ordre scientifique établies au niveau national ou international. L’évaluation pourra éventuellement tenir compte de données fournies par les fabricants d’équipements produisant des rayonnements optiques. Au moment de l’évaluation des risques, l’employeur devra également tenir compte d’un certain nombre de critères dont notamment, l’exposition de certains groupes à risque particulièrement sensibles ou de tout effet indirect tel qu'un aveuglement temporaire, une explosion ou un incendie ;
2) en réduisant les risques : ensuite, l'employeur doit veiller à réduire à un minimum le niveau d'exposition aux rayonnements et, si l'évaluation des risques indique une possibilité que les valeurs limites puissent ou ont été dépassées, à ramener l'exposition à un niveau acceptable, par exemple en choisissant un autre matériel ou en limitant le temps d'exposition. La directive suggère à cet égard toute une batterie de mesures techniques et/ou organisationnelles destinées à prévenir l'exposition excédant les valeurs limites. Parmi les mesures immédiates à prendre en tel cas, la directive prévoit en particulier des mesures de signalisation afin de circonscrire l’accès aux lieux concernés aux seules personnes habilitées.
Á noter que :
- les documents d’évaluation et de mesure du risque (effectués par du personnel compétent) devront être conservés sous une forme susceptible de permettre leur consultation à une date ultérieure. En outre, l'évaluation des risques devra régulièrement être mise à jour, notamment lorsque des changements importants, susceptibles de la rendre caduque, sont intervenus ou lorsque les résultats de la surveillance de la santé en démontrent la nécessité ;
- si, en dépit de toutes les mesures prises, les travailleurs continuent d’être exposés à des valeurs d’exposition dépassant les seuils prévus à la directive, l’employeur devra adapter en conséquence les mesures de protection et de prévention afin d'éviter tout nouveau dépassement.
Information et formation des travailleurs : les travailleurs et leurs représentants doivent recevoir les informations appropriées et/ou la formation nécessaire, par exemple en ce qui concerne la bonne utilisation des équipements de protection.
Consultation et participation des travailleurs : les employeurs doivent consulter au préalable les travailleurs ou leurs représentants en matière de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs. Ces derniers peuvent proposer des mesures pour améliorer cette protection et même faire appel aux autorités compétentes s'ils estiment que la protection de la santé offerte par l'employeur n'est pas suffisante (selon la directive-cadre 89/391/CEE).
Surveillance de la santé des travailleurs : la santé des travailleurs est soumise à une surveillance effectuée par un spécialiste (que ce soit de la médecine du travail ou d’une autorité médicale responsable) conformément à la loi et aux pratiques nationales.
Un dossier de santé individuel est ouvert et tenu à jour pour chaque travailleur dont la santé fait l'objet d'une mesure de surveillance en raison de son exposition aux rayonnements optiques d'origine artificielle. Les travailleurs concernés pourront accéder à leur dossier médical personnel sur demande.
Effets préjudiciables et/ou dépassement des valeurs limites : dans tous les cas d'exposition dépassant une valeur limite, un examen médical doit être proposé aux travailleurs. Si les valeurs limites ont été dépassées et/ou s'il est estimé qu'un travailleur a subi des effets préjudiciables à sa santé suite à une exposition professionnelle aux rayonnements optiques artificiels:
- le travailleur est informé par le médecin ou la personne qualifiée des résultats le concernant personnellement;
- l'employeur est informé des éléments significatifs dans le respect du secret médical; il réexamine l'évaluation des risques et les mesures précédemment adoptées, met en pratique les mesures recommandées par les personnes compétentes et met en place un système de surveillance continue.
Modifications des valeurs limites prévues à la directive : toute modification des valeurs limites d'exposition qui figurent dans les annexes est adoptée en codécision par le Parlement européen et le Conseil. En revanche, toutes modifications de nature purement technique (tenant compte de l’évolution de la normalisation des lieux de travail ou des progrès technique en lien avec l’évolution des connaissances scientifiques concernant l'exposition aux rayonnements optiques dans le cadre du travail) pourront être prises par la Commission (en vertu d’une procédure de comitologie impliquant l’information du Parlement européen).
Guide pratique : à la demande du Parlement européen, et pour faciliter la mise en œuvre de la directive, il est prévu que la Commission réalise un guide pratique sur ses principales dispositions liées en particulier à l’évaluation et à la prévention/réduction des risques ainsi qu’à la mise en œuvre des annexes liées aux valeurs limites d’exposition des travailleurs.
Sanctions : les États membres doivent prévoir des sanctions appropriées en cas de violation des dispositions nationales qui transposent la directive. Ces sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. En tout état de cause, la mise en œuvre de la directive ne doit pas servir à justifier une détérioration de la situation de la protection des travailleurs prévalant dans chaque État membre.
Rapports : tous les 5 ans, les États membres soumettent un rapport à la Commission sur la mise en œuvre pratique de la directive, en incluant l'avis des partenaires sociaux. La Commission, pour sa part, informe tous les 5 ans de l'évaluation qu'elle fait de ces rapports au Parlement européen, au Conseil et au Comité consultatif pour la sécurité et la santé sur le lieu de travail.
ENTRÉE EN VIGUEUR : 27.04.2006.
TRANSPOSITION DANS LES ÉTATS MEMBRES : 27.04.2010.